Eglises d'Asie

Célèbes : les responsables religieux ont immédiatement appelé au calme après le meurtre par décapitation de trois lycéennes chrétiennes

Publié le 18/03/2010




Dans la région de Poso, sur l’île de Célèbes, les responsables religieux, catholiques, protestants et musulmans, ont immédiatement appelé au calme après le meurtre de trois lycéennes chrétiennes. Les trois victimes, Theresia Morangkir, 15 ans, Alfita Poliwo, 17 ans, et Yarni Sambue, 15 ans, s’en allaient à pied à leur école, un lycée situé à Poso et géré par l’Eglise chrétienne de Sulawesi-Centre, quand elles ont été attaquées, le samedi 29 octobre dernier, par six hommes masqués. L’attaque a eu lieu au village de Bukit Bambu. Les trois jeunes filles, de religion chrétienne, ont été décapitées et les têtes ont été retrouvées près d’un poste de police et d’une église. La police a obtenu les détails de l’agression par une lycéenne, Noviana Malewa, qui se trouvait avec les trois victimes pendant l’agression mais qui a survécu malgré de graves blessures.

L’émotion a été intense dans la communauté chrétienne de Poso, mais aussi dans le reste du pays. L’agression s’est produite peu avant les fêtes de ul-Fitr, célébrations marquant la fin du ramadan pour les musulmans. Une fois la nouvelle rapidement connue, les responsables religieux de Poso ont appelé au calme, demandant aux fidèles de ne pas tomber dans le piège de la provocation, ni d’enclencher un cycle de violence qui aurait replongé la région dans les violences inter-communautaires qui ont opposé chrétiens et musulmans de la région de Poso de fin 1998 à 2001 (1).

Du côté catholique – la communauté catholique représentant une petite partie des chrétiens de la région de Poso -, Mgr Josephus Suwatan, évêque du diocèse de Manado (2), a fait part aux familles des victimes de la sympathie exprimée par le pape Benoît XVI. “Le Saint-Père prie pour elles et leurs proches a déclaré l’évêque, qui s’est interrogé sur les motivations des coupables. “Si elles avaient été tuées durant une guerre, cela aurait été facile à comprendre. Mais elles ont été décapitées en allant à l’école. Qu’est-ce que cela veut dire ? C’est tout simplement barbare a-t-il dit. “Nous nous trouvons face à une stratégie de la terreur qui veut choquer la population et provoquer l’insécurité au moment où les rapports entre les communautés chrétienne et musulmane sont désormais pacifiés a-t-il ajouté à un journaliste de l’agence Misna.

Pour le pasteur Weinata Sairin, vice-secrétaire de la Communion des Eglises en Indonésie (PGI, selon l’acronyme indonésien), cette “attaque, durant le mois du ramadan, est très cruelle”. Il a ajouté, à l’adresse des chrétiens, de ne pas se laisser submerger par la nouvelle et de rester unis en communion avec tous les croyants. Il a exprimé l’espoir que les autorités éclairciront rapidement cette affaire et en arrêteront les responsables.

Adnan Arsal, responsable religieux musulman de Poso, a pour sa part indiqué que les responsables des deux communautés, chrétienne et musulmane, étaient immédiatement entrés en contact afin de tenter d’apaiser la tension. “Nous sommes tombés d’accord pour laisser les autorités traiter cette affaire et trouver les coupables, sans que l’on se montre du doigt ou que l’on s’accuse mutuellement a-t-il rapporté à (3).

A Djakarta, la presse a dénoncé le triple assassinat. “Il n’y a pas de doute que ces meurtres et leur méthode – les têtes tranchées ont été placées à distance des corps – sont des actes de provocation visant à rallumer le conflit entre musulmans et chrétiens pouvait-on lire dans un éditorial du Jakarta Post du 31 octobre. Selon le quotidien Kompas, les services de renseignement indonésiens estiment que ce sont des “éléments étrangers” qui sont responsables de cette action et qui veulent semer le chaos à Poso en y créant les conditions d’un affrontement entre communautés religieuses. Par ailleurs, les responsables des deux plus grandes organisations musulmanes de masse du pays, la Nahdlatul Ulama et la Muhammadiyah, ont condamné l’acte criminel, Din Syamsuddin, président de la Muhammadiyah, se disant “convaincu qu’il n’a rien à voir avec les rapports entre les musulmans et les chrétiens”.

Le 8 novembre, selon des sources policières de Poso, un détachement de l’armée, appelé en renfort pour mener l’enquête, a interpellé cinq hommes, soupçonnés d’être impliqués dans le meurtre des trois lycéennes. L’un d’eux serait un ancien membre de la police militaire. Quelques jours plus tôt, le 4 novembre, un engin explosif artisanal avait été désamorcé à Poso ; il était placé devant un local proche d’une société publique de télécommunications. Enfin, le 9 novembre, deux hommes à moto ont ouvert le feu en passant devant une école pour jeunes filles de Poso ; deux lycéennes, âgées de 17 ans, ont été grièvement blessées à la tête.