Eglises d'Asie – Népal
A l’occasion de Pâques, des chrétiens rappellent au gouvernement son engagement à garantir la liberté religieuse
Publié le 18/03/2010
Bien qu’à Dharan, les chrétiens aient pris l’habitude, ces dernières années, d’organiser de semblables marches à l’occasion de Pâques, la marche de cette année a revêtu une ampleur spéciale. Elle s’inscrivait en effet entre la décision prise en mai dernier par le Parlement du Népal de transformer le pays de royaume hindou en Etat laïque (1), et les élections prévues pour le 20 juin prochain, où les Népalais seront appelés à désigner une Assemblée constituante qui devra décider de la forme des institutions de ce nouveau Népal.
Des bibles étaient distribuées aux curieux et aux passants qui regardaient la foule des chrétiens défiler en priant et en chantant des cantiques. Parmi les chrétiens, majoritairement protestants, un catholique, Ram Bahadur Barailly, justifiait sa présence en déclarant : « Nous aussi, nous avons des droits. Nos dirigeants doivent nous respecter et nous garantir ces droits ».
L’organisateur de la manifestation, Himal Joseph Rai, a appelé le gouvernement « à remplir les promesses faites aux chrétiens » l’année dernière. Insistant sur le fait que les chrétiens du Népal sont « dévoués à leur pays et prient jour et nuit pour leur nation », qu’ils ont montré qu’ils étaient « prêts à donner leur vie pour leur pays », il a déploré que les chrétiens soient considérés comme « des étrangers ». « Nous ne sommes pas contrôlés à distance par des chrétiens qui vivraient en Angleterre ou aux Etats-Unis, comme certaines personnes mal informées au sein des autorités paraissent le croire », soulignant que la manifestation était organisée par la Société chrétienne de Dharan et celle de Sunsari, du nom du district où se trouve la ville de Dharan.
Pour le P. Augusty Pulickal, curé de l’unique paroisse catholique de Dharan, qui a pris part à la manifestation pour y accompagner une poignée de jeunes paroissiens, les catholiques de Dharan partagent ces revendications mais ont préféré se tenir à l’écart pour célébrer dans le recueillement la liturgie pascale. Selon l’annuaire statistique 2006 de l’Eglise catholique du Népal, sa paroisse compte 142 fidèles, et l’ensemble de la région sud-est du pays – qui comprend les localités de Biratnagar, Damak, Dharan et Sirsia – abrite la moitié des 7 500 catholiques vivant au Népal (2). Le P. Pulickal précise qu’habituellement, les catholiques de la région se rassemblent à Biratnagar, deuxième plus importante ville du Népal, en novembre, pour fêter le Christ Roi de l’univers.
Les chrétiens du Népal jouissent de la liberté religieuse depuis 1991, lorsqu’à l’issue d’un mouvement réclamant la démocratisation, une amnistie fut octroyée par le roi pour tous les détenus enfermés pour cause de religion, tant les « convertis » que les « convertisseurs ». Avant cette date, les changements de religion étaient interdits et le fait de se convertir ou de tenter de convertir était puni de prison ferme. Les activités des catholiques étaient alors très sévèrement restreintes et, le plus souvent, ceux qui souhaitaient être baptisés devaient se rendre en Inde.
En 1991, le jour de Noël fut déclaré jour férié pour tout le pays et la première église catholique inaugurée à Godavari, près de Katmandou. Toutefois, le Parti du Congrès népalais décida que, tout en respectant la liberté religieuse, le pays devait garder son caractère hindou. Les manifestations pro-démocrates de 2006 ont abouti à de nouveaux changements. Le roi a été contraint, le 28 avril 2006, de réunir le Parlement, démis par lui en 2002, et les députés lui ont alors retiré l’essentiel de ses pouvoirs.
Très majoritairement hindou, le Népal abrite toutefois des minorités religieuses – bouddhiste, chrétienne et musulmane –, qui, ensemble, représentent 20 % des 28 millions d’habitants du pays. Selon l’Eglise catholique, les protestants seraient un million.