Eglises d'Asie

Uttar Pradesh : l’Eglise catholique salue la victoire d’une « intouchable » aux élections législatives comme un changement social décisif

Publié le 18/03/2010




Dans l’Uttar Pradesh, la nomination de « l’intouchable » Kumari Mayawati au poste de ministre-président, après la victoire de son parti, le Bahujan Samaj Party (BSP, Parti des masses) aux élections législatives, est perçue par l’Eglise catholique comme un changement social décisif. Le 11 mai dernier, le BSP a remporté la majorité absolue des sièges à l’Assemblée de l’Etat, avec 203 députés sur un total de 406 sièges (1). « Dieu élève les pauvres et les opprimés », cette victoire est un « signe positif » qui montre que l’Etat va « dans la bonne direction », a déclaré Mgr Raphy Manjaly, évêque de Varanasi, une ancienne cité sainte hindoue.

Installée le 13 mai, Kumari Mayawati va désormais diriger cet Etat de 180 millions d’habitants, sans que son parti, qui représente les dalits (« intouchables ») (2), n’ait à conclure des alliances pour former une majorité. C’est une première dans cet Etat du nord de l’Inde qui fait partie des régions les plus pauvres du pays et où la scène politique est encore grandement tributaire des questions liées à l’appartenance de castes. Toutefois, Mme Mayawati doit son succès à une campagne qui n’a pas été menée exclusivement en faveur des dalits. Défiant les sondages et les analyses de nombreux observateurs, elle a réussi à former une puissante alliance entre les « intouchables » et les brahmanes, ces derniers étant marginalisés dans la politique de l’Etat depuis une vingtaine d’années, malgré leur place privilégiée en haut de l’échelle des castes. Pour le P. Joseph Neetibhai, prêtre de l’Indian Missionary Society, à Varanasi (Bénarès), l’Eglise a beaucoup à apprendre de la stratégie d’unité utilisée par la présidente du BSP, qui, malgré les différences de castes et de religion, a réussi à réunir les électeurs autour d’un projet.

« La victoire de Mayawati a le potentiel pour déclencher une nouvelle révolution sociale en Inde », a commenté Chandra Bhan Prasad, un analyste politique indien. Le clergé œuvrant au développement économique et social des « intouchables » dans les villages reculés de l’Etat y voit pour sa part « une indication claire » que les dalits ne peuvent plus être ignorés, qu’ils ont dorénavant du poids dans les structures politiques décisionnelles ; cette situation permet également de « renouveler le débat politique ». De son côté, Mgr Manjaly espère que le parti au pouvoir mènera une politique de développement économique et social efficace en faveur des classes les plus défavorisées.

Mme Mayawati, dont les mandats précédents n’ont pas toujours laissé des bons souvenirs (3), devra cependant faire preuve de fermeté et de compétence pour sortir cet Etat du sous-développement dans lequel il se trouve. « Nous ferons de l’Uttar Pradesh un Etat libéré de l’injustice et du crime », a-t-elle promis (4). En attendant l’heure des réformes, des milliers de familles ont retrouvé l’espoir d’un avenir meilleur en matière d’emploi et d’éducation, du fait de la victoire de leur behanji (sœur).