Eglises d'Asie

Les évêques catholiques appellent à la prière et au respect des droits civils après que la présidente ait déclaré l’état d’urgence suite, semble-t-il, à une nouvelle tentative de coup d’Etat

Publié le 18/03/2010




Les évêques catholiques ont appelé les Philippins à la sobriété, à la prière et au respect des droits civils, alors que la présidente déclarait l’état d’urgence le 24 février dernier, après ce qui a été présenté par le pouvoir comme une nouvelle tentative de “kudeta” (coup d’Etat) déjouée par l’armée, qui visait à renverser la présidente Arroyo, vingt ans après la chute du dictateur Ferdinand Marcos.

L’état d’urgence a été décrété pendant que les évêques philippins, rassemblés à la cathédrale de Manille, célébraient une messe en l’honneur du nonce apostolique, qui quitte le pays. Après la célébra-tion eucharistique, Mgr Gaudencio Rosales, nouvellement créé cardinal par le pape Benoît XVI, s’est exprimé au nom de l’Eglise catholique en ces termes : “Nous sommes aujourd’hui dans une situation délicate. Avant toute chose, prions pour calmer les émotions et pour que l’humilité prévale.” L’archevêque de Manille a également souligné que l’état d’urgence avait “été déclaré parce qu’il y a un danger effectif et parce que les différentes forces en présence pourraient user de l’arme de la violence”. Il a également exhorté les opposants au gouvernement d’Arroyo de “parler directement avec les personnes concernées rappelant que la non-violence avait été “le maître mot d’EDSA 

Le 25 février 1986, un soulèvement pacifique le long de De los Santos Avenue (EDSA) à Manille avait en effet mis fin au régime de la loi martiale instaurée par Ferdinand Marcos pendant quatorze ans. Gloria Macapal Arroyo, parvenue au pouvoir en 2001 à la faveur d’une révolte populaire EDSA 2 contre le président de l’époque, Joseph Estrada, ancien acteur de cinéma accusé de corruption et de détournement de fonds, a déjà survécu à plusieurs complots d’assassinats, à la démission de plusieurs ministres, ainsi qu’à une tentative de destitution en septembre dernier.

Pour le vingtième anniversaire d’EDSA, qui s’est déroulé du 22 au 25 février dernier, le gouvernement et des groupes d’opposants à l’actuelle présidente avaient prévu séparément différentes manifestations, dont certaines ont conduit à des accrochages violents entre manifestants et policiers, ainsi que plusieurs mises en détention provisoire. Le 24 février dernier, le chef de la police de Manille a annoncé qu’aucune manifestation ne serait autorisée le 25 février pour “éviter toute atteinte à la paix Malgré cela, des rassemblements, notamment autour de la personne de l’ancienne présidente Corazon Aquino, ont eu lieu. Le lendemain, Gloria Arroyo a annoncé l’arrestation de plusieurs hauts gradés de l’armée et de la police. Des membres de l’opposition ont également été interpellés – dont quatre membres de la Chambre des représentants, accusés de complot visant à renverser la présidente. L’opposition a comparé l’état d’urgence à une situation de quasi-loi martiale, de funeste mémoire et renvoyant à la période de la dictature Marcos.

Selon le P. Joaquin Bernas, jésuite et avocat, la déclaration d’état d’urgence ne donne pas à la présidente plus de pouvoir qu’auparavant, car la Constitution préserve les droits civils des personnes, y compris le droit de réunion. Mgr Antonio Ledesma, évêque d’Ipil, a, pour sa part, trouvé “regrettable” que les manifestations aient été dispersées par la police car elles étaient “pacifiques Selon lui, ces manifestations “devraient être autorisées car c’est le seul moyen dont dispose le peuple pour exprimer son désaccord d’une manière non violente”. L’évêque d’Ipil a rappelé que “les précédents coups d’Etat avaient été suivis par des problèmes économiques et que le conseil permanent de la Conférence épiscopale allait se réunir prochainement pour aborder le sujet de l’état d’urgence décrété dans le pays. Les évêques entendent “poursuivre la voie de la vérité, en faisant tout leur possible pour rétablir l’ordre moral dans la vie publique, tout en demeurant dans un processus constitutionnel a-t-il ajouté, en faisant écho à ce qui avait déjà été annoncé par la Conférence épiscopale lors de la dernière assemblée plénière, le 29 janvier dernier (1).