Eglises d'Asie

Une requête pour l’obtention de la liberté d’information rédigée par des prêtres catholiques est soumise à la signature des citoyens vietnamiens

Publié le 18/03/2010




Quatre prêtres catholiques bien connus (1) viennent de mettre en circulation une requête réclamant l’obtention de la liberté d’information et d’expression pour les citoyens vietnamiens. La lettre, qui a été diffusée le 23 février dernier, avait dans les derniers jours du mois de février déjà recueilli un certain nombre de signatures, celles de seize prêtres, en majorité du diocèse de Huê, d’un pasteur protestant, de plusieurs intellectuels de l’opposition, dont trois ont été membres du Parti communiste, et de nombreux citoyens des provinces du centre du Vietnam.

La requête proposée à la signature des citoyens vietnamiens s’appuie sur un certain nombre de textes fondamentaux, dont l’article 69 de la Constitution de 1992. Celui-ci stipule : “Les citoyens vietnamiens bénéficient de la liberté d’expression, de la liberté de presse, du droit d’être informés, du droit de se rassembler, de fonder des associations, de manifester conformément aux prescriptions de la loi.” Les auteurs de la lettre associent à ce texte de larges extraits des traités et accords internationaux, ainsi que des directives issues des documents du Concile Vatican II.

Les rédacteurs du texte constatent ensuite que les autorités vietnamiennes ont utilisé la restriction contenue dans la Constitution “selon les prescriptions de la loi” pour refuser tout ce que promet l’article 69 : “Les détenteurs du pouvoir communiste, affirment-ils, ont le monopole de la rédaction et du choix de l’information, orientent et contrôlent les nouvelles, mettent la vie littéraire sous surveillance et sont les uniques possesseurs de mass media du pays.” Après avoir étayé leur affirmation par de nombreux faits, l’absence d’organes de presse, de mass media, de maisons d’éditions bénéficiant d’une relative autonomie par rapport au pouvoir, le contrôle du réseau Internet, les écoutes et la surveillance des communications téléphoniques des opposants, les auteurs de la requête proposent à la signature des citoyens vietnamiens plusieurs réformes et changements à réaliser d’urgence. Le gouvernement vietnamien doit s’engager à respecter les accords internationaux en ce domaine. Il libèrera les prisonniers arrêtés pour détention de documents dits subversifs (2), restaurera le libre accès à tous les sites Internet et la libre circulation des nouvelles sur ce réseau. Les autorités n’utiliseront plus la terreur. Par ailleurs, la lettre s’adresse aux dirigeants religieux, aux membres de l’élite intellectuelle pour qu’ils mettent en pratique leur droit à l’information et à l’expression et proclament enfin la vérité sans crainte. La lettre fait enfin appel aux organisations internationales et à la diaspora vietnamienne dans le monde pour qu’ils collaborent à la renaissance de la liberté d’information dans le pays.

Dans un rapport publié l’année dernière, l’organisation Reporters sans frontières a classé le Vietnam parmi les quinze pays où le droit à la liberté d’information est le moins respecté. Les tentatives de mettre en ouvre un organe de presse ou de diffusion indépendant se sont jusqu’à présent soldées par un échec. En l’an 2000, le journaliste Nguyên Vu Bing avait présenté une demande aux autorités en vue de fonder un parti, le Parti de la liberté démocratique. La demande fut refusée et son auteur arrêté et condamné, en décembre 2003, à sept ans de prison. Ce problème de la liberté d’information a été abordé en particulier par le cardinal Crescenzio Sepe, préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, lors de sa visite au Vietnam en novembre et décembre dernier (3). Il avait fait allusion à l’histoire de la revue catholique Hiêp Thông, une histoire parsemée de péripéties malheureuses. L’Etat lui avait, en effet, donné son accord en 1996. L’autorisation émanait du Premier ministre. Mais cette approbation de principe n’a jamais reçu de confirmation concrète. A chacune des interventions du Bureau des Affaires religieuses sur ce sujet, lors des réunions annuelles des évêques, des raisons variées ont été trouvées pour retarder cette parution : absence de personnel formé et diplômé, carence de la loi en matière d’éditions, etc. Cependant, malgré cette absence d’autorisation écrite délivrée par les autorités, le bulletin était quand même publié et diffusé de manière confidentielle, ce qui faisait croire à une autorisation tacite. Cependant, lors de la réunion annuelle de la Conférence épiscopale de l’année 2000, le directeur du Bureau des Affaires religieuses avait suggéré à ses auditeurs de mettre un terme à l’existence du bulletin, affirmant que sa publication et sa diffusion étaient actuellement illégales. Quelques autres numéros ont encore paru, mais voilà longtemps que la parution a cessé.