Eglises d'Asie

Les autorités civiles ont expulsé de leurs pagodes religieux et religieuses bouddhistes qui refusent obédience à l’Eglise patronnée par le gouvernement

Publié le 18/03/2010




Pour empêcher le bouddhisme unifié de créer et d’étendre ses propres structures administratives dans les provinces du sud du Vietnam, les autorités civiles, en collaboration avec l’Eglise bouddhiste patronnée par le Front patriotique, ont aujourd’hui recours à des sanctions brutales à l’encontre des religieux qui acceptent de représenter cette branche bouddhisme indépendant à l’intérieur des délégations régionales. C’est ainsi que la religieuse bouddhiste Thich Nu Thông Mân, appartenant à la délégation de la province de Khanh Hoa, a été expulsé au mois de mars dernier, de la pagode Dich Quang où elle menait depuis dix ans sa vie religieuse.

Une nouvelle affaire du même type vient d’avoir lieu dans la province de An Giang, où le principal représentant du bouddhisme unifié est le vénérable Thich Chon Tâm, desservant de la pagode Tây Huê. Le 8 avril dernier, il recevait du Comité de gestion de l’Eglise bouddhiste du Vietnam (patronnée par le Front patriotique) une décision lui intimant l’ordre de quitter sa pagode dans les quinze jours et de se rendre dans son village d’origine “pour y améliorer son comportement personnel Cette décision écrite lui a été lue à haute voix par un des membres de la délégation qui la lui avait apportée. Cette dernière était composée de huit membres. Quatre d’entre eux étaient vêtus d’habits religieux. Le groupe des quatre autres, en civil, étaient des membres de l’administration civile. Dans une lettre envoyée le 10 avril 2006 à la délégation bouddhiste de la province, le religieux a narré cette affaire dans le détail (1) et déploré la collusion des autorités religieuse et du pouvoir civil. Il a écarté toute idée de se plier aux ordres de l’Eglise bouddhiste, soutenue par le gouvernement, et affirmé que les mesures prises contre lui étaient à la fois illégales et anticonstitutionnelles.

Le vénérable Thich Chon Tâm avait été nommé le 5 novembre 2005 délégué principal du bouddhisme unifié pour la province An Giang par l’Institut de propagation du Dharma (organe directeur du bouddhisme unifié). Dès lors, il était devenu la cible du pouvoir. Le 26 janvier dernier, des fidèles étaient venus prier dans la pagode de Tây Huê desservie par lui. A leur sortie, la police les conduisait au poste du district où il leur était conseillé de couper toute relation avec le religieux. Informé de l’affaire, le religieux vint se présenter aux autorités à qui il a demandé les raisons de cette intervention policière auprès des fidèles bouddhistes. Aucune réponse ne lui a été faite et il a été chassé des lieux sans même pouvoir rencontrer les fidèles bouddhistes encore interrogés. Quelques jours auparavant, des agents de la police provinciale étaient passés à la pagode où ils avaient ordonné au desservant de dissoudre immédiatement la délégation du bouddhisme unifié et de cesser d’être en rapport avec le vénérable Thich Quang Dô, haut responsable du bouddhisme unifié à Hô Chi Minh-Ville. Sinon, le moine serait expulsé de la pagode. Le religieux avait répondu qu’il attendait un ordre écrit des autorités civiles et qu’il ne manquerait pas de faire connaître son expulsion à diverses organisations internationales. Quelque temps plus tôt, il avait appris de la police elle-même qu’il était étroitement surveillé et que ses conversations étaient enregistrées. Le religieux est aujourd’hui est isolé dans sa pagode, téléphone et Internet coupés (2).

A Hô Chi Minh-Ville, les trois délégations du bouddhisme unifié qui ont été créées le 10 mars 2006 sont devenues la cible de tracasseries policières, qui exigent leur dissolution. La nuit, les policiers viennent vérifier les certificats de résidence des membres des délégations. Le jour, des représentants de la police et du Bureau des Affaires religieuses viennent rencontrer les religieux et les menacent pour les forcer à se retirer de la délégation.