Eglises d'Asie

Sous la pression de la diplomatie vietnamienne, deux stèles rappelant l’exode des boat people vietnamiens en Malaisie et en Indonésie ont été détruites

Publié le 18/03/2010




Le 22 octobre dernier, un communiqué de l’association “Archives des boat-people” a indiqué que les autorités de l’Etat de Terrenganu, en Malaisie, venaient de faire abattre les 20 et 21 octobre derniers, le monument élevé à la mémoires des réfugiés vietnamiens de la mer sur l’île de Pulao Bidong (Pulau Bidong), lieu où se trouvait un célèbre camp ayant abrité pendant une vingtaine d’années des dizaines de milliers de vietnamiens ayant fui leur pays par la mer (1). La même source précise que les autorités ont agi sous la pression de l’ambassadeur du Vietnam en Malaisie. Celui-ci avait exprimé son intention de venir avec une partie de son personnel faire une visite de l’île, une visite sans doute incompatible avec la présence de cette stèle.

C’est le deuxième monument érigé en mémoire des réfugiés vietnamiens à être ainsi détruit par les autorités locales. Il y a quelque temps déjà, à la fin du mois de mai dernier, un premier mémorial du même type élevé dans un ancien camp de réfugiés de l’île de Galang, en Indonésie, avait également été abattu dans les mêmes conditions. Les deux monuments avaient été édifiés par la diaspora vietnamienne à la même époque, le 21 et le 24 mars 2005. Dans les deux cas, les diplomates vietnamiens ont fait valoir auprès de l’administration locale que le texte inscrit sur le monument attentait à l’honneur du Vietnam et mettait en cause les relations entre les deux pays.

Les deux mémoriaux portaient le même texte anglais sur une de leurs faces : “En reconnaissance pour les efforts du UNHCR, de la Croix-Rouge, du Croissant-Rouge malaisien (indonésien, sur la stèle de Pulau Galang) et des autres organismes d’assistance du gouvernement et du peuple malais ainsi que des autres pays qui ont offert soit le premier asile soit un établissement définitif. Nous exprimons aussi notre gratitude pour les milliers d’individus qui ont contribué à l’aide des réfugiés vietnamiens.” Sur l’autre face de couleur noire, on pouvait lire : “En mémoire des milliers de Vietnamiens qui ont péri en recherchant la liberté (1975-1996). Qu’ils soient morts de faim ou de soif, de mauvais traitements, d’épuisement ou pour une autre cause, nous prions pour qu’ils obtiennent le repos éternel. Leur sacrifice ne sera pas oublié.”

Le communiqué de l’association “Archives des boat people” s’interroge sur le motif de la visite du diplomate vietnamien sur cette île. Pulao Bidong est aujourd’hui une île quasi déserte. Seuls restent quelques vestiges de l’ancienne présence des réfugiés vietnamiens, chapelles, pagodes, toutes en très mauvais état, un cimetière de 250 tombes environ, recouvertes de mousse. Par ailleurs, en cette saison, les bateaux, paralysés par le mauvais temps, ne transportent guère de touristes dans cette île.

L’association “Archives des boat people” affirme dans son communiqué que les deux mémoriaux construits avec la contribution financière des Vietnamiens de la diaspora seront édifiés à nouveau. Après concertation avec les autorités locales et les associations vietnamiennes dans le monde, un nouveau texte sera inscrit sur la stèle. Il s’agit là, dit le communiqué, d’un monument perpétuant la mémoire de tous ceux qui ont trouvé la mort sur le chemin de la liberté. Il exprime aussi la reconnaissance des réfugiés à l’égard des nations venues à leur secours. Il est rappelé à ce propos, que c’est à cause de l’émotion causée dans le monde par le nombre de boat people disparus en mer que le Haut Commissariat aux réfugiés auprès des Nations Unies avait convoqué une réunion internationale à Genève, en 1979, où avait été élaborés pour eux des programmes spéciaux, comme le Programme de départ dans l’ordre (ODP) ou encore le Programme de regroupement familial (2).