Eglises d'Asie

Par décision du Premier ministre, les bâtiments d’un ancien centre pour étudiants à Hô Chi Minh-Ville sont restitués à la Compagnie de Jésus au Vietnam

Publié le 18/03/2010




Au cours de l’année dernière, le gouvernement vietnamien avait restitué au diocèse de Hô Chi Minh-Ville l’ancien petit séminaire qui, depuis, a été transformé en “Maison de la culture de la tradition et de la foi” (1). On vient d’annoncer le prochain retour à leurs anciens propriétaires d’un autre établissement qui, pour les catholiques et intellectuels de Saigon, revêt une très haute valeur symbolique. Le P. Thomas Vu Quang Trung, actuel supérieur de la Compagnie de Jésus au Vietnam, vient en effet d’annoncer, dans une lettre rédigée récemment (2), que le Premier ministre avait officiellement pris la décision de demander à l’organisme utilisant actuellement les locaux de restituer à la Compagnie de Jésus les bâtiments de l’ancienne bibliothèque du Centre Alexandre de Rhodes. Selon la lettre, le chef du gouvernement a même précisé que cette restitution devait être achevée avant le 30 juin prochain, date du cinquantième anniversaire du retour des jésuites au Vietnam.

On a appris que déjà le supérieur provincial de la Compagnie, accompagné de quelques confrères, avait rencontré des représentants de la Télévision vietnamienne, actuel utilisateur des locaux. Ils ont préparé ensemble le retour des anciens occupants, conformément aux directives du chef du gouvernement. A cette occasion, le P. Nguyên Công Doan, qui a longtemps été supérieur de la communauté jésuite au Vietnam, a rappelé l’historique de cet établissement situé au n° 175 de la rue Ypen Dô. C’est en mai 1957 que le P. Ferdinand Lacretelle avait reçu la clé de cet immeuble qui constitue en quelque sorte le tremplin du nouveau départ des jésuites en ce pays.

Le retour au giron de l’Eglise de cet établissement ravive dans l’esprit de beaucoup de catholiques un certain nombre de souvenirs, tristes et joyeux, qui lui sont liés. Dans les années 1960 et au début des années 1970, le Centre Alexandre de Rhodes, qui s’était donné le nom d’un des premiers religieux de la Compagnie arrivés au Vietnam, était devenu le lieu de multiples activités au service des étudiants de la ville. Ceux-ci y venaient non seulement pour consulter la bibliothèque, mais aussi pour y suivre des cours de langue, participer à des cercles bibliques, à des cours d’introduction aux techniques télévisuelles et à bien d’autres activités.

Après le changement de régime, le Centre avait continué de fonctionner mais avait restreint ses activités. Au cours de l’année 1979, la communauté jésuite et le personnel du centre commencèrent à être soupçonnés d’opposition au régime. Ils ne tardèrent pas à être les victimes d’une brutale répression des autorités politiques de l’époque. Un groupe de treize personnes, jésuites, autres religieux et laïcs vietnamiens, fut arrêté à la fin de 1980 et au début de l’année 1981. Les inculpés furent jugés, le 30 juin 1983, par le tribunal populaire de Hô Chi Minh-Ville. Ils étaient tous accusés “de tentative de renversement du pouvoir légitime et de propagande contrerévolutionnaire”. Aucun des faits rapportés au procès, où avaient été invités des représentants de toutes les communautés catholiques de Hô Chi Minh-Ville, n’avait fourni le moindre commencement de preuve de cette accusation (3). Le P. Lê Thanh Quê, principal accusé de ce procès, à qui l’on reprochait surtout la rédaction et la diffusion d’un bulletin non déclaré, avait été condamné à quinze ans de prison. Il fut libéré en novembre 1991. Son confrère, le P. Nguyên Cong Doàn, provincial pour la région du Vietnam, condamné à une peine moins lourde, avait été libéré en février 1990.

Depuis cette époque, la communauté des jésuites au Vietnam s’est passablement développée et n’aura pas de mal à reprendre en charge les locaux de la bibliothèque du Centre Alexandre de Rhodes, actuellement assez détériorés. On se demande cependant dans quelle mesure les religieux pourront reprendre leurs anciennes activités au sein du milieu étudiant.