Eglises d'Asie

En dépit de l’opposition d’un Forum des religions sur l’environnement, le Parlement a ratifié un accord sur l’ouverture aux importations du marché national du riz

Publié le 18/03/2010




Le 23 novembre dernier, par 139 voix pour, 61 contre et 23 abstentions, l’Assemblée nationale a ratifié un accord signé l’an dernier par le gouvernement sur l’ouverture aux importations du marché national du riz. Le sujet est sensible dans un pays où les importations de riz sont actuellement plafonnées à 4 % de la consommation nationale et seront désormais autorisées à monter jusqu’à presque 8 % de ce marché (1). Quelques jours avant le vote du Parlement, un agriculteur de 38 ans s’était suicidé par absorption de pesticide. Maire d’une petite commune située à l’ouest de Pusan, Chung Yong-bum a laissé un message appelant à ce que « ceux qui travaillent dur soient plus respectés ». Quelques jours avant sa mort, le Forum des religions sur l’environnement avait tenu une conférence de presse pour appeler les parlementaires à ne pas ratifier l’ouverture du marché du riz aux importations, ainsi que pour demander au gouvernement de prendre des mesures afin de soutenir et stimuler l’agriculture sud-coréenne.

Fondé en 2001, le Forum des religions pour l’environnement réunit des bouddhistes, des catholiques, des protestants et des fidèles du bouddhisme Won. Dans le communiqué diffusé le 10 novembre dernier, intitulé : « Le riz, c’est la vie l’organisation interreligieuse a affirmé la conviction que l’agriculture est indispensable au développement harmonieux de la société coréenne. Selon elle, l’ouverture du marché du riz aux importations présente certes un caractère inévitable, mais le gouvernement doit « accepter les demandes des syndicats d’agriculteurs avant d’ouvrir le marché ».

Pour le Mouvement des agriculteurs catholiques coréens, le gouvernement doit mettre en place un plan visant à développer l’autosuffisance alimentaire du pays. L’organisation paysanne appelle ainsi à une révision des textes régissant les cantines scolaires et universitaires de façon à ce qu’une plus grande proportion de denrées alimentaires produites en Corée y soit utilisée. Elle demande aussi des mesures pour stabiliser les prix du marché du riz et pour garantir le revenu des agriculteurs. Selon elle, la crise que traverse actuellement l’agriculture sud-coréenne n’est pas conjoncturelle ; « c’est une crise environnementale et une crise qui engage notre avenir expliquent ses dirigeants, qui proposent le développement d’un modèle selon lequel les habitants des villes, qui consomment les produits agricoles, feraient preuve de solidarité avec les habitants du monde rural, qui les produisent ; les communautés rurales produiraient des denrées issues d’une agriculture organique, préservant l’environnement des excès de la mécanisation et de l’usage intensif de produits phytosanitaires, qui seraient distribuées dans les villes par le biais notamment des paroisses. Pour le syndicat catholique, l’Organisation mondiale du commerce ne peut pas menacer, au nom de l’ouverture des marchés agricoles aux importations, la survie des communautés rurales qui, partout dans le monde, présentent un caractère spécifique.

Selon le P. Paul Cho Dae-hyun, co-président du Forum des religions pour l’environnement, « la riziculture représente plus de la moitié de l’agriculture sud-coréenne. Si nous abandonnons la culture du riz, ce qui fait la base et les racines de l’agriculture dans ce pays va mourir ». Ce qu’il faut, souligne ce prêtre qui préside par ailleurs le comité pour les questions environnementales de l’archidiocèse de Séoul, c’est redonner aux agriculteurs une perspective leur permettant d’espérer. « Avant d’ouvrir le marché, nous devons être certains que tant les communautés rurales que les communautés urbaines partagent une même espérance pour l’avenir ».

Pour Baeg Nam-saek, délégué d’une organisation bouddhiste militant pour le développement de l’agriculture organique, la mondialisation et les forces qu’elle met en ouvre ne peuvent être ignorées. Cependant, « nous ne sommes pas prêts à faire face à ces forces et nous avons besoin d’une politique permettant de soutenir les agriculteurs ainsi que la société rurale affirme-t-il, soulignant que, dans les campagnes comme dans les villes, « à travers une coopération entre les églises et les pagodes, nous pouvons assurer le développement d’une agriculture durable et organique ».