Eglises d'Asie

Excédés par la persécution exercée contre leur religion, deux fidèles du bouddhisme hoa hao se sont immolés par le feu

Publié le 18/03/2010




Au début du mois d’août dernier, deux religieux et fidèles du bouddhisme hoa hao se sont immolés par le feu pour protester contre les persécutions exercées contre eux et leur religion par les autorités locales. Le récit de ces événements a ému l’opinion et suscité chez les croyants de diverses religions de nombreuses protestations aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur. Cependant, les rapports des faits diffusés sur Internet et sur les ondes de radios étrangères sont loin d’être clairs et cohérents. Il faut toutefois remarquer que la presse officielle, en l’occurrence le journal de la Sécurité de Hô Chi Minh-Ville, a indirectement confirmé la véracité de ces faits. Nous nous appuyons ici sur le témoignage du chef spirituel du bouddhisme hoa hao, Lê Quang Liêm, et le témoignage oculaire d’un fidèle hoa hao diffusé par le porte-parole du bouddhisme hoa hao à l’étranger.

M. Lê Quang Liêm, âgé de 86 ans, est un ancien dirigeant de la religion hoa hao, aujourd’hui mis à l’écart par le pouvoir, qui a placé en tête de la communauté des fidèles un comité directeur formé d’hommes choisis par lui. Il est aujourd’hui isolé et surveillé dans sa résidence de Phu Nhuân, à Hô Chi Minh-Ville. Il a présenté les récentes persécutions de son Eglise dans une lettre datée du 28 août 2005 (1). “La persécution s’est abattue sur nous comme une violente bourrasque affirme le vieil homme avant d’entamer son récit. L’affaire a commencé lorsque, le 3 juin dernier, environ trente familles de fidèles de la province de An Giang sont venues célébrer une cérémonie funéraire en l’honneur de M. Ha Hai, tout récemment décédé chez lui, quelques jours après avoir été libéré de prison. Repoussés par la police, les fidèles entamèrent une grève de la faim collective et s’engagèrent à s’immoler par le feu au cas où les forces de l’ordre viendraient les arrêter. Pour calmer les manifestants, les autorités essayèrent de négocier et promirent au chef spirituel des hoa hao de régler les problèmes de façon satisfaisante. Mais plus tard, ils procédèrent à l’arrestation de dix fidèles, ce qui provoqua l’immolation par le feu de deux d’entre eux, Trân Van Ut et Vo Van Buu, le 5 août 2005. Seul le premier est décédé, la police ayant réussi à arracher le bidon d’essence des mains du second. Très gravement brûlé, celui-ci est aujourd’hui entre la vie et la mort. Des dizaines de lettres ont été envoyées aux autorités locales et nationales par les fidèles hoa hao, qui se sont engés à se sacrifier eux aussi par le feu si les autorités continuaient ces attaques contre leur religion et les empêchaient de rencontrer leurs amis et parents arrêtés.

Un ami de M. Nguypen Van Ut, réfugié aux Etats-Unis, se trouvait à ce moment en visite chez sa mère, dont la maison est située à environ 300 mètres de celle de son ami. Il a été témoin de sa mort et son témoignage a été diffusé par l’Eglise hoa hao à l’étranger, dont le siège est à Washington. Voulant rendre visite son ami, il apprit que ce dernier menait une grève de la faim tandis que sa maison était cernée par la police depuis plusieurs mois. Le 5 août à midi, une quarantaine de policiers entouraient la maison, équipés de trois lances à incendie et de plusieurs extincteurs. Une heure plus tard, un policier frappait à la porte et entendait son occupant répondre qu’il se brûlerait si la police pénétrait chez lui. Plusieurs agents commencèrent alors à défoncer la porte. Lorsque cette dernière commença à céder, le fidèle s’arrosa d’essence et, avec la flamme d’un briquet, se transforma aussitôt en torche vivante. Le matériel anti-incendie apporté par les forces de l’ordre n’a pas fonctionné et ce n’est que plus tard que l’on a retiré les cendres de M. Ut sous celles de sa maison.

Le récit de ces événements a fait grande impression dans les milieux religieux du Vietnam. Des prêtres catholiques de Huê ont dit leur solidarité avec les bouddhistes hoa hao. Dès le 15 août, au nom du bouddhisme unifié, le vénérable Thich Quang Dô, recteur de l’institut pour la propagation du Dharma, envoyait ses condoléances aux familles des victimes.