Eglises d'Asie

Fondée par une catholique, une association vient en aide aux travailleurs migrants maltraités en les informant sur leurs droits et en intervenant auprès du ministère pour l’Emploi

Publié le 18/03/2010




Bridget Lew, une catholique singapourienne, vient en aide aux travailleurs migrants maltraités par leurs employeurs dans la cité-Etat, grâce à son association créée en 2004, HOME (Humanitarian Organization for Migration Economics, Organisation humanitaire pour les mouvements migratoires économiques). L’association dispose de trois centres d’hébergement où les intéressés prennent connaissance de leurs droits, suivent une formation professionnelle, tout en étant hébergés et nourris. Home intervient également en leur nom auprès du ministère pour l’Emploi (Ministry of Manpower) pour les affaires de salaires impayés ou d’emplois.

Auparavant, Bridget Lew a dirigé la Commission pour la pastorale des migrants et des gens du voyage de l’archidiocèse de Singapour (1), par l’intermédiaire de laquelle avaient été organisées des distributions de repas aux travailleurs immigrés et une formation professionnelle leur permettant de retrouver un emploi, une fois de retour dans leur pays.

La plupart des personnes qui trouvent refuge auprès de l’association Home sont originaires du Bangladesh, de Chine, de l’Inde ou de l’Indonésie. “Les travailleurs non qualifiés ou à faible qualification sont les personnes les plus exposées à l’exploitation par les employeurs ; et la protection juridique des travailleurs migrants (à Singapour) reste insuffisante commente Bridget Lew, qui a fait partie des trois Singapouriens sur les 1 000 personnes nominées pour le prix Nobel de la Paix en 2005. Selon elle, les droits des employés non qualifiés ou à faible qualification sont protégés par la loi du travail (Employment Act) uniquement pour la journée de repos hebdomadaire, et ces derniers sont souvent amenés à travailler dans des conditions dangereuses, comme sur des sites en construction ou près d’incinérateurs. En fait, selon un observateur de la scène locale interrogé par Eglises d’Asie, toute une catégorie de travailleurs, tels les employées de maison – qui sont plus de 120 000 à Singapour -, n’est nullement couverte, même pour le repos hebdomadaire, par l’Employment Act, contrairement aux ouvriers du bâtiment par exemple. Ces femmes dépendent totalement de la bonne ou éventuellement mauvaise volonté des employeurs et des agents recruteurs. Par ailleurs, elles sont assujetties à des règlements gouvernementaux draconiens qui violent ouvertement les droits fondamentaux de la personne.

Zhou Zhong (un pseudonyme), une des personnes ayant trouvé refuge à St. Joseph’s Grotto, le centre d’hébergement pour hommes de Home, est arrivé à Singapour en mars 2005 pour travailler sur des chantiers de maisons individuelles du fait de ses qualifications. En fait, il a été envoyé sur un chantier industriel. Lorsqu’il a refusé de travailler sur ce site, son employeur a menacé de le rapatrier en Chine, l’a séquestré et battu à plusieurs reprises pendant une semaine, afin de le faire céder. Une fois libéré, Zhou Zhong est allé immédiatement porter plainte auprès de la police qui, selon lui, ne l’a pas cru. L’ambassade de Chine l’a alors dirigé vers le ministère pour l’Emploi qui l’a aiguillé vers Home. Actuellement, Zhou Zedong attend que le jugement de l’affaire soit rendu avant de retourner en Chine pour payer ses dettes.

Les femmes trouvant refuge auprès des deux centres Home viennent, pour la plupart, d’Inde, d’Indonésie, des Philippines, du Sri Lanka et de Thaïlande. Elles ont le plus souvent travaillé comme employées de maison et ont été maltraitées. Pour Bridget Lew, l’inspiration de Home est de “créer une culture d’accueil” pour les travailleurs migrants qui “sont à la merci de leurs hôtes” ; car “une société accueillante qui accueille les étrangers est une société chrétienne ; inversement, si nous ne les accueillons pas, nous n’accueillons pas le Christ ajoute-t-elle. En plus de leur procurer le gîte et le couvert ainsi qu’une formation professionnelle, Bridget Lew aborde également l’aspect du pardon avec les travailleurs migrants, particulièrement envers leur ancien employeur.

Le 5 octobre dernier, selon le quotidien The Straits Times, deux Singapouriennes ont été condamnées par la justice de Singapour pour avoir maltraité leurs employées. L’une d’entre elle, Ng Siew Luang, a été condamnée à neuf mois d’emprisonnement pour avoir brûlé le visage de sa domestique avec un fer à repasser et pour l’avoir frappée à l’aide d’un cintre. Elle a toutefois été libérée en payant une amende de 15 000 dollars de Singapour (7 455 euros), après que son avocat ait fait appel.