Eglises d'Asie

La Congrégation Saint Joseph de Nha Trang refuse d’accepter une décision secrète des autorités la dépouillant de ses propriétés

Publié le 18/03/2010




Voilà quelques mois que le torchon brûle et que les esprits s’échauffent dans le conflit qui oppose les autorités régionales de la ville côtière de Nha Trang et la petite congrégation locale de Saint Joseph, soutenue par la hiérarchie et les fidèles du diocèse. Des lettres de protestation en grand nombre ont été envoyées à toutes les instances politiques et administratives ; un dossier rassemblé le 4 septembre dernier par le supérieur de la Congrégation en citait quinze, les premières datant de septembre 2004. Les fidèles ont même manifesté dans les rues de Nha Trang le 29 août dernier, pénétrant sur le chantier du 10 rue Vo Thi Sau et exigeant que soient interrompus les travaux entrepris sur l’emplacement de l’ancienne école de la Congrégation Saint Joseph.

Cette affaire s’est grandement envenimée, en effet, avec le début de travaux de construction d’un immeuble de rapport sur un terrain appartenant à la Congrégation Saint Joseph, terrain sur lequel celle-ci avait le projet de construire un centre de soins de médecine traditionnelle. Comme l’a affirmé le P. Hoang à Radio Free Asia, le 13 septembre dernier, après le changement de régime politique de 1975, un terrain et un établissement éducatif avaient été prêtés par la congrégation à une société de produits de la mer pour une période de cinq ans. Sans tenir compte de l’engagement pris, celle-ci s’est accaparé ces biens avec la connivence des autorités civiles et vient d’entreprendre des travaux de construction.

Dans une lettre de plainte envoyée au ministre des Ressources naturelles et de l’Environnement, le 29 juin dernier, le P. Luu Minh Hoang a exposé le déroulement de cette affaire. C’est en 1954 que le Congrégation avait acheté la propriété en vue d’y installer une exploitation agricole et d’y construire des bâtiments. L’opération avait été effectuée légalement, comme en font foi de nombreuses pièces d’archives citées dans la lettre. En octobre 1978, à la requête de la société de produits de la mer du Khanh Hoa, la Congrégation avait, pour un temps, prêté à cette dernière une fraction de la propriété. Un contrat avait été signé et il était entendu que le terrain serait rendu à ses légitimes propriétaires dès que les affaires de la société seraient revenues à la normale, à savoir cinq ans plus tard. Les choses semblaient bien se passer jusqu’à récemment, lorsque les religieux exposèrent dans une plainte adressée aux autorités leur souhait de récupérer les biens empruntés pour construire un centre de soins de médecine traditionnelle, discipline dans laquelle les religieux se sont spécialisés.

C’est alors qu’à leur grande surprise, le 4 mai 2005, une décision, intitulée 406/QD-CT, leur fut envoyée par le Comité populaire de la province de Khanh Hoa, les informant qu’en 1983, date de l’expiration du contrat, le terrain prêté par les religieux avait été attribué en pleine propriété à la société de production de produits de la mer. Ainsi, grâce au silence complice de la société industrielle et des autorités civiles locales, la Congrégation Saint Joseph avait dû attendre vingt-deux ans pour savoir qu’elle avait été dépouillée de ses biens.

La protestation de la Congrégation, largement soutenue par la hiérarchie et la population chrétienne du diocèse et des régions avoisinantes, s’appuie sur l’illégalité du procédé utilisé pour dépouiller un établissement religieux de ses biens, en tenant ce dernier dans l’ignorance. Les protestataires mettent en parallèle les deux projets concurrents qui s’affrontent. D’un côté, les légitimes propriétaires veulent créer une institution au service de la santé des plus pauvres. De l’autre, les représentants du pouvoir utilisent une propriété empruntée au nom du service public pour construire un immeuble destiné à enrichir certains individus.