Eglises d'Asie

Dans certaines régions de Papouasie occidentale, malgré une loi récente, les traditions permettent toujours à un homme de battre sa femme

Publié le 18/03/2010




Dans certaines régions de Papouasie occidentale, les hommes considèrent leur femme comme “leur chose” puisque, disent-ils, ils se sont acquittés du “prix de la mariée” (emas kawin). Les violences domestiques y sont donc courantes, malgré la loi qui les interdit. C’est tous les jours qu’on nous parle d’hommes battant ou violant leur femme, rapporte Maria Kurupat, députée à l’assemblée provinciale de Merauke. Selon elle, un homme qui bat sa femme n’éprouve même pas le besoin de le nier. Maria Kurupat cite ainsi le cas d’une plainte déposée au bureau de police contre une homme violent : “Au policier, l’homme a seulement dit qu’il avait acheté sa femme selon les règles en s’acquittant de kawin’ », et la police n’a rien entrepris pour aider cette femme. Agée de 35 ans, la députée affirme encore qu’il est fréquent de voir des femmes le long de la Digul, un fleuve qui coule à Mappi, extraire le sable pour en charger des barques et aller le vendre pour 6 000 roupies (0,4 euros) par jour. Souvent, continue-t-elle, le mari ne travaille pas et vit sur le peu que lui rapporte sa femme.

Pour le P. Dwi Rahadi, le problème est lié à la conception que l’homme marié se fait de sa femme. “Puisqu’ils ont payé le ‘prix pour la mariée’, ils estiment qu’ils peuvent battre leur femmes, souvent au prétexte qu’elles sont paresseuses. Mais ce sont les hommes qui sont paresseux observe-t-il. Maria Kurupat ajoute que les mauvais traitements faits aux femmes ne sont pas l’apanage du district de Mappi. La situation est la même à Asmat et Bowen Digul. D’après elle, depuis la promulgation, le 22 septembre 2004, de la “Loi sur les violences domestiques peu de choses ont été faites pour la faire connaître. En dix chapitres et quarante-cinq articles, la loi décrit les violences domestiques comme autant de crimes contre la dignité humaine. Elle punit les auteurs de cinq à vingt ans de prison et d’amendes allant de trois à cinq millions de roupies. Maria Kurupat demande que la police, les prêtres catholiques, les religieuses, les responsables protestants et musulmans se familiarisent avec cette loi. “Ils doivent aider les femmes à la bien connaître pour qu’elles puissent se défendre elles-mêmes dit-elle, ajoutant que les hommes eux aussi devraient savoir qu’abuser d’une femme est une violation des droits de l’homme.

Theresia Samkakai, vice-présidente de la Fondation St Antoine, un groupe d’action sociale de l’archidiocèse de Merauke, reconnaît la nécessité de faire prendre conscience aux hommes qu’une loi existe. « Mais ‘Quelle loi ? On n’en a jamais entendu parler’, disent les gens de Papouasie qui ne savent ni lire ni écrire rapporte-t-elle. Theresia Samkakai vit à Wambi, un village proche de la frontière avec la Papouasie-Nouvelle Guinée. Elle appartient à l’ethnie des Marind et explique que les gens de sa région acceptent généralement les violences domestiques comme quelque chose d’usuel dans les familles comme le sont les problèmes d’argent ou autres. La sagesse commune aux femmes est simple : “Se soumettre devant le mari qui a payé kawin est encore la meilleure chose à faire dit-elle, ajoutant : “Ce n’est pas seulement les femmes, mais les hommes aussi qui devraient connaître la nouvelle loi.”

Selon Sour Agusta Agatha Rumsifa, on peut espérer en effet que l’information finira par circuler au sujet de cette loi, que ce texte finira par être appliqué et ne restera pas lettre morte, mais la religieuse estime que ce n’est pas une réponse à long terme au problème. Pour elle, “la seule solution pour éradiquer la violence est d’apprendre aux gens brutaux à considérer les autres comme des êtres humains”.