Eglises d'Asie

L’Eglise catholique condamne l’assassinat de Ricardo Ramos, président du syndicat des travail-leurs de la hacienda Luisita, vaste plantation de canne à sucre de la province de Tarlac

Publié le 18/03/2010




Trois archevêques de l’Eglise catholique qui, depuis plusieurs mois, faisaient office de médiateurs dans le conflit opposant les employés et la direction de la plantation de canne à sucre Louisita (1), ont condamné en termes très fermes l’assassinat de Ricardo Ramos, président de CATLU (Central Azucarera de Tarlac Labor Union), le syndicat des travailleurs de la raffinerie de sucre située dans l’enceinte de la hacienda Luisita, vaste plantation de canne à sucre de la province de Tarlac. Ricardo Ramos, un ingénieur âgé de 45 ans qui assumait également la direction de Mapalacsiao, un des dix villages situés dans l’enceinte de l’hacienda Luisita, a été tué le 25 octobre dernier, d’une balle dans le dos, lors d’une fête organisée avec les membres du CATLU.

Dans un communiqué en date du 28 octobre dernier, Mgr Fernando Capalla, président sortant de la Conférence épiscopale des Philippines et archevêque de Davao, a condamné “l’assassinat cruel d’un leader qui, de son vivant et aujourd’hui encore, rassemble les pauvres, les hommes politiques et les membres de l’Eglise pour faire avancer la justice Il était le “défenseur des pauvres et l’ami de la paix. Il avait conquis les cours et était respecté grâce à son humilité et à son dévouement auprès de ses frères et sours du CATLU et de l’ULWU (Syndicat des fermiers) Mgr Fernando Capalla avait placé en tête de son communiqué les mots : “Ka Ric Ramos, défenseur des pauvres et ami de la paix ‘signifiant ‘Camarade’ en tagalog. L’archevêque a rappelé le rôle primordial joué par Ricardo Ramos dans la participation de l’Eglise catholique à l’apaisement du conflit opposant les employés et la direction de la plantation Louisita (2). Il a aussi évoqué le fait que la vie de Ricardo Ramos faisait écho au message du pape Jean-Paul II, repris lors de l’Assemblée plénière de la Conférence épiscopale philippine, le 23 janvier 2005, qui invitait les catholiques à vaincre le mal par le bien. Pour sa part, Mgr Paciano Aniceto, archevêque de San Fernando, a salué en Ricardo Ramos un homme de paix, dévoué aux plus pauvres ; il s’est souvenu qu’il était venu solliciter son aide lorsque les employés de la plantation, alors en grève, avaient faim. Pour lui, cet assassinat est “vraiment choquant 

En novembre 2004, à l’hacienda Luisita, une grève des employés avait éclaté après le licenciement de 327 d’entre eux. Le 16 novembre de cette année, la dispersion violente d’une manifestation avait causé la mort de sept personnes. Peu après, Ricardo Ramos avait reçu des menaces de mort. En février 2005, Mgr Fernando Capalla, Mgr Paciano Aniceto et Mgr Florentino Cinense, du diocèse de Tarlac, ainsi que les responsables politiques de la ville et de la province de Tarlac (située à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Manille), avaient convaincu les deux parties en présence d’entamer des négociations, qui portaient principalement sur les salaires et la réintégration des quelque 300 employés licenciés, dont 35 délégués syndicaux. Après bien des péripéties, un accord a été conclu en septembre dernier, la direction de l’hacienda acceptant de prendre en compte un certain nombre des revendications des employés.

C’est ainsi que, le 25 octobre dernier, la direction de l’hacienda a versé au syndicat CATLU huit millions de pesos (125 000 euros), au titre des salaires impayés. Quelques heures après, le président de CATLU était assassiné alors que les membres du syndicat fêtaient l’évènement. Cet assassinat survient un peu moins de neuf mois après le meurtre de deux sympathisants de la cause des employés de l’hacienda Luisita. En mars dernier, Abelardo Ladera, conseiller municipal, et William Tadena, prêtre de l’Eglise Aglipayan, étaient assassinés et, depuis, ces deux affaires n’ont pas été éclaircies (3).

Après l’assassinat de Ricardo Ramos, Mgr Paciano Aniceto a invité les habitants de la plantation à la prudence. Mgr Fernando Capalla, a, quant à lui, rapporté que l’Eglise pouvait voir le bien dans chaque partie impliquée dans le conflit de la plantation – y compris les militaires et les propriétaires de l’hacienda -, par le fait que tous avaient exprimé leurs condoléances à la famille de Ricardo Ramos et exigé une enquête sur ce meurtre. Le 31 octobre, Mgr Aniceto et Mgr Cinense ont célébré une messe à Mapalacsiao à l’intention de Ricardo Ramos, de sa femme et de leurs trois enfants. A Manille, la présidente Gloria Arroyo a déclaré avoir ordonné une enquête rapide et impartiale.