Eglises d'Asie

Un groupe de théologiens chrétiens souhaite enrichir sa réflexion sur le thème de la mondialisation, en sollicitant l’apport des expériences et des idées des autres grandes religions du monde

Publié le 18/03/2010




Un groupe de théologiens chrétiens d’Asie, réfléchissant sur le rôle des religions au service de la société à l’âge de la mondialisation, a voulu connaître les points de vue sur la question des bouddhistes, des hindous et des musulmans. La Sixième Conférence asiatique de théologie, qui s’est tenue à Colombo, au Sri Lanka, du 24 au 31 mars dernier, a réuni une quinzaine de théologiens venus du Bangladesh, de Birmanie, d’Inde, d’Indonésie, du Pakistan, des Philippines, de Corée du Sud, du Sri Lanka et de Taiwan. La Conférence asiatique de théologie est affiliée à l’Association ocuménique des théologiens du tiers-monde (EATWOT) qui en était l’organisatrice (1).

La 1ère Conférence s’était tenue au Sri Lanka en 1979. Pour sa sixième rencontre, le P. Rohan Silva, coordinateur de l’EATWOT a expliqué à la presse que les théologiens avaient tenu à réfléchir aux problèmes posés par la mondialisation dans une perspective chrétienne et interreligieuse. Le 29 mars, des spécialistes bouddhistes, hindous et musulmans sont venus les rejoindre et partager avec eux leurs expériences et leurs idées.

Lorna Devarajah, une spécialiste du bouddhisme de Colombo, a ainsi affirmé que la mondialisation donnait naissance à une société de consommation au sein de laquelle les gens ont toujours davantage besoin de confort, ce qui est à l’opposé de l’enseignement de Bouddha. Puisque le véritable bonheur n’est pas fondé sur le désir, a-t-elle déclaré, la mondialisation s’oppose aux enseignements de Bouddha. Affirmant que toutes les religions s’opposent “à l’avidité du désir Devarajah a demandé aux responsables religieux de lutter contre cette mondialisation.

Selvi Thiruchandran, un professeur d’hindouisme à Colombo, a pris une position différente, disant que la mondialisation en elle-même ne pouvait être considérée comme opposée à l’hindouisme. “Il nous faut distinguer ce qui est bon et ce qui n’est pas bon dans le contexte de la mondialisation a-t-elle dit, ajoutant que les gens “devraient être motivés pour être capables de choisir les bonnes choses de la mondialisation”. Dans son analyse, la mondialisation fait se rapprocher les cultures grâce aux conversions et aux mélanges des races. Si les gens en sont bénéficiaires, l’hindouisme approuvera cette mondialisation, a-t-elle conclu.

Pour M. Mohamed, un professeur musulman du Pakistan, le concept fondamental des peuples du monde de vouloir former une communauté universelle est bon, mais l’islam “n’accepte pas une mondialisation destructrice des valeurs morales, spirituelles, culturelles et sociales des gens”. Comme Devarajah, il a invité les religions à prendre une position commune, mais, comme Thiruchandran, il situe la lutte contre des aspects néfastes de la mondialisation plus que contre la mondialisation elle-même. Les partisans de la mondialisation la présentent comme un mouvement en faveur des interconnections grâce aux échanges commerciaux et culturels, en vue d’une économie globale intégrée qui réduirait la pauvreté et élèverait les niveaux de vie. Mais les critiques accusent les nations riches d’utiliser la mondialisation pour augmenter leurs richesses grâce à l’exploitation des pays pauvres, a-t-il fait valoir.

Rex Joseph, un pasteur anglican, professeur à l’Institut de théologie du Sri Lanka, fait partie de ces critiques. “Si vous l’approfondissez et l’envisagez d’un point de vue théologique, la mondialisation est oppressive. C’est une manière subtile d’asservir les peuples, a-t-il affirmé. La mondialisation utilise les religions comme outil pour soumettre les petites gens. Elle comporte de bonnes choses, mais les plus petits et les plus faibles de la société sont laissés sans défense”.

Enfin, selon le P. Jerry Rosario, prêtre indien, l’influence positive de la mondialisation sur la société est minime et loin d’être bénéfique pour tous. Il faut distinguer ce qui est bon de ce qui n’est pas bon pour les plus petits de la grande famille humaine et pour les laissés-pour-compte.