Eglises d'Asie

Les idées-forces du projet pastoral du cardinal archevêque de Hô Chi Minh-Ville

Publié le 18/03/2010




Les interventions publiques du cardinal archevêque de Hô Chi Minh-Ville, Mgr J.-B. Pham Minh Mân, ont montré depuis longtemps quels étaient les thèmes principaux de son projet pastoral : les relations du pouvoir politique avec l’Eglise universelle, les migrations internes au pays, le témoignage du catholicisme sur la scène sociale du Vietnam. Ce sont ces mêmes sujets qu’il a traités dans une interview accordée au P. Trân Công Nghi, directeur de l’agence de presse Vietcatholic News, lors d’un séjour à Bangkok où il participait à une session d’étude de la Fédération des Conférences épiscopales d’Asie (FABC) sur le thème : “Justice et Paix”.

A une question portant sur la rencontre du Premier ministre vietnamien Nguyên Tân Dung et du pape Benoît XVI, le 25 janvier dernier à Rome, il a répondu que l’on pouvait considérer cet événement comme un signe des temps nouveaux. Désormais, a-t-il déclaré, le Vietnam et le Vatican chemineront ensemble sur la même route, celle du dialogue et de la collaboration au service de la vie, de la dignité des citoyens, un chemin qui, dans la pensée du cardinal, devrait conduire à des relations diplomatiques normales. Plus encore, le cardinal Pham Minh Mân estime que cet événement illustre une nouvelle étape des relations entre l’Eglise et l’Etat. Selon lui, au cours des deux décennies qui ont suivi le changement de régime en 1975, l’Eglise catholique au Vietnam a été considérée comme une force hostile à l’Etat vietnamien. Ce n’est qu’au début de la troisième décennie, à partir du moment où le Vietnam est sorti de son isolement pour s’intégrer au processus de mondialisation, que l’Eglise a pu être considérée comme une collaboratrice possible, au service d’un développement durable du pays. C’est cette évolution que l’événement du mois de janvier dernier est venu renforcer.

Le cardinal a évoqué ensuite la rencontre des évêques vietnamiens avec le chef de l’Etat, Nguyên Minh Triêt, au mois de novembre dernier. Les représentants de la hiérarchie catholique ont exposé au président leurs conceptions en matière de liberté religieuse et de droits de propriété de l’Eglise. Des propositions lui ont été faites, concernant des établissements d’Eglise confisqués après 1975. Ont été nommés le terrain et les bâtiments de la nonciature apostolique à Hanoi, les hectares de terre entourant le sanctuaire de Notre-Dame de La Vang, le séminaire pontifical de Dalat. Le chef de l’Etat a pris note de ces requêtes et a promis de leur donner une réponse.

L’interview aborde ensuite le thème de la contribution que l’Eglise catholique peut apporter aux progrès de la société vietnamienne. Tout en manifestant son insatisfaction devant les limites et les obstacles que rencontre l’Eglise, le cardinal a cependant reconnu que certains progrès avaient été réalisés en ce domaine. Voilà déjà deux ans, a-t-il fait remarquer, que l’Etat a invité l’Eglise à s’occuper des malades atteints du sida. Très récemment, le diocèse a été invité à collaborer à la prise en charge de handicapés dans un centre qui doit bientôt voir le jour. Le cardinal ne manque pas de projets en ce domaine. Il a en particulier l’intention d’ouvrir un centre d’accueil pour les enfants de mères séropositives. Selon lui, dans le dialogue avec les autorités, l’Eglise devrait surmonter peu à peu les limites qui sont les siennes, plus spécialement dans le domaine de l’éducation.

Le cardinal s’est aussi entretenu du problème qui lui tient le plus à cour, celui des migrations des campagnes vers les villes. Pour la seule ville de Saigon, il y a environ deux millions de migrants, dont la majorité (les deux tiers) vient du Nord. Près de la moitié est sans emplois. Les autorités ont reconnu devant le cardinal qu’en aucune façon, elles ne pouvaient venir à bout de l’ensemble des tâches qu’exige le règlement de ces problèmes. Bien que les propositions de l’Eglise n’aient guère reçu de réponses de l’Etat, la communauté catholique de Saigon est à l’origine d’un grand nombre d’initiatives en faveur des migrants, non seulement dans les églises où ils reçoivent un accueil spécial, mais aussi dans le domaine social. Pour le service des migrants, elle a créé de nombreux lieux d’orientation, d’encouragement et de soutien matériel et moral.