Eglises d'Asie

Maharashtra : des mémoriaux en hommage aux enfants victimes d’avortement ont été érigés dans différentes paroisses de l’archidiocèse de Bombay

Publié le 18/03/2010




L’archidiocèse de Bombay (Mumbai) a érigé plusieurs mémoriaux en hommage aux enfants victimes d’avortement, afin de sensibiliser l’opinion publique. Selon Jeannette Pinto, responsable du Comité diocésain pour la vie, quatre paroisses ont déjà érigé un mémorial et deux autres inaugureront le leur prochainement.

Cette proposition, à l’initiative du cardinal Ivan Dias, archevêque de Bombay, a été faite à toutes les paroisses catholiques de l’archidiocèse, en février 2000, afin de rappeler aux fidèles le caractère sacré de toute vie humaine dès le moment de la conception, et de les aider à prier pour les enfants avortés, leurs parents et toutes les personnes impliquées. Selon Jeannette Pinto, interviewée le 18 janvier dernier par l’agence Ucanews, l’archidiocèse espère que les 118 paroisses du diocèse auront chacune leur mémorial, même si le plus difficile est de trouver des fonds et un espace adéquat pour sa construction. En 2001, à Bandra, la paroisse Saint-André, qui se situe dans une banlieue majoritairement catholique, a été la première à ériger un mémorial en hommage aux victimes de l’avortement. Celui-ci ressemble à une tombe, aujourd’hui ombragée par quelques arbres.

Ce type de mémorial ne fait pourtant pas l’unanimité. Selon Flavia Agnes, avocate, ces mémoriaux rappellent aux femmes les limites de leurs droits à disposer de leur vie personnelle et de leur corps. “Tuer un fotus est sans conteste un péché, mais les femmes sont celles qui souffrent le plus des grossesses non désirées. En construisant des mémoriaux, la responsabilité est reportée essentiellement sur la femme, alors qu’elle n’est responsable qu’en partie, voire, parfois, complètement innocente ajoute-t-elle. Une autre femme estime que “si le mémorial est un moyen de se souvenir des violences commises contre les enfants avant leur naissance, il conviendrait également d’avoir des mémoriaux rappelant les violences faites aux femmes, telles les violences induites par les dots”.

Pour Jeannette Pinto, l’opposition aux mémoriaux érigés en hommage aux enfants avortés est sans fondement : “Tout le monde parle de ses propres droits, mais qui prêtera sa voix pour défendre le droit des enfants qui ne sont pas nés ? Le mémorial est là pour nous rappeler que personne n’a le droit de tuer qui que ce soit, pas même l’enfant qui n’est pas encore né.”

En 1971, le gouvernement fédéral indien a libéralisé la loi sur l’avortement, en autorisant les femmes à subir une interruption volontaire de grossesse si cette dernière mettait en danger la vie de la mère ou si la grossesse résultait d’un viol. Depuis 1994, il est interdit de faire des examens prénataux pour connaître le sexe de l’enfant à naître et de pratiquer un avortement sur ce seul critère. Toutefois, cette loi est souvent ignorée lorsque l’enfant s’avère être une petite fille. Avoir une fille en Inde est en effet vécue comme un fardeau, car il faut l’éduquer, lui constituer une dot, alors qu’elle n’est pas destinée à rester dans la famille. Un vieux dicton indien résume cette situation : “Elever une fille, c’est comme arroser le jardin du voisin.”

Début janvier 2006, la revue médicale The Lancet a publié une étude sur le déficit des naissances de filles en Inde, suite à un recensement mené en 1998 sur 1,1 million de ménages. Ainsi, durant les vingt dernières années, dix millions de fotus féminins auraient été victimes d’avortement, entraînant une pénurie d’épouses dans certains Etats indiens (1). L’Inde ne détient pas le monopole des avortements de fotus féminins : si on ajoute la Chine populaire, l’Afghanistan, le Pakistan et la Corée du Sud, confrontés à un phénomène semblable, le chiffre s’élève alors à cent millions dans le monde. Shirish S. Sheth, auteur de l’étude, rappelle qu’en 1986, les sociétés d’obstétrique et de gynécologie d’Inde avaient déclaré “le foeticide” féminin “crime contre l’humanité