Eglises d'Asie

Le président de la République a ordonné à son gouvernement de procéder à la révision du décret de 1969 régissant la construction des lieux de culte

Publié le 18/03/2010




Le 4 septembre dernier, le président de la République, Susilo Bambang Yudhoyono, a ordonné à son ministre des Affaires religieuses, le musulman M. Maftuh Basyuni, de trouver une solution rapide aux problèmes posés par la construction de lieux de culte dans le pays. La veille, près de deux mille personnes avaient manifesté dans les rues de Djakarta pour demander une révision du décret de 1969 qui régit la construction des lieux de culte. Les chrétiens étaient majoritaires à manifester, mais des musulmans se trouvaient à leurs côtés et l’ancien président de la République Abdurrahman Wahid était venu les soutenir, déclarant que certains, dans l’Indonésie d’aujourd’hui, refusaient de comprendre la signification de la devise de la République indonésienne : “L’unité dans la diversité”.

L’affaire trouve son origine dans la fermeture, ces derniers douze mois, d’une vingtaine de lieux de culte protestants, le plus souvent évangéliques, de la province de Java-Ouest (1). Du fait de ce décret de 1969, les responsables des Eglises protestantes se plaignent de la quasi impossibilité pour eux d’obtenir un permis en bonne et due forme afin de bâtir et de faire fonctionner les lieux de culte qu’ils souhaitent ouvrir. Du fait de cette impossibilité, des résidences privées ou des locaux commerciaux sont convertis en lieux de culte, et, ces derniers mois, des musulmans appartenant au Front des défenseurs de l’islam et actifs dans l’Alliance pour le mouvement contre l’apostasie, ont contraint une vingtaine de ces lieux de culte à fermer. Les responsables des Eglises chrétiennes, dont le cardinal de Djakarta, ont demandé le respect des libertés constitutionnelles et réclamé le droit pour les chrétiens de pratiquer leur religion. Le dimanche 11 septembre notamment, dans la ville de Bekasi, des chrétiens ont célébré le culte dans la rue, des militants du Front des défenseurs de l’islam ayant érigé des barrages pour empêcher l’accès au bâtiment qui faisaient office de temple. La police a été déployée sur les lieux et aucune violence n’a été commise, mais musulmans et chrétiens ne sont pas parvenus à un accord.

Pour le président de la République, la question de la révision du décret de 1969 a pris une tournure relativement délicate dans la mesure où, dans un premier temps, son ministre des Affaires religieuses avait déclaré, le 26 août dernier, que les fermetures de lieux de culte à Java-Ouest étaient un non-événement dans la mesure où les églises et les temples en question étaient des “congrégations illégales”. L’unité gouvernementale a été toutefois réaffirmée à l’issue d’une réunion d’une partie du cabinet le 14 septembre dernier. Cette réunion a rassemblé, entre autres, le ministre de l’Intérieur, M. Ma’ruf, le ministre des Affaires religieuses, M. Maftuh Basyuni, et le ministre de la Justice et des droits de l’homme, Hamid Awaluddin. Le détail des décisions prises lors de cette réunion n’est pas connu, mais le principe de la révision du décret de 1969 y a été affirmé.

Ce décret, qui stipule que la construction d’un lieu de culte est subordonnée à l’accord écrit du responsable de l’administration locale et à l’approbation des résidents, donc des organisations et des responsables religieux, sera amendé, afin que les Forums interreligieux, organismes indépendants implantés dans toutes les provinces du pays, y soient associés. “L’établissement d’un lieu de culte dans un endroit donné devra prendre en compte l’avis des responsables interreligieux. Cela sera fait par le biais des FKUB. Les responsables locaux de l’administration n’auront qu’un rôle de coordination a déclaré le ministre de l’Intérieur. FKUB est l’acronyme indonésien des Forums interreligieux. Le ministre a ajouté que le mécanisme qui règlera la coordination entre les Forums interreligieux, le ministère des Affaires religieuses et les administrations locales sera précisé ultérieurement, sans doute d’ici à la fin du mois de septembre. L’administration locale sera investie de la mission de “maintenir l’harmonie interreligieuse en assurant une bonne coordination entre les Affaires religieuses et les Forums interreligieux, a encore précisé le ministre, pour qui la révision du décret de 1969 est rendue nécessaire par “la décentralisation et l’autonomie régionale mises en place ces dernières années en Indonésie.