Eglises d'Asie

Gujarat : l’aide désintéressée apportée par l’Eglise catholique après le tremblement de terre du 26 janvier 2001 amène des hindous à changer d’attitude envers les chrétiens

Publié le 18/03/2010




Après le tremblement de terre qui a ravagé une partie de l’Etat du Gujarat, le 26 janvier 2001 (1), l’aide humanitaire fournie par les ONG a été très importante ; parmi elles, se trouvaient des organisations chrétiennes, catholiques notamment. Près de quatre ans plus tard, ces organisations chrétiennes sont toujours à pied d’ouvre et leur travail de longue haleine et désintéressé auprès des populations locales a amené à un changement d’opinion parmi les habitants de la région, qui auparavant étaient relativement hostiles à la présence chrétienne parmi eux. “Je pensais que l’aide des chrétiens n’avaient pour seul but que de nous convertir commente Narottam Maheshwari, un villageois de Kevalia, situé dans le district de Rajkot. Autrefois proche des thèses défendues par la droite nationaliste hindoue, Narottam Maheshwari était farouchement opposé à la présence de missionnaires chrétiens dans sa région. Il est désormais “un de nos nouveaux admirateurs témoigne le P. C.C. Jose, responsable des services caritatifs du diocèse catholique de Rajkot.

D’après un bilan officiel, ce tremblement de terre a fait 13 805 morts, 105 000 blessés et a touché plus de 16 millions d’habitants, détruisant 200 000 habitations dans onze villes et 7 633 villages dont celui de Kevalia, appartenant au district de Rajkot dans la région de Kutch. Selon d’autres bilans, compilés par des ONG, le nombre des morts serait plus proche des 100 000. Dans les jours et les semaines qui ont suivi la catastrophe, les secours ont afflué dans la région. “Aujourd’hui, tout le monde est parti, mais les volontaires chrétiens sont toujours là pour nous aider rapporte Narottam Maheshwari, qui ajoute que la plupart des habitants de Kevalia étaient d’abord réticents à l’idée que leurs maisons soient reconstruites grâce à l’aide du diocèse de Rajkot. “Nous nous attendions, un jour ou l’autre, à ce qu’ils nous demandent de nous convertir, mais cela ne s’est jamais produit commente-t-il.

Selon le P. C.C Jose, avant le tremblement de terre, l’Eglise ne pouvait pas faire grand-chose pour corriger les préjugés que certains hindous nourrissaient contre les missionnaires. « A présent, ils ne perçoivent plus les services de l’Eglise comme une simple façade destinée à cacher ce qui serait notre objectif réel, à savoir convertir les personnes au christianisme ajoute-t-il. Pour coordonner son action sur le terrain, le diocèse catholique de Rajkot a formé le Navjeevan (‘Nouvelle Vie’) Trust, une organisation placée sous la tutelle des services caritatifs du diocèse et qui est responsable de multiples initiatives locales. Les groupes qui se sont mis en place sont essentiellement des structures de micro-crédit gérées par des villageoises. “Aujourd’hui, il existe huit cents groupes et nous espérons atteindre le nombre de mille à la fin de l’année commente le P. Jose. Selon Narottam Maheshwari, le travail réalisé par le groupe présent dans son village est impressionnant et sa femme a même rejoint une des structures en tant que bénévole. En plus des activités de micro-crédit, ces groupes agissent afin d’améliorer les conditions sanitaires dans les villages en s’assurant de la potabilité de l’eau et en améliorant les conditions d’hygiène.

Le travail réalisé par le diocèse de Rajkot, par l’intermédiaire du Navjeevan Trust, a été à ce point apprécié sur le terrain que le gouvernement de l’Etat du Gujarat, pourtant dirigé par le pro-hindou Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien), a confié la coordination des aides pour la région de Kutch au Navjeevan Trust, investi en 2003 du titre d’“association de référence”. Depuis cette date, tout projet mis en place dans le Kutch qui sollicite des fonds du gouvernement doit avoir préalablement reçu l’aval du Navjeevan Trust.

Selon Mgr Gregory Karotemprel, évêque de Rajkot, les services caritatifs du diocèse ont dépensé 1,25 milliard de roupies (24,3 millions d’euros) dans la région de Kutch, qui comprend les districts de Bhavnagar, Kutch, Rajkot et Surendranagar et qui couvre le territoire de son diocèse. Le diocèse travaille également à des projets de développement durable dans la région. “Les villageois ont réalisé que les bénévoles chrétiens étaient différents des autres organisations qui les ont aidés et sont repartis. Nous sommes ici pour rester déclare-t-il, ajoutant que, si le tremblement de terre avait été une calamité par les pertes en vies humaines, il avait également été l’occasion pour des millions de gens dans la région de percevoir différemment les missionnaires. En 1977, lorsque le diocèse a été établi, se rappelle le P. Jose, l’opposition de l’extrême droite hindoue à la présence chrétienne a été immédiate et, jusque récemment, à la fin des années 1990, des menaces d’extrémistes hindous ont obligé les responsables de l’Eglise à fermer des avant-postes missionnaires.