Eglises d'Asie

Le quotidien du Parti communiste vietnamien rend un vibrant hommage à une religieuse catholique qui a consacré sa vie aux lépreux

Publié le 18/03/2010




Une fois n’est pas coutume, l’organe du Parti communiste vietnamien, le Nhân Dân du 28 février a consacré son plus gros titre à une religieuse catholique : “L’histoire émouvante d’une religieuse qui vient de recevoir le titre d’héroïne du travail Le quotidien de Hanoi consacre un long article à la sour Mai Thi Mâu qui a consacré sa vie aux soins des lépreux à la léproserie de Di Linh, située à une cinquantaine de kilomètres de Dalat. Un tel reportage n’avait encore jamais été publié dans les colonnes de l’organe du Parti. Celui-ci a souvent fait l’éloge de militaires ayant fait le sacrifice de leurs vies pour la patrie, de travailleurs ayant battu des records d’endurance au service de la production. Jamais encore, il n’avait vanté les mérites d’une personne animée par la charité, et surtout d’une religieuse.

La léproserie où travaille la sour est située précisément à 4 km. de Di Linh, dans la province de Lâm Dông. Elle a été fondée par Mgr Jean Cassaigne, des Missions Etrangères de Paris, en 1928, alors qu’il était encore curé de Di Linh. Il fut ensuite nommé évêque de Saigon où il resta quatorze ans et revint finir sa vie dans cet établissement, lorsqu’il s’aperçut qu’il était lui-même atteint de la lèpre. Il confia le soin de la léproserie aux sours de Saint Vincent de Paul. Après le changement de régime de 1975, le nouveau pouvoir se chargea lui-même de la gestion des établissements caritatifs. Cependant, après un court laps de temps, ce type d’établissement s’occupant des lépreux fut remis à la charge des religieuses.

En 1968, Sour Mai Thi Mâu, qui a aujourd’hui les honneurs du Nhân Dân et était alors une jeune infirmière âgée de 27 ans, fut envoyée par sa congrégation au service des lépreux de Di Linh, qu’elle n’a plus quitté depuis. Le Nhân Dân présente ainsi sa vie dans l’article qui lui est consacré : “La sour Mai Thi Mâu (.) a lié sa vie à celle des lépreux. Pendant vingt-deux ans, elle a été leur infirmière, s’occupant d’eux sans répit, jour et nuit. Pendant quatorze ans, elle a été vice-directrice de la léproserie, puis directrice, sans que cette responsabilité ne l’empêche de dispenser personnellement des soins aux malades. Actuellement, bien qu’elle ait atteint l’âge de la retraite (65 ans), elle n’en continue pas moins de contribuer aux soins des malades. Les lépreux, en grande partie appartenant à la minorité ethnique K’ho, l’appellent affectueusement maman ou encore grand-mère, avec affection et respect.”

Après avoir rapporté un certain nombre de détails de la vie de la religieuse, le journal du Parti recueille certaines de ses confidences, en particulier les sentiments éprouvées par la religieuse à l’égard de ses malades : “La religieuse s’est confiée à nous : ‘Au cours des dizaines d’années passées ici, j’ai très rarement vu les familles venir rendre visite aux malades et les assister. Il semble que les parents, dès le moment où ils ont amené les lépreux dans cette maison, les abandonnent à leur sort. Un certain nombre de nos pensionnaires sortent guéris de la lèpre. Même alors, à leur retour au village et pendant des dizaines d’années, ils sont tenus à l’écart par leurs voisins si bien que, parfois, ils sont obligés de revenir à la léproserie’. La religieuse appelait alors à une conversion des esprits qui facilite l’intégration des anciens lépreux dans la société”.

La conclusion du Nhân Dân contient un vibrant hommage aux religieuses accomplissant des tâches équivalentes à celle qui a valu à Sour Mâu la médaille d’héroïne du travail : (L’ouvre accomplie à la léproserie) n’a pu avoir lieu que grâce à la contribution des religieuses au cours charitables, à la volonté inébranlable, ayant le courage de penser et d’agir à l’exemple de Sour Mai Thi Mâu. La distinction d’héroïne du travail qui est décernée à celle-ci est la marque de la reconnaissance que la communauté des lépreux éprouve pour elles.”