Eglises d'Asie

Les évêques catholiques reprochent au gouvernement ses manquements dans le domaine de la défense de la vie

Publié le 18/03/2010




« Avec une politique gouvernementale et des lois qui portent atteinte à la dignité de l’être humain au nom d’une priorité donnée à l’efficacité économique, nous faisons face à la triste réalité de constater que notre pays cumule un taux de natalité parmi les plus faibles au monde avec des taux extrêmement élevés de suicide et d’avortement. » Tels sont les propos, particulièrement vifs, que Mgr John Chang Yik, évêque de Chunchon et président de la Conférence des évêques catholiques de Corée (CBCK), a tenu lors de la conférence de presse marquant la fin de l’assemblée plénière des évêques de Corée. A l’issue de quatre jours de réunions, les évêques catholiques sud-coréens ont publié, le 15 mars dernier, un communiqué intitulé : « Vers une culture de la vie ».

L’OCDE (Organisation pour la Coopération économique et le Développement), dans son rapport 2004 publié l’an dernier, a indiqué que la Corée du Sud connaissait le taux de suicide le plus élevé au sein des trente membres que compte cette organisation internationale (1). Selon ce rapport, le taux de suicide en Corée du Sud est de 24,2 pour 100 000 habitants. Par ailleurs, le Bureau national des statistiques coréen a indiqué qu’en Corée du Sud, le taux de natalité a été de 10,8 ‰ en 2005, soit le taux le plus bas au monde. Enfin, selon l’Eglise catholique, le nombre des avortements dans le pays s’élève chaque année à près de 1,5 million.

Le 15 mars, Mgr Chang a déclaré que les évêques, fidèles à l’engagement de l’Eglise pour la défense de la vie, demandaient au gouvernement de modifier la « Loi sur la santé de la mère et de l’enfant », le texte sur lequel repose la légalité de l’avortement – autorisé lorsque l’enfant à naître est atteint de certains handicaps, de maladies infectieuses ou bien encore lorsqu’il a été conçu à l’issue d’un viol ou qu’il met en danger la santé de sa mère. « Ces dispositions autorisant l’avortement ne sont pas seulement causes de la faiblesse de la natalité, mais sont aussi les causes principales de l’actuel laxisme moral et de l’emprise croissante d’une culture de mort », a précisé Mgr Chang. « Selon les médias, 1,5 million d’avortements ont été pratiqués en moyenne chaque année depuis 1973. C’est dire la gravité de la situation. Additionnés, ils dépassent la population totale de la Corée du Sud », a-t-il ajouté, soulignant également que nombre de catholiques avaient recours à cette pratique. « Ils (les catholiques) surfent avec les autres sur cette vague qu’est devenue la culture de mort », parce que « les Coréens placent le succès social au-dessus de tout et sont prêts à tout pour cela, y compris au détriment de la vie d’autrui. » Pour le représentant de l’épiscopat coréen, « c’est la dignité de l’être humain qui est ici remise en cause ».

Mgr Chang a poursuivi sa critique du gouvernement en dénonçant le soutien que les autorités publiques apportent à la fécondation in vitro (FIV). « Il y a là une contradiction : d’un côté, le gouvernement soutient les naissances obtenues par FIV et, de l’autre, il autorise les avortements. » Aujourd’hui, le ministère de la Santé et des Services sociaux apporte une aide financière aux couples mariés souffrant de stérilité en accordant une aide allant jusqu’à trois millions de wons (2 100 euros) par an en cas de recours à une FIV.

Les statistiques du ministère indiquent qu’en 2005, 21 154 couples ont recouru à une FIV et que, cette même année, 93 921 embryons surnuméraires ont été congelés dans 122 cliniques. « Les évêques catholiques récusent la politique du gouvernement qui consiste à subventionner la production de bébés-éprouvette comme solution à la baisse de la natalité dans le pays », a encore indiqué l’évêque (2), rappelant que l’Eglise catholique n’approuve pas le recours à une FIV pour vaincre une stérilité et que, selon lui, la multiplication des embryons surnuméraires augmentait les pressions pour autoriser les recherches sur les cellules souches à partir de ce « matériau ».

A ce sujet, l’épiscopat sud-coréen, a rappelé Mgr Chang, n’est pas d’accord avec la « Loi sur la bioéthique et la sécurité », qui encadre les procédures relatives aux recherches sur l’embryon et dans le domaine des biotechnologies (3). Plus précisément, les évêques ne veulent pas que la révision prévue de la loi soit le prétexte à légaliser les recherches sur les cellules souches issues d’embryons. « C’est l’aboutissement de la tendance sociale à tirer profit de la vie que de promouvoir la recherche sur le clonage et les cellules souches embryonnaires, en dédaignant le fait que nous proposons d’autres solutions », peut-on lire dans le communiqué des évêques.

Mgr Francis Xavier Ahn Myong-ok, évêque de Masan, président du Comité de bioéthique de la CBCK, a précisé de son côté que « désormais, les évêques coréens partagent le même souci et s’alarment de la prégnance de plus en plus forte de la culture de mort. Chacun, dans nos diocèses respectifs, nous faisons ce que nous pouvons pour promouvoir une culture de la vie ».