Eglises d'Asie

Les demandes de restitution d’établissements religieux “empruntés” ou confisqués par l’Etat se multiplient

Publié le 18/03/2010




L’Eglise catholique du Vietnam semble résolue à récupérer les établissements qui lui ont été confisqués ou “empruntés” après la mise en place du pouvoir communiste au Nord puis au Sud. Lors de leur récente rencontre avec le Premier ministre, les évêques avaient cité nommément trois établissements religieux dont ils demandaient la restitution, à savoir l’ancienne résidence de la nonciature à Hanoi, les terrains du sanctuaire de La Vang, dans le diocèse de Huê, et les bâtiments de l’institut pontifical de Dalat. Bien que certains établissements aient été restitués ces derniers temps, la liste des propriétés d’Eglise empruntées par l’Etat est soigneusement tenue à jour dans la plupart des diocèses (1). Ces derniers temps, dans le diocèse de Huê ou à Can Tho, des demandes de restitution ont donné lieu à des conflits quelquefois graves entre des communautés chrétiennes et les autorités locales.

Le 11 octobre dernier, un de ces affrontements a eu lieu dans la paroisse de Phuong Tây à environ 40 km au sud de Huê. L’objet du conflit était une école appelée Mai Khôi. Celle-ci, construite en 1937 et prise en charge en 1964 par des religieuses de la congrégation des Filles de l’Immaculée conception, attirait avant 1975 la population scolaire de toute la région. En 1975, comme tous les autres établissements éducatifs privés, l’école fut empruntée par les autorités communales qui l’utilisèrent jusqu’en 2004, date à laquelle elle fut abandonnée, fort délabrée, pour une école nouvellement bâtie à 200 mètres de là. Constatant cette nouvelle situation, le prêtre responsable de la paroisse fit parvenir aux autorités régionales une première demande de restitution en 2004, suivie de deux autres en 2006 Celles-ci restèrent sans réponse. Mais une décision communale publiée vers le milieu de l’année dernière affirmait que désormais l’école appartenait aux autorités locales.

Les choses se sont véritablement envenimées le 24 octobre dernier. Ce jour-là, le pouvoir régional envoya une équipe d’ouvriers chargés de démolir les bâtiments. Ils se heurtèrent aussitôt à la résistance de la paroisse, encouragée par l’évêque coadjuteur de Huê, qui, averti des événements, s’était rendu sur les lieux. Dès le lendemain, une barrière de barbelés était élevée pour protéger l’école des interventions policières et des pancartes exposant les revendications des fidèles étaient placées sur l’école. Les catholiques de la région se sont mobilisés en nombre pour monter la garde. En fin de compte, les autorités ont renoncé à la démolition de l’école, à condition que les pancartes revendicatives soient retirées.

C’est également la restitution d’une école que réclament dix-huit prêtres de la région de Ca Mai, dans le diocèse de Can Tho, dans une lettre (1) qu’ils viennent d’adresser aux plus hautes autorités centrales et régionales. Il s’agit d’une école primaire libre dépendant de la paroisse annexe de Bao Lôc, dans le doyenné de Ca Mau. En 1975, lors du changement de régime, l’établissement avait été prêté aux autorités locales. Après avoir été utilisée pendant une trentaine d’années, l’école fut abandonnée il y a un an, dans un état de dégradation assez avancée. Pour ces raisons, la paroisse de Bao Lôc, dont le nombre de fidèles s’est plusieurs fois multiplié en trente ans, a projeté de réutiliser les locaux de l’ancienne école.

Cependant, le 28 octobre dernier, les autorités de la ville de Ca Mau ont fait connaître publiquement leur décision de construire sur les lieux de l’ancienne école, une nouvelle école maternelle. Or, répondent les prêtres dans leur lettre de protestation, une telle école est tout à fait inutile, une école maternelle privée existant déjà sur les lieux accueillant quelque 500 élèves. Par ailleurs, contrairement à ce que prétend le gouvernement, l’école n’a jamais été offerte au gouvernement mais seulement prêtée. Aussi bien, les prêtres, qui disent refléter la volonté de la population, réclament la restitution de cette école pour satisfaire les besoins religieux de leurs fidèles.

Un autre conflit concernant l’école primaire Sainte-Thérèse oppose les autorités municipales de Huê au couvent des Amantes de la Croix de Phu Cam, à Huê. Cet établissement, très ancien, avait été “emprunté” aux religieuses en 1978 par les autorités qui, pendant un temps, permirent à quelques religieuses de continuer à y enseigner. Depuis 1995, les religieuses multiplient en vain les demandes de restitution. Les autorités régionales exigent de la communauté des religieuses qu’elles cèdent terrains et bâtiments au gouvernement. Dans une de leurs dernières réponses aux exigences des autorités, le 8 novembre 3006, la communauté des Amantes de la Croix écrivait : “Nous réaffirmons aujourd’hui notre ferme résolution de ne pas signer l’engagement de cession du terrain et du bâtiment de l’école Sainte-Thérèse que le Comité populaire du district a accaparés injustement et illégitimement pour en faire une école maternelle. Nous, les religieuses Amantes de la Croix, sommes résolument en plein accord pour refuser de céder à un quelconque organisme notre droit de propriété et d’utilisation de l’école Sainte-Thérèse»