Eglises d'Asie

Maharashtra : la conversion au bouddhisme de 50 000 dalits hindous est une réaction de révolte contre le système des castes, indiquent des responsables chrétiens

Publié le 18/03/2010




Le 27 mai dernier, à Mumbai (Bombay), 50 000 dalits et aborigènes appartenant à des ethnies nomades se sont convertis au bouddhisme, lors d’une grande cérémonie organisée par un parti politique, le Parti républicain de l’Inde. En se convertissant, ils comptent échapper aux préjugés et aux discriminations dont ils sont victimes en tant qu’hindous placés tout en bas du rigide système des castes qui caractérisent encore en partie la société indienne (1). Tels sont les arguments mis en avant par Ramdas Athavale, président du Parti républicain de l’Inde, pour justifier la cérémonie de conversion.

Un autre organisateur de la manifestation, Laxman Mane, a expliqué que, soixante ans après l’indépendance et l’abolition officielle du système des castes, il était inacceptable que la grande majorité des dalits et des aborigènes demeure très peu formée. « Retourner chez vous, forts de vos rêves, et envoyez vos enfants à l’école », a-t-il déclaré à la foule des nouveaux convertis.

Commentant cet événement pour l’agence Ucanews (2), Mgr Agnelo R. Gracias, évêque auxiliaire de Bombay, a estimé que ces conversions étaient l’expression de la révolte des dalits et des aborigènes et le reflet de leur lutte pour la dignité et l’égalité. Il a rappelé que la première conversion en masse de dalits remontait à 1955 lorsque la figure emblématique de l’émancipation des dalits, B. R. Ambedkar, a embrassé le bouddhisme en même temps que 200 000 autres de ses frères « intouchables ». Toutefois, a noté l’évêque, si ces conversions en masse sont menées au nom de la promotion humaine de ceux qui sont au plus bas de l’échelle sociale indienne, il est impossible de ne pas remarquer que ces conversions revêtent une couleur « politique ». Les élections législatives de 2009 se profilent à l’horizon et certains partis politiques cherchent à se construire une base électorale forte (3).

Mgr Thomas Dabre, évêque de Vasai, diocèse voisin de celui de Bombay, voit bien le caractère de « révolte naturelle » que revêt une telle cérémonie de conversion, mais il dit sa désapprobation face à un changement de religion qui ne s’accompagnerait pas d’une « conversion intérieure ». « Face à de telles foules qui décident ensemble de changer de religion, on peut se poser la question de la réalité spirituelle de leur conversion », précise-t-il.

Du côté des responsables politiques du Maharashtra, Abraham Mathai, vice-président de la Commission pour les minorités de l’Etat, ces conversions de masse sont autant un acte « politique » qu’une « noble affirmation de la liberté de conscience ».

Enfin, pour les leaders de l’extrême droite hindoue, de telles conversions ne sont pas mal vues car « le bouddhisme faisant partie de l’hindouisme et de la culture indienne, ces personnes ne quittent pas » le monde hindou. Un porte-parole du Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS, Corps national des volontaires), l’organisation qui chapeaute cette extrême droite, diminue la portée de telles conversions, affirmant ne voir là qu’un « truc de politiciens ».