Eglises d'Asie

L’évêque catholique d’Atambua au Timor occidental demande au gouvernement de résoudre définitivement le problème des réfugiés du Timor-Oriental

Publié le 18/03/2010




Mgr Anton Pain Ratu, évêque du diocèse catholique d’Atambua qui borde la frontière du Timor Leste (Timor-Oriental) a lancé un appel au président de la République, afin que des mesures soient prises rapidement pour résoudre le problème des Est-Timorais réfugiés depuis plus de cinq ans en Indonésie. Il s’est entretenu avec le président indonésien Susilo Bambang Yudhoyono par le biais d’une téléconférence, le 24 février dernier. Il lui a demandé que les Est-Timorais venus chercher refuge au Timor occidental en 1999 soient déplacés hors de la province ou rapatriés. Le nombre de ces “nouveaux citoyens” est trop important pour les districts frontaliers de Belu et du Timor centre-nord (TTU, acronyme indonésien), où vivent déjà 450 000 personnes. “Il n’y a pas assez de terres agricoles, pour la culture comme pour l’élevage a expliqué l’évêque, qui a demandé au président “son aide pour régler définitivement ce problème en accélérant l’émigration ou le rapatriement des anciens réfugiés est-timorais” (1

La téléconférence avec le président avait été organisée dans le cadre d’un programme visant à mettre en contact le président avec les responsables de l’administration des régions les plus périphériques de l’archipel. Outre le Timor occidental (East Nusa Tenggara), la province la plus méridionale du pays, figuraient des représentants des provinces d’Aceh, le territoire le plus occidental, des îles Miangas, de la province de Célèbes-Nord, et du district de Merauke, dans la partie orientale de la Papouasie occidentale.

Mgr Anton Pain Ratu est intervenu dans cet échange par vidéo interposée au titre de président du “Forum de coopération des responsables religieux de Belu et de Timor centre-nord”. La population de ces deux districts est catholique à 95 %. Le prélat, surnommé aussi “l’évêque des réfugiés a exprimé son espoir de voir le Timor-Oriental permettre le rapatriement des réfugiés en accordant l’amnistie aux Est-Timorais déclarés coupables de violation des droits de l’homme dans cette ancienne province indonésienne. Il s’est aussi déclaré conscient du fait que “l’une et l’autre de [ses] propositions, transmigration et rapatriement, n’[étaient] pas faciles à mettre en ouvre 

Répondant à l’évêque, le président Susilo Bambang Yudhoyono a rappelé les plans du gouvernement, définis à l’époque où il était ministre coordinateur pour les Affaires politiques et de Sécurité, du temps de la présidence Megawati Sukarnoputri. Le gouvernement souhaitait alors agir dans trois directions : permettre l’installation d’une partie des réfugiés à l’intérieur de la province du Timor occidental, transmigration d’une autre partie des réfugiés dans d’autres provinces du pays et, enfin, rapatriement d’une troisième partie des réfugiés au Timor-Oriental. “Avec ces programmes, nous espérions pouvoir résoudre rapidement ces problèmes humanitaires. Mais, en réalité, il nous faut admettre que nous n’avons pas été capables de les régler complètement. Nous avons encore une longue route devant nous à parcourir a expliqué le président.

Au plus fort des événements ayant abouti au retrait de l’Indonésie du Timor-Oriental, après le référendum d’août 1999, le nombre des réfugiés est-timorais au Timor occidental a été estimé à 250 000. La plupart des réfugiés sont ensuite rentrés chez eux, mais 24 544 familles, soit 104 436 personnes, demeurent au Timor occidental. Fin 2002, ils ont perdu le statut de réfugiés en devenant automatiquement citoyens indonésiens et certains d’entre eux ont été transférés dans d’autres régions du pays, à Sumatra et au Kalimantan notamment. La plupart toutefois vivent encore dans des camps “provisoires installés le long de la frontière entre les deux Timor.

Plusieurs personnes présentes à la fin de cette téléconférence se sont exprimées au sujet de cette situation. Wilibrodus Joseph Nahak, un laïc catholique de Belu, a indiqué qu’il soutenait les suggestions de l’évêque, le décrivant comme quelqu’un qui comprend ce que ressentent les personnes déplacées. “L’amnistie est quelque chose d’important pour résoudre le problème des vieux réfugiés a-t-il affirmé, tout en ajoutant qu’il est peu probable que les autorités est-timoraises amnistient ceux qui ont été reconnus coupable de violation grave des droits de l’homme. Des centaines de personnes sont mortes des violences consécutives au référendum, imputées aux milices est-timoraises et pro-indonésiennes, soutenues par certains éléments de l’armée indonésienne.

Pour Fransico Xavier Soares, un réfugié est-timorais, “accorder l’amnistie est important et représente la solution la meilleure, mais le gouvernement du Timor-Oriental ne l’acceptera pas”. Selon lui, la majorité des Est-Timorais qui vivent aujourd’hui au Timor occidental appartiennent à des familles qui ont été engagées dans les combats de la guerre civile de 1975, qui ont combattu pour l’intégration du Timor-Oriental à l’Indonésie et qui se sont opposés à l’indépendance en 1999. “Si le Timor-Oriental n’accorde pas l’amnistie, le problème de ces anciens réfugiés demeurera et les habitants du Timor-Oriental continueront de vivre dans la crainte d’être attaqués (par ceux qui ont appartenu aux milices pro indonésiennes) a-t-il expliqué.

Le maire adjoint du district de Belu, Gregorius Mau Bili Fernandez, a indiqué de son côté que le gouvernement du Timor-Oriental avait stoppé il y a deux ans les opérations de rapatriement et ne permettait plus aux anciens réfugiés de venir rencontrer les membres de leurs familles dans les régions frontalières. Par ailleurs, a-t-il reconnu, très peu de ces réfugiés ont accepté les programmes de transmigration, “la cause principale étant qu’ils veulent toujours vivre proches de leur pays et espèrent qu’un jour, ils pourront retourner chez eux”.

Pour Dominggus Alves, ancien réfugié installé dans une zone de réinstallation à Belu, les choses se trouvent bien ainsi. “Je suis très heureux que le gouvernement indonésien ait fourni des matériaux pour bâtir nos maisons dans ces zones de réinstallation. Avoir une maison à nous nous aide à mieux nous appliquer à gagner notre vie et à survivre a-t-il expliqué.