Eglises d'Asie

Des chrétiens réagissent aux propos tenus par le responsable d’une organisation extrémiste hindoue au sujet de l’injonction nataliste faite aux hindous

Publié le 18/03/2010




Différentes associations chrétiennes ont vivement réagi aux propos du responsable du Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS, Corps national des volontaires), K. S. Sudarshan, qui s’est exprimé le 17 novembre dernier, invitant les fidèles hindous à avoir un minimum de trois enfants afin “de maintenir la religion, la culture et la société hindoue Dans ce communiqué, K. S. Sudarshan a insisté sur la nécessité pour les hindous d’avoir un taux de natalité plus élevé, eu égard à l’essor démographique des minorités chrétienne et musulmane : “Si vous n’avez qu’un enfant par famille, dans les 120 prochaines années, vous n’aurez plus de descendance familiale. Vous ne devez pas avoir moins de trois enfants et, si vous en avez plus, c’est encore mieux.”

John Dayal, président de l’AICU (All India Catholic Union), qui s’est exprimé dans un communiqué du 19 novembre dernier, a qualifié les propos du leader nationaliste hindou de “racistes” et “nourris par des préjugés datant d’une époque d’eugénisme qui s’est éteinte avec la fin des concepts hitlériens de ‘race pure’ Il a également souligné le caractère discriminatoire de son discours vis-à-vis des fem-mes, perçues uniquement sous l’angle de la maternité : “Sa conception de la femme indienne, victime d’agressions sexuelles dès son enfance sous couvert de mariage traditionnel et qui, à présent, est considérée comme un moyen politique de servir une idéologie démente et haineuse vis-à-vis des autres communautés, est épouvantable et inacceptable.” Le président de l’AICU a aussi ajouté : “Ces dernières années, nous avons déjà pu nous familiariser avec les propos très dangereux du groupe ultra nationaliste Rashtriya Swayamsewak Sangh : demande d’élimination des pays voisins, critiques très violentes exprimées contre les minorités religieuses chrétienne et musulmane (.). Le RSS cherche à supprimer le pluralisme indien (.). Les minorités ethniques, aborigènes et religieuses ont alerté la société indienne car ses messages ébranlent les principes démocratiques qui sous-tendent l’unité et l’intégrité de l’Inde.”

John Dayal a précisé de surcroît que les statistiques utilisées par le RSS sont douteuses en ce sens qu’elles puisent leurs sources dans une publication de 2001 produite par le Center for Policy Studies de Chennai (Madras), connu pour être proche des thèses de l’extrême droite hindoue. Parue peu après le recensement de 2001, cette publication, soutenue par le gouvernement pro-BJP d’alors, visait à développer l’idée d’une explosion démographique des populations musulmanes et d’une expansion du terrorisme par les chrétiens des Etats du Nord-Est de l’Inde. Enfin, John Dayal a souligné que les conclusions du RSS étaient elles-mêmes contredites par les données officielles du gouvernement fédéral indien, publiées en 2001 dans une autre étude rédigée par le People of India Project. Cette étude mettait en évidence, d’une part, que la polygamie était plus fréquente chez certains groupes non musulmans que chez les groupes musulmans et que, d’autre part, le pourcentage de la population chrétienne avait tendance à diminuer, même dans les régions les plus pauvres et les plus rurales de l’Inde, du fait de la politique de restriction des naissances. “Le mythe d’une conspiration chrétienne qui serait fondée sur les conversions et l’augmentation démographique est un mensonge motivé par une volonté de calomnier une communauté entière a ajouté le président de l’AICU (1).

Le 19 novembre dernier, Sajan K. George, délégué du GCIC (Global Council of Indian Christians), a déclaré à l’agence SAR News : “Les propos de l’extrémiste hindou vis-à-vis des femmes indiennes sont une volonté délibérée de ‘talibaniser’ la société indienne (.). Ces remarques méprisantes envers les chrétiens du Nord-Est de l’Inde ont pour but d’inciter à la violence en semant la discorde.” Sajan K. George a demandé que le responsable du RSS présente des excuses et que le gouvernement fédéral tienne K. S. Sudarshan et ses homologues responsables des troubles causés dans le Nord-Est de l’Inde, du fait du sentiment d’aliénation et d’insulte ressentis par les minorités de la région.

Le RSS est considéré comme le noyau dur de la nébuleuse des mouvements de l’extrême droite hindoue. Ce mouvement nationaliste indien, créé en 1925 par le Dr. K. B. Hedgewar, qui admirait Benito Mussolini, se fonde sur les principes de (terme qui désigne à la fois le mouvement nationaliste hindou et la doctrine sociale et politique qui l’accompagne et qui vise à identifier l’hindouisme à la nation indienne) (2). Après l’assassinat du Mahatma Gandhi par Nathuram Godse, un ancien membre du RSS, l’organisation a été déclarée illégale en 1948, puis a de nouveau été autorisée l’année suivante. Par le biais de ses différentes ramifications, le RSS est présent à tous les niveaux de la société indienne. Ses principaux objectifs sont la propagation des valeurs de l’hindouisme et la lutte contre l’influence des autres religions, notamment l’islam (3) et le christianisme.