Eglises d'Asie

Orissa : dans le district de Deogarh, les chrétiens sont inquiets de se voir exclus de certains hôtels ou de certaines boutiques qui refusent de les accueillir ou de les servir

Publié le 18/03/2010




Les responsables des Eglises chrétiennes en Orissa sont inquiets de voir certains commerçants être obligés, sous la pression d’extrémistes hindous, de refuser l’entrée de leurs établissements aux chrétiens. Le pasteur Samuel Kumar, de l’Eglise baptiste, affirme que certains hôtels et coiffeurs de la ville de Deogarh, dans le district éponyme, ont refusé d’accueillir ou de servir les chrétiens ces derniers six mois. Le district de Deogarh, peuplé de 2,74 millions d’habitants, compte 10 000 chrétiens de différentes dénominations, dont environ 4 000 catholiques.

Aux journalistes de l’agence Ucanews, Junas Kumar Mishra, propriétaire d’un hôtel, a déclaré n’accueillir dans son établissement que des hindous (1). Dans ce district à prédominance hindoue, connu pour être très attaché au système des castes, a expliqué Junas Kumar Mishra, il n’y a pas d’autre choix que d’obéir à l’interdiction d’accueillir des non-hindous imposée par certains hindous. Hindou lui-même, Junas Kumar Mishra appartient à une haute caste. Selon lui, seulement cinq hôtels et deux commerces ont obéit à l’interdit. Ces établissements pourraient ne plus pouvoir travailler s’ils désobéissaient à l’interdit, a-t-il ajouté, car, dans ce cas, les hindous non seulement boycotteraient ces lieux, mais ils les attaqueraient pour les détruire. Interrogée à ce sujet, la police locale a affirmé ne rien savoir de ce boycott et a promis de s’informer.

Un autre pasteur baptiste, le Rév. Kujur, indique que les responsables des hôtels et des coiffeurs demandent l’identité des gens avant de les recevoir et signifient aux chrétiens qu’ils ne sont pas les bienvenus. Ce boycott est une véritable “discrimination inhumaine souligne-t-il. Un prêtre catholique a fait la même expérience. Le P. Ratikant Ranjit a quitté la ville, “écouré en févier dernier. Prêtre de l’archidiocèse de Cuttack-Bhunaneswar, il venait d’être nommé à Deogarh et, entré dans un restaurant pour déjeuner, il s’est vu refuser l’entrée. Plus tard, un coiffeur le refoula de la même façon. Le P. Ranjit voulut questionner les commerçants sur la discrimination qui lui était faite, mais des hindous présents sur les lieux lui demandèrent de quitter les lieux “sans faire d’histoire”. Inquiet de voir sa présence risquer de provoquer des échauffourées, il obtempéra.

Pour Mgr Christo Charan Das, évêque de Sambalpur au sein de l’Eglise (protestante) du Nord de l’Inde, ce boycott constitue une violation caractérisée de la Constitution indienne, qui interdit toute discrimination. Le P. Paul Unandanparambil, curé de la paroisse catholique de Deogarh, qualifie ce boycott d’“immense honte” et précise que les responsables chrétiens dans la région sont d’accord pour porter le cas devant les autorités. Un groupe de chrétiens prépare un dossier pour une action en justice contre les commerçants qui imposent cette exclusion et ils disent être prêts à descendre dans la rue au cas où ils n’obtiendraient pas justice.

Des responsables non chrétiens ont eux aussi condamné la discrimination faite aux chrétiens à Deogarh. L’un d’entre eux, Ahamad Khan, un responsable musulman, souligne qu’elle pourrait aussi bien s’étendre à d’autres communautés religieuses. Rahul Chandra Bage, engagé dans la défense des causes sociales, pour qui cette discrimination est “une violation directe de la dignité humaine a déclaré souhaiter saisir la Commission des droits de l’homme de l’Etat d’Orissa. Patitapaban Sagar Panigrahi, un hôtelier hindou opposé au boycott, affirme, quant à lui, que son travail étant de faire des affaires, personne n’avait à lui dicter qui son établissement devait ou ne devait pas accueillir.