Eglises d'Asie

Sur l’île de Basilan, des menaces du groupe Abu Sayyaf amènent des écoles catholiques à fermer leurs portes

Publié le 18/03/2010




Sur l’île de Basilan, située à l’extrémité sud-ouest de l’île de Mindanao, quatre écoles catholiques animées par des religieuses clarétiennes ont fermé leurs portes après avoir reçu des menaces de la part du groupe Abu Sayyaf. La fermeture remonte au 16 octobre dernier et, selon Sour Felipa Javen, qui enseigne dans une de ces écoles, ce sont des parents d’élèves, de religion musulmane, qui ont averti les religieuses d’une possible action prochaine du groupuscule terroriste. A Manille, Sour Teresa Mueda, supérieure de la congrégation, a estimé que la menace était suffisamment précise pour être prise au sérieux et a opté pour la fermeture “jusqu’à nouvel ordre”.

Les écoles en question accueillent des élèves chrétiens et musulmans, ces derniers étant légèrement majoritaires (1), et, précise Sour Teresa Mueda, les relations que les religieuses entretiennent avec les musulmans sur place ont toujours été bonnes. Cependant, dans le contexte actuel, les religieuses n’ont pas voulu prendre de risque. Elles ont rencontré l’évêque du lieu, Mgr Martin Jumoad, de la prélature d’Isabela, afin qu’il demande à l’armée philippine de protéger les écoles et les couvents des sours. Ce dernier a répondu qu’une telle solution n’était pas souhaitable car trop “coûteuse”. En effet, la prélature serait obligée de payer l’entretien des soldats affectés à la garde des écoles, or les fonds disponibles suffisent à peine à payer les enseignants et à subvenir aux besoins des sours, a souligné l’évêque.

Selon les informations disponibles, la menace que fait peser le groupe Abu Sayyaf est liée au fait que le groupuscule a récemment intégré de nouvelles recrues. Elles ne seraient pas originaires de Basilan, mais viendraient d’un camp d’entraînement commun au groupe Abu Sayyaf et au réseau terroriste Jemaah Islamiyah, à Patikul, sur l’île voisine de Jolo. A Basilan, les gens se rappellent qu’en 1998, lors d’un événement similaire, les nouveaux membres du groupe avaient été envoyés sur le terrain “pour des missions-tests”. Selon le vice-chancelier de la prélature d’Isabela, le P. Arnel Lagman, le risque est que ces nouvelles recrues se livrent à une surenchère dans les attentats et les enlèvements afin de prouver leur loyauté au groupe Abu Sayyaf. “La tension est tout à fait palpable dans des villes comme Maluso et Isabela City. Personne ne sort après 19 heures. A Tumahubong, un curé de paroisse a reçu des menaces précises a confié le 17 octobre le P. Lagman. Tumahubong est la localité où le P. Rhoel Gallardo était curé de paroisse. Enlevé en mars 2000 en compagnie de 52 élèves et enseignants, le P. Gallardo avait trouvé la mort après 44 jours de captivité, lors d’un accrochage entre l’armée et les hommes d’Abu Sayyaf (2).

Le 10 octobre dernier, les troupes philippines à Mindanao ont été placées en “alerte rouge”. Une décision prise après que des bombes eurent explosé à Cotabato City et dans les provinces de Cotabato et Sultan Kudarat, faisant six morts et une trentaine de blessés. Ces attentats ont eu lieu peu après l’arrestation de l’épouse d’un dirigeant indonésien de la Jemaah Islamiyah, dénommé Dulmatin. Ce dernier est soupçonné d’avoir pris part aux attentats de Bali, en Indonésie, en 2002 et en 2005. L’épouse de Dulmatin a été arrêtée le 4 octobre à Patikul.