Eglises d'Asie

Un pasteur protestant en visite au Vietnam pour les fêtes de fin d’année est refoulé vers son pays d’exil

Publié le 18/03/2010




Selon des informations recueillies par Radio Free Asia (1), le pasteur Trân Dinh Ai, une figure historique parmi les animateurs des Eglises domestiques à Hô Chi Minh-Ville, exilé de force en Amérique depuis plusieurs années, vient d’être refoulé vers les Etats-Unis alors qu’il venait de débarquer de l’avion à l’aérodrome de Tân Son Nhât, pour séjourner quelques jours dans son pays natal à l’occasion des fêtes de fin d’année. Le pasteur était pourtant en possession d’un passeport vietnamien signé de l’ambassade du Vietnam à Washington, valable jusqu’en 2007. La police, qui l’a isolé, le 27 décembre, dans des locaux de l’aérogare, s’est contentée de lui signifier que cette mesure était prise pour des raisons de sécurité. La même mésaventure lui était advenue deux ans plus tôt, en janvier 2004, date à laquelle il était venu pour les mêmes raisons dans son pays natal et avait été renvoyé vers les Etats-Unis, à peine avait-il mis le pied hors de l’avion.

Le pasteur Trân Dinh Ai avait quitté le Vietnam avec sa famille pour les Etats-Unis au cours du mois de décembre 1999 pour les Etats-Unis, condition donnée à sa libération de prison. Il devait accomplir un ministère pastoral en Virginie dans le cadre du mouvement des “Assemblées de Dieu ministère qui, selon une source, devait durer trois ou quatre ans. On a appris par ailleurs qu’il n’avait pas sollicité le droit d’asile.

Depuis le changement de régime de 1975, les rapports du pasteur et des nouvelles autorités révolutionnaires ont toujours été particulièrement difficiles. Ses démêlées avec la police sont surtout dues à son engagement au service des Eglises domestiques de Hô Chi Minh-Ville et à ses contacts avec les Eglises pentecôtistes à l’étranger, qui lui avaient valu une première arrestation, dès le 27 février 1991. Condamné à une peine de trois ans de camp par mesure administrative et sans procès, il avait été libéré le 6 avril 1993 (2).

En octobre 1998, le pasteur avait spécialement irrité la gouvernement lorsque, seul parmi les personnalités religieuses non liées au gouvernement, il avait rencontré le rapporteur spécial des Nations Unies sur l’intolérance, Abdelfattah Amor, dont le rapport avait durement critiqué la politique religieuse en vigueur au Vietnam (3).

On avait de nouveau mentionné son nom, lors de son arrestation par la police de Hanoi, avec une vingtaine d’autres personnes, le 7 mai 1999, lors d’une session biblique tenue dans un hôtel de la capitale (4). Il avait été libéré le 4 juin suivant, après avoir payé une amende d’un million de dôngs (72 dollars) et la facture de ses frais de séjour forcé à l’hôtel. On avait rapporté que le pasteur s’était renseigné alors sur ses possibilités de trouver un asile dans un pays étranger et que certains diplomates étrangers en poste à Hanoi auraient pris bonne note de cette demande.

Le mouvement des Eglises domestiques au Vietnam a été longtemps réprimé, les autorités vietnamiennes attachant une grande importance au caractère public, connu et contrôlable du lieu de culte. Tous les anciens décrets sur les activités religieuses lient le culte religieux à des lieux publics, enregistrés par l’Etat, dont le programme d’activités ordinaires doit être soumis chaque année aux autorités. Le décret 26/1999/ND-CP, à l’article 7, alinéa 1, précisait que, dans le domicile familial, il est seulement possible d’offrir les traditionnelles offrandes aux ancêtres et de réciter des prières familiales. Ce n’est que récemment, sous la pression extérieure, en particulier des Etats-Unis et de certaines organisations internationales de défense des droits de l’homme, que la situation a commencé à changer. L’Ordonnance sur la croyance et la religion, entrée en vigueur en novembre 2004, et les directives du Premier Ministre du mois de mars 2005, à l’intention des protestants, créaient des conditions plus favorables à l’enregistrement des Eglises domestiques. Cependant, dans la pratique, les conditions d’existence des communautés religieuses non reconnues restent toujours extrêmement difficiles (5).