Eglises d'Asie

L’Eglise catholique invite les fidèles à un “nouveau style de vivre ensemble” afin de pallier au manque de civilité qui serait à l’origine de bien des maux dont souffre le pays

Publié le 18/03/2010




La “Grande assemblée de l’Eglise catholique d’Indonésie” a lancé un appel à l’ensemble des croyants en faveur d’un “nouveau style de ‘vivre ensemble’ » afin de promouvoir une véritable civilité entre les citoyens, en s’appuyant sur les communautés ecclésiales de base (BEC) et les responsables des mouvements de jeunesse. C’est ce qui ressort de la motion finale de la “Sidang Agung Gereja Katolik Indonesia” (SAGKI, Grande assemblée de l’Eglise catholique d’Indonésie) qui s’est tenue à Caringin, du 16 au 20 novembre dernier. 343 délégués, 232 hommes et 111 femmes, ont participé à cette assemblée dont le thème était : “Se lever et bouger : l’Eglise construit un nouveau style de ‘vivre ensemble’ pour la nation”. Parmi les délégués se trouvaient 96 prêtres et religieuses, 36 évêques venus des 36 diocèses que compte le pays et 79 jeunes tout juste arrivés de la Rencontre nationale de la jeunesse catholique d’Indonésie qui s’était tenue du 12 au 16 novembre dernier.

Francisia Seda, présidente du comité organisateur de la SAGKI, a lu la motion finale au cours de la cérémonie de clôture. Soulignant que cinq ans plus tôt, la SAGKI 2000 avait désigné les BEC “comme un nouveau point de départ dans la vie de l’Eglise les délégués ont demandé que l’Eglise “soutienne pleinement et concrètement les BEC”. Plaidant pour “un mouvement” capable de promouvoir une véritable civilité entre tous les citoyens, l’assemblée a demandé à la Conférence épiscopale, aux diocèses et aux paroisses d’inscrire dans leurs programmes le soutien à ce mouvement. La SAGKI ayant pris connaissance que l’assemblée des jeunes catholiques avait, de son côté, décidé de soutenir le mouvement pour une civilité nationale nouvelle, a ajouté, dans son discours de clôture, que “la SAGKI 2005 continue à aller de l’avant en appelant tous les membres de l’Eglise à se lever et à bouger… L’Eglise ne peut rester à l’écart de la terrible réalité d’un monde dur et discourtois. Elle ne peut pas attendre que le monde devienne civilisé, mais doit réaliser qu’elle est envoyée dans le monde pour y travailler et y faire naître une société policée”.

L’assemblée de la SAGKI a également demandé aux membres de l’Eglise catholique de prendre conscience de la responsabilité, directe ou indirecte, qu’ils ont dans le manque de civilité, que ce soit au niveau de l’Etat, dans la communauté des citoyens ou dans le monde économique. Elle a également invité ses membres au repentir. “L’Eglise est encore habitée par d’anciens comportements éloignés des enseignements du Seigneur peut-on lire dans cette motion finale. C’est un appel pour que l’Eglise adopte un nouveau style de comportements afin de mieux participer aux activités constructives de la société et redonner espoir dans la lutte que mènent les hommes pour une véritable liberté.

La motion finale donne également la liste de dix-sept problèmes qui lui semblent les plus importants et en fait ses priorités. L’assemblée recommande notamment de conserver le Pancasila comme idéal national (les cinq principes de la nation indonésienne, à savoir la foi en un Etre suprême, l’unité indonésienne, la justice sociale pour tous, une humanité juste et civilisée ainsi qu’une démocratie conduite par la sagesse issue des délibérations de ses représentants) et, comme premier point à retenir face à la désintégration nationale (1), de promouvoir l’éducation et d’améliorer le système juridique afin de lutter contre la corruption.

Les délégués ont tous été d’accord pour développer les habitudes d’épargne afin de réduire la pauvreté, de promouvoir l’éducation pour tous afin de limiter le chômage. Parmi les différents autres objectifs proposés par l’assemblée pour contrer les maux qui touchent la société indonésienne, on trouve également les moyens suivants : stimuler l’exigence morale, susciter des mesures justes et équitables dans le domaine du droit du travail, soutenir les agriculteurs, utiliser le savoir-faire des aborigènes, améliorer les ressources humaines à travers l’éducation formelle, accompagner les familles en fournissant une éducation informelle à leurs enfants, développer la formation technique du personnel de santé et susciter une prise de conscience de la différence des sexes. “Tous ces points devraient être considérés comme autant d’objectifs capables d’incarner un nouveau style de comportement fondé sur les valeurs chrétiennes. Soucieux d’atteindre ces objectifs, nous pourrons élaborer de nouvelles actions capables de construire une nouvelle civilité nationale peut-on lire dans le texte final.

Le cardinal Julius Darmaatmadja, archevêque de Djakarta et président de la Conférence épiscopale, a rencontré, à l’issue de la cérémonie de clôture, les journalistes pour une conférence de presse. “Quoique les catholiques ne représentent qu’une petite partie de la nation, nous voulons travailler ensemble avec les autres croyants a-t-il affirmé. C’est ainsi que les responsables bouddhistes, hindous, musulmans et protestants avaient été invités à cette cérémonie de clôture (2).

Emilia Yenni Loboran, de l’archidiocèse de Macassar, qui a participé à la SAGKI 2005 et au grand rassemblement de la Jeunesse catholique, a souligné devant la presse que les recommandations des jeunes n’apparaissaient pas dans la motion finale. En outre, “les recommandations proposées par la SAGKI 2005 ne sont pas assez détaillées a estimé la jeune femme, qui travaille pour les enfants des rues. Elle affirme que “l’Eglise doit absolument définir des actions concrètes”.

Quant à Emmanuel Tular, responsable de l’Union des étudiants catholiques de la République indonésienne, il s’interroge : “Comment le développement de l épargne peut-il être considéré comme un objectif contre la pauvreté lorsqu’on sait que les pauvres n’ont pas d’argent à économiser ?” Il dit aussi regretter que l’assemblée n’ait pas clairement pris position sur le controversé décret de 1969 relatif à la construction des lieux de culte, ou sur les violences qui touchent la région de Poso (Célèbes-Centre). Lisa Ariyanto, une artiste catholique, se dit, quant à elle, favorable à l’invitation faite aux catholiques de “se lever et bouger en précisant toutefois qu’elle “espère que l’Eglise va développer une véritable action sociale et une vraie solidarité en faveur des pauvres”.