Eglises d'Asie

La question de savoir si le clergé, quelle que soit la religion, doit ou non payer des impôts, ne fait pas l’unanimité et déclenche une action judiciaire

Publié le 18/03/2010




Un groupe de citoyens laïcs accusant le Service national des impôts (NTS) de négligence en n’exigeant pas du clergé le paiement de l’impôt sur le revenu a provoqué des réactions mitigées dans le monde religieux. Kim In-sang, secrétaire du mouvement « Solidarité pour une libre critique des religions » (SFRM) et ses 3 859 partisans ont déposé une plainte, le 3 mai dernier, auprès du Bureau du ministère public de Séoul à l’encontre du responsable du NTS, Lee Ju-sung. Leur plainte constate que, malgré ses revenus, le clergé, quelle que soit son obédience, ne paie pas d’impôts. Ils affirment que le responsable du NTS s’est « soustrait » à sa responsabilité en acceptant cette pratique comme normale. Les plaignants soulignent qu’actuellement aucune loi ne prévoit une exemption d’impôt sur les revenus pour les pasteurs protestants, les moines bouddhistes et les prêtres catholiques. « Donc, le responsable du NTS, en tant que fonctionnaire, refuse d’accomplir sa fonction affirment-ils. Ils soulignent que presque tous les prêtres catholiques et quelques pasteurs protestants paient volontairement l’impôt sur le revenu mais ils se demandent comment, pour une même « profession », certains paient des impôts et d’autres non. « Il semble que, pour le NTS, payer ses impôts n’est pas un ‘devoir’ mais un ‘choix’, ce qui est un abus d’autorité insistent-ils.

Le vénérable Dongseon, directeur des affaires financières de l’Ordre Jogye, la plus importante dénomination bouddhiste du pays, a expliqué à la presse, le 10 mai dernier, qu’il reconnaissait que les moines bouddhistes ne devraient pas être exemptés d’impôt. « Mais, puisque les moines ne reçoivent pas d’argent directement du temple ou des fidèles, ils n’ont pas de salaire sur lequel ils seraient imposables a-t-il déclaré. Il a précisé que l’Ordre Jogye avait débattu du problème au plus haut niveau et qu’il en était ressorti qu’il serait difficile d’établir un barème de taxation pour des moines qui ne reçoivent pas d’argent de façon régulière.

La Conférence des évêques catholiques sud-coréens, quant à elle, avait décidé en assemblée plénière, dès mars 1994, que tous les évêques, les prêtres et les religieux du pays devaient payer l’impôt sur le revenu demandé par la loi, à partir de l’année en cours. C’était la première fois en Corée qu’une communauté religieuse offrait de son plein gré de payer des impôts. Un responsable de l’archidiocèse de Séoul a expliqué aux journalistes, le 9 mai, que tous les prêtres du diocèse payaient l’impôt mais que quelques-uns relevaient d’une tranche qui les en exemptait. « Un curé de paroisse touche 850 000 wons (700 euros) par mois et un vicaire environ 650 000 wons (540 euros) a-t-il précisé.

Cependant, Heo Yong-su, secrétaire général de l’Eglise méthodiste Kumman, a désapprouvé cette obli-gation. Il a affirmé qu’avec ses quatorze pasteurs et ses 100 000 membres, son Eglise était une organi-sation « à but non lucratif ». De plus, a-t-il expliqué, avec leurs ouvres caritatives, les pasteurs dépen-sent plus d’argent qu’ils n’en reçoivent, et le peu qu’ils reçoivent ne peut être assimilé à un salaire. Il a toutefois précisé que neuf des quatorze pasteurs payaient l’impôt. « Ce serait déplacé et peu judicieux pour le gouvernement d’imposer les pasteurs qui travaillent au service des autres a-t-il affirmé.

Un responsable du mouvement SFRM, qui a voulu garder l’anonymat, a expliqué à la presse, le 9 mai, que le clergé de différentes religions était de plus en plus impliqué dans des problèmes de corruption et d’irrégularités financières. « Nous voulons corriger cette situation en demandant qu’ils paient des impôts comme tout le monde a-t-il précisé, affirmant encore que le pouvoir des gens de religion aujourd’hui est plus grand que celui des politiciens ou des riches capitalistes sud-coréens. « Les gens le savent et ils ont peur de nous soutenir ouvertement. C’est pourquoi pour l’instant, nous avons peu de partisans a-t-il regretté.

Lee Kyung-yong, responsable du département des impôts au ministère des Finances et de l’Economie, a confié, le 9 mai, que, suite à cette plainte au civil, le NTS lui avait demandé une interprétation plus sévère de la loi. « Nous venons juste de commencer à revoir le problème, mais nous le faisons de façon très prudente a-t-il commenté, reconnaissant qu’il est difficile de juger si oui ou non les offrandes des fidèles aux religieux sont imposables.