Eglises d'Asie

Pour les opposants à la présidente Arroyo, le refus des évêques catholiques de soutenir leur cause est la raison de la faible mobilisation de leur mouvement

Publié le 18/03/2010




Même si, le 6 septembre dernier (1), un vote de la Chambre des représentants a écarté l’hypothèse d’une destitution de la présidente Gloria Arroyo, les opposants de celle-ci n’ont pas abandonné tout espoir de voir la présidente quitter le pouvoir. Le 21 septembre, ils avaient appelé à une manifestation populaire dans la ville de Bacolod, ce jour commémorant l’instauration de la loi martiale, décrétée en 1972 par le dictateur Ferdinand Marcos. Leur déception a été grande lorsqu’ils ont constaté que la mobilisation populaire était très faible, deux mille personnes à peine ayant répondu à leur appel. Selon la presse, les manifestations de ce 21 septembre ont été “anémiques” et ne soutenaient pas la comparaison avec celles qui ont eu lieu dans les années qui ont suivi 1981 et la levée de la loi martiale, lorsque des dizaines de milliers de personnes défilaient dans les rues du chef-lieu de la province de Negros Occidental. Pour les organisateurs des manifestations anti-Arroyo, ce sont les évêques catholiques et leur refus de soutenir leur mouvement qui sont la cause de la faiblesse de la mobilisation populaire.

A Bacolod, les organisateurs de la manifestation du 21 septembre dénonçaient “la suppression de la vérité, de la justice et de la liberté” et le refus de la présidente Arroyo de fournir des réponses directes et claires aux accusations de fraude électorale et de corruption portées contre elle. Le “Mouvement de Negros pour une régénération morale” était formé de la Nouvelle Alliance patriotique (BAYAN), mouvement de gauche, des évêques de l’Eglise indépendante des Philippines (2) et de Bangon Pilipinas (‘Debout les Philippines’), un mouvement soutenu par le leader évangélique Eduardo Villanueva, qui s’était présentée contre Arroyo lors des présidentielles de 2004.

L’unique représentant de l’Eglise catholique à cette manifestation était le P. Ireneo Gordoncillo, curé de paroisse dans le diocèse de Bacolod. Son évêque, Mgr Vicente Navarra, s’était joint au début du mois de septembre dernier à un mouvement de protestation anti-Arroyo, mais il a refusé de se joindre à la manifestation du 21 septembre. Aux organisateurs de la manifestation, il a déclaré que l’Eglise “souhaitait toujours que la vérité sorte au grand jour mais que “les évêques n’étaient pas favorables à des manifestations de rue”. Quelques jours plus tôt, Mgr Navarra était à Manille pour prendre part à une réunion de réflexion rassemblant une dizaine d’évêques. Ces évêques avaient conclu leur réflexion en décidant que les Philippines étaient malades d’un excès de politique politicienne et qu’ils n’étaient pas de leur ressort d’appeler ou de ne pas appeler à la destitution de la présidente, car les groupes engagés en politique, quel que soit leur bord, ne poursuivaient jamais que leurs propres fins et négligeaient l’intérêt général (3). Peu après, le Comité permanent de la Conférence des évêques catholiques des Philippines appelait à la poursuite de la recherche de la vérité “dans le respect des règles de droit énoncées dans la Constitution” (4).

Pour Mgr Roman Tiples, évêque émérite de l’Eglise indépendante des Philippines, la position des évêques catholiques est une “erreur majeure” à l’heure où “l’Eglise devrait donner avec netteté une direction morale au peuple, pour s’élever contre l’occultation permanente de la vérité”. A Manille, les partisans de la démission-destitution de la présidente Arroyo ont déclaré rester optimistes quant au succès de leur cause, tout en admettant que la position arrêtée par les évêques “rendait le chemin difficile”.