Eglises d'Asie

La tradition du « billet de confession » obligatoire ne fait pas l’unanimité chez les catholiques sud-coréens

Publié le 18/03/2010




L’obligation de se confesser au moins une ou deux fois dans l’année est ressentie diversement par les catholiques sud-coréens récemment baptisés. Pour certains, comme pour Joanna Kang Sung-wha, satisfaire à cette obligation est une confirmation de leur appartenance à l’Eglise. D’autres la ressentent comme une occasion d’avancer dans la foi, une opportunité qu’ils estiment rare et précieuse dans une société toujours tendue vers plus d’efficacité et de rapidité. Pour d’autres encore, cette obligation est mal comprise. Ainsi, Veremundus Kim Sang-chun, baptisé en avril 2006 a confié aux journalistes de l’agence Ucanews, le 18 décembre dernier, qu’il voyait l’obligation du pangong (jugement) comme trop formelle et qu’il ne comprenait pas pourquoi la pratique des catholiques était définie selon des registres dressés à partir des « billets de confession ». Employé de bureau âgé de 38 ans, ancien élève des écoles protestantes, il estime que, dans l’Eglise catholique, à la différence des Eglises protestantes, il y a « beaucoup d’obligations et de formalités ».

La pratique du sacrement de réconciliation à travers l’obligation du pangong et du billet de confession qui lui est associé est inscrite dans le Guide pastoral de l’Eglise de Corée. Publié en 1995 par la Conférence des évêques catholiques de Corée (CBCK), il indique qu’un catholique doit aller se confesser et recevoir la communion au moins une fois par an, si possible à Pâques ou à un autre moment dans l’année (1).

Le P. Paul Lee Kang-eun, ancien professeur de droit canonique, explique que cette pratique s’enracine dans l’histoire de l’Eglise catholique en Corée. « C’est une tradition de l’Eglise locale que de fixer comme une obligation la pratique de la confession deux fois par an, à Pâques et à Noël ». Le pangong est ainsi devenu « un trait caractéristique de l’Eglise de Corée a-t-il expliqué, car, « XIXe siècle, la plupart des catholiques vivaient dans des régions très isolées par peur des persécutions. Ils ne pouvaient rencontrer un prêtre que deux fois dans l’année, au printemps et à l’automne, et c’était pour eux l’occasion de se confesser. L’usage est resté et c’est devenu une tradition ». Toujours selon le P. Lee, l’épiscopat coréen s’est appuyé sur cette tradition pour définir le « catholique non pratiquant » comme celui qui ne se confesse pas à Noël ou à Pâques durant trois années consécutives. Il a aussi souligné que la pratique régulière du sacrement de pénitence était un aspect important de la vie chrétienne par l’intermédiaire duquel l’Eglise pouvait guider la foi et la vie spirituelle des catholiques (2).

Basilissa Kim Mi-ja, baptisée en avril dernier, a expliqué qu’elle avait reçu sa carte de pangong le 6 décembre, quelques jours avant le temps des confessions fixé par la paroisse. Après sa confession, cette mère de famille de 33 ans a glissé sa carte dans une boîte spéciale. La paroisse utilisera cette carte pour enregistrer la date de sa confession. Pendant le temps réservé aux confessions, a-t-elle témoigné, les huit confesseurs ont consacré en moyenne moins de deux minutes à chaque personne, ce qui pour elle, n’est pas très satisfaisant. Malgré tout, le pangong est nécessaire, a-t-elle affirmé, parce qu’« il donne en deux minutes l’occasion de se confesser Elle a ajouté qu’elle avait remarqué que plusieurs catholiques qui n’allaient généralement pas à l’église se confessaient eux aussi.

Pour le P. Benedict Son He-song, secrétaire de la Commission pour la doctrine de la foi de la CBCK, il est compréhensible que certains catholiques, notamment parmi les nouveaux baptisés, réagissent négativement à cette tradition. A leur attention, il a réaffirmé que « les confessions faites pendant le temps de l’Avent valent tout autant que celles menées dans le cadre du pangong ». Il faut comprendre le pangong comme un encouragement offert aux catholiques à bien préparer Noël et Pâques, a-t-il précisé, ajoutant que l’Eglise avait conscience que le système pouvait être amélioré, en installant des confessionnaux en plus grand nombre, par exemple, lors de l’Avent et du Carême, afin que les fidèles aient plus de temps pour se confesser.

Pour le P. Melanius Jeung Tae-young, assistant du directeur de la pastorale de l’archidiocèse de Séoul, ce système de « billet de confession » n’est pas sans valeur. « Nombreux sont les catholiques non pratiquants qui renouent avec la foi à travers le pangong estime-t-il, notant également que cette « vénérable tradition » de l’Eglise de Corée permettait aux paroisses de soutenir la vie spirituelle de leurs paroissiens.