Eglises d'Asie

Pour se défaire de l’alcoolisme, un prêtre recommande une méthode japonaise d’introspection et de méditation comme thérapie efficace

Publié le 18/03/2010




L’archidiocèse de Séoul utilise une méthode de méditation venue du Japon comme thérapie pour aider les alcooliques à vaincre leur dépendance. Selon le P. Bartolomew Heo Ke-un, directeur du Centre pastoral pour alcooliques, la méthode dite “Naikan a démontré son efficacité dans le traitement de l’alcoolisme au Japon. “Cette année, nous avons utilisé cette méthode à Séoul deux ou trois fois au cours d’une retraite pour les alcooliques a expliqué le P. Heo, qui précise que cette méthode lui a permis de se défaire de l’alcoolisme dont il souffrait depuis une dizaine d’années. D’après lui, 90 % de ceux qui ont suivi cette méthode Naikan prennent conscience qu’il leur est possible d’arrêter de boire et plus de la moitié d’entre eux ont effectivement cessé de consommer de l’alcool ces douze derniers mois.

Au cours d’une rencontre pour célébrer le septième anniversaire de ce Centre pastoral, le 27 octobre dernier, le P. Heo a témoigné de son expérience lorsqu’il est parti, secondé par un prêtre japonais, pour suivre cette thérapie Naikan en 2002, au Japon, à Kagoshima. Devant une assemblée de 150 participants, dont beaucoup d’alcooliques accompagnés de leur famille, il a expliqué que cette thérapie ne durait qu’une semaine à la différence d’autres méthodes qui durent beaucoup plus longtemps. Mais il s’agit d’une semaine de pratique intensive (1).

“Les patients consacrent 15h30 par jour au Naikan, contrôlés et assistés toutes les deux heures durant trois ou cinq minutes par un conseiller a expliqué le prêtre. D’après lui, Naikan, qui en japonais signifie ‘introspection’, est une méthode de réflexion sur soi qui aide les gens à se connaître eux-mêmes et leur entourage. La méditation tourne autour de trois questions : qu’est-ce que j’ai reçu des autres aujourd’hui ? Qu’est ce que je leur ai donné ? De quelles difficultés et de quels soucis suis-je la cause pour les autres aujourd’hui ? Il s’agit là d’une adaptation de ce qui se fait au Japon depuis 1975.

Le Naikan se pratique assis dans un espace d’un mètre carré délimité par un paravent. Au cours de cet exercice quotidien, le patient ne doit ni parler, ni lire, ni écouter la radio. De plus, il ne doit pas quitter son box où il prend même ses repas, si ce n’est pour satisfaire ses besoins naturels. D’après le P. Heo, les deux premiers jours sont les plus difficiles et il n’est pas rare que des patients quittent le stage à ce moment-là. Mais, après trois jours, ceux qui ont persévéré se sentent plus à l’aise dans leur corps et dans leur âme. Quand les patients, grâce à la méditation du Naikan, se sont libérés de la mauvaise image qu’ils peuvent avoir d’eux-mêmes et découverts l’amour que les autres ont pu leur témoigner, ils peuvent alors maîtriser leur sentiment de culpabilité, comprendre et accepter ce qu’ils sont, a expliqué le prêtre. “Se découvrir soi-même grâce à une réflexion sur soi peut être le chemin pour rencontrer Dieu créateur. Ce qui est important, c’est de comprendre que le Naikan n’est pas une théorie mais une expérience a-t-il encore précisé.

Le P. Heo reconnaît que cette thérapie relève d’une culture orientale et bouddhiste. Cependant, il ne pense pas qu’elle puisse être pour autant une recherche religieuse du salut. D’autre part, c’est la motivation et la volonté d’entreprendre cette thérapie qui lui donnent son efficacité, dit-il.

Le Centre pastoral pour alcooliques a été mis sur pied par l’archidiocèse de Séoul en 1999. Il propose différents programmes pour les alcooliques dont celui, traditionnel, des Alcooliques Anonymes. D’autres méthodes inspirées par la tradition catholique comprennent une sensibilisation à la spiritualité, une réflexion à partir de la Bible, des lectures, l’Eucharistie et la méditation.

Pour une religieuse qui travaille auprès des alcooliques dans un hôpital catholique, la thérapie du Naikan peut se montrer un bon outil de guérison mais pas nécessairement adapté à des personnes sans aucune base religieuse. Passer quinze heures par jour en méditation, même si le programme ne dure qu’une semaine, n’est pas donné à tous, a-t-elle expliqué.

Selon une étude du ministère de la Santé et de l’Aide sociale, parue en 2000, 3,3 millions de personnes, soit 7 % de la population, étaient alcooliques et nécessitaient des soins mais seulement 6 000 d’entre elles suivaient un traitement.