Eglises d'Asie

Récemment paru, le Livre blanc sur la religion inaugure un nouveau type de discours mais laisse transparaître les anciens objectifs

Publié le 18/03/2010




Après la visite du Premier ministre Nguyên Tân Dung au pape Benoît XVI, le gouvernement vietnamien vient de prendre une nouvelle initiative dans le domaine religieux, à savoir la publication d’un Livre blanc sur « la religion et la politique religieuse du Vietnam ». Forte de près de 90 pages, cette publication a été annoncée dans l’après-midi du 1er février 2007 par l’adjoint au directeur des Affaires religieuses, Nguyên Thê Doanh, au cours de la conférence de presse hebdomadaire présidée par le porte-parole des Affaires étrangères, Lê Dung (1).

Dans son exposé, le fonctionnaire aux Affaires religieuses a souligné que ce livre était publié à l’intention des Vietnamiens du pays et de la diaspora, mais aussi à l’intention de l’opinion internationale pour mieux faire comprendre la situation religieuse au Vietnam et la politique mise en ouvre (2). Après avoir présenté le contenu de la politique religieuse du gouvernement et expliqué qu’elle s’insérait à l’intérieur de la politique de la grande union du peuple, le porte-parole gouvernemental a reconnu “qu’en raison du niveau différent de développement entre les régions et de la prise de conscience insuffisante d’un certain nombre de cadres dans quelques localités, l’application de la politique religieuse, par endroits et par moments, laissait encore à désirer” (3Pour remédier à ces lacunes, a-t-il ajouté, le Bureau gouvernemental des Affaires religieuses a organisé pour les cadres locaux des “milliers de cours de recyclage” et distribué des “milliers de documents”.

Après avoir présenté le contenu du livre et donné un certain nombre de statistiques officielles sur les religions, Nguyên Thê Doanh a annoncé que deux nouvelles religions allaient s’ajouter à la liste des six religions déjà reconnues par l’Etat, à savoir le bouddhisme, le protestantisme, le catholicisme, le caodaïsme, le bouddhisme hoa hao et l’islam. Ces deux religions regroupent au total deux millions de fidèles. La première nommée, «Tu An Hiêu Nghia a vu le jour il y a 139 ans dans la région de Châu Dôc. Elle fut fondée et propagée par un lettré nommé Ngô Tu Loi, ayant participé au mouvement de résistance aux Français, appelé “Cân Vuong” (‘soutien du roi’). Elle a aujourd’hui 780 000 fidèles, appartenant à quatorze provinces et villes du sud. La seconde, dont l’appellation est “Tinh Do Cu Si Phât Hôi” (‘association bouddhiste des oblats de la Terre pure’), fondée en 1934 par Duc Tông Su Minh Tri, est elle aussi présente dans le sud, où elle possède plus de deux cents lieux de culte, fréquentés par 1 200 000 fidèles.

Le Livre blanc sur la religion et la politique religieuse est sans doute un livre important, ne serait-ce que parce qu’il est le premier du genre, les nombreux documents sur la religion parus auparavant se consacrant, en effet, soit à détailler la stratégie de l’Etat à l’égard des religions, soit à énoncer des dispositions législatives en rapport avec la pratique et la croyance religieuses. Le Livre blanc, surtout dans son premier chapitre qui contient un historique de chacune des religions reconnues, veut se présenter comme un livre d’histoire et de description objective des religions. Mais les arrière-pensées politiques de ses auteurs ne leur permettent pas de réaliser cette ambition. Le second chapitre, consacré à la politique religieuse de l’Etat, et le troisième, consacré aux relations des Eglises avec l’étranger, font apparaître avec plus de clarté les véritables intentions de l’Etat vietnamien dans le domaine religieux.