Eglises d'Asie – Philippines
Selon un évêque catholique, le récent scandale qui a entaché le concours d’entrée aux écoles d’infirmiers est symptomatique de « la culture de tricherie » qui affecte le pays
Publié le 18/03/2010
La tricherie est présente dans toutes les fibres de la société philippine, affirme-t-il, pas seulement dans le système éducatif, mais dans le sport, les affaires, le gouvernement, chacun espérant s’en tirer en trichant. « Je vais demander au Conseil permanent de la Conférence épiscopale de mettre la question de la tricherie à l’ordre du jour de l’assemblée de janvier 2007. Cela viendra à point nommé, à quelques mois des élections présidentielles de mai 2007. Les tricheurs ne doivent pas être récompensés, ils doivent être renvoyés, qu’ils soient élèves-infirmiers ou hommes politiques a explicité l’évêque.
Pour Mgr Bacani, l’Eglise doit se montrer plus présente sur cette question « pour parler haut et fort et dénoncer cette culture de tricherie que l’on trouve du jardin d’enfants aux urnes électorales ». Il souligne que le gouvernement actuel a perdu tout crédit moral dès l’instant où des accusations de fraude sont restées sans réponse à la suite des élections de 2004. « Aux jeunes à qui je prêche pour des retraites de confirmation, je dis : ‘Si vous trichez à l’école, vous tricherez sur les terrains de sport, dans votre travail, au gouvernement, dans tout ce que vous ferez.' »
Dans le cas des élèves-infirmiers, la pression qui s’exerce sur eux ne change rien à l’affaire, explique encore Mgr Bacani. Selon des études, la moitié des élèves qui se présentent aux écoles d’infirmiers ont déjà un diplôme, acquis dans une autre discipline ; ils se présentent au concours pour obtenir le diplôme, travailler deux ans sur place – comme la loi les y oblige – avant de partir à l’étranger et trouver à s’employer en Amérique du Nord ou ailleurs. A l’étranger, une infirmière philippine peut gagner de 3 000 à 4 000 dollars par mois, là où le salaire moyen, dans les villes philippines, est équivalent à 170 dollars (et 75 à 95 dollars dans les campagnes). Il n’est pas rare que des familles s’endettent pour payer à l’un de leurs membres la préparation au concours et les frais de scolarité.
A Manille, la responsable d’une école d’infirmières se désole que le scandale qui a éclaté porte tort à ceux qui ont réussi l’examen sans tricher. Elle espère toutefois que l’affaire provoquera une prise de conscience dans la profession. « Le gouvernement et le secteur privé doivent réfléchir au fait qu’en ce qui concerne la formation des infirmières, notre système éducatif ne fait que répondre à une demande située à l’étranger, aux dépens de la qualité et, pire, de la moralité commente-t-elle (1).