Eglises d'Asie

Dans la banlieue de Djakarta, une école de théologie protestante refuse de céder à la pression d’islamistes qui veulent obtenir sa fermeture

Publié le 18/03/2010




Le 10 mars dernier, dans la lointaine banlieue de Djakarta-Est, une foule évaluée à 400 personnes a manifesté bruyamment devant une école de théologie protestante, l’Ecole Setia (‘fidèle’) de Théologie. Les manifestants, conduits par le Front des défenseurs de l’islam et disant vivre dans le voisinage immédiat de l’école, réclamaient la fermeture de l’institution, au motif que ses étudiants faisaient trop de bruit tant au sein de l’école que dans ses abords immédiats. Les manifestants ont été empêchés d’approcher du portail d’entrée de l’école par un détachement de 400 policiers.

Le Front des défenseurs de l’islam est un groupe islamiste connu pour ses descentes dans des bars et des boîtes de nuit à Djakarta (1). Selon un manifestant musulman, cela fait trois ans que les habitants du quartier où se trouve l’école de théologie protestante réclament la fermeture de l’établissement, mais c’est la construction d’un nouveau dortoir, édifié à 400 mètres de l’école elle-même, qui a déclenché leur mouvement. S’il met en avant le bruit fait par les quelque 1 600 étudiants qui fréquentent l’école, ce manifestant reconnaît que le voisinage « n’est pas dérangé par les services religieux régulièrement organisés sur le campus » de l’école.

Fondée en 1990, l’école est installée sur un terrain d’un hectare et demi. Le bâtiment principal compte deux étages et abrite les salles de cours où enseignent 80 professeurs. Les étudiants, venus de tout le pays, logent pour la plupart sur le campus et dans le dortoir nouvellement construit. Selon le recteur de l’établissement, le Rév. Juwanto, la demande des manifestants musulmans est « infondée ». « Nous avons construit cette institution il y a dix-sept ans avec un permis de construire en bonne et due forme. Nous ne cèderons pas aux pressions », a-t-il affirmé, ajoutant que l’administration des Affaires religieuses avait accordé à l’école les autorisations requises pour fonctionner (2).

Le Rév. Juwanto a réfuté le fait que le voisinage se plaignait de la présence de l’école. « Nous avons choisi ce lieu, situé dans un quartier populaire et moyennement aisé parce que nous voulions que nos élèves vivent dans la simplicité. Nos étudiants et nos professeurs entretiennent de bonnes relations avec les habitants alentour et nous n’avons jamais eu de problème. Je pense que les plaintes (évoquées par les manifestants) ne viennent pas des résidents », a-t-il expliqué. Venu de Nias, une île majoritairement chrétienne située au large de la côte ouest de Sumatra, pour étudier la théologie, Yohanes confirme que les relations au jour le jour sont bonnes avec les riverains. Un certain nombre d’entre eux ont ouvert des échoppes où les étudiants viennent faire leurs courses et se restaurer, met-il en avant. Pour sa part, l’une de ces marchandes explique que cette activité lui permet de nourrir sa famille et ajoute qu’elle ne pense pas que quiconque « ici se convertira au christianisme. La religion est une affaire personnelle ».