Eglises d'Asie – Indonésie
A Djakarta, des chrétiens ont débattu avec le Front des défenseurs de l’islam des fermetures contraintes de lieux de culte
Publié le 18/03/2010
Le président du FPI, Al-Habib Muhammad Rizieq Syihab, avait fait le déplacement et s’est déclaré « très heureux d’être aux côtés de protestants et de catholiques pour construire le dialogue et la compréhension mutuelle ». Au-delà des formules de politesse, le débat s’est concentré sur le problème de la fermeture contrainte de lieux de culte chrétiens au motif qu’ils ne répondent pas aux règlements en vigueur en la matière.
« Nous sommes forcés de fermer des églises parce qu’elles n’ont pas de permis en bonne et due forme et ne répondent pas aux critères posés par le décret de 2006 », a déclaré le leader islamiste, en référence à la nouvelle mouture, parue en 2006, du décret de 1969 régissant la construction des lieux de culte en Indonésie (1). Il a ajouté qu’il était « naturel » que « tous les croyants soient en mesure de pratiquer leur culte ». A condition toutefois qu’ils « n’enfreignent pas la législation ». « Nous devons obéir aux décrets en vigueur », a-t-il encore précisé, notant que, dans le quartier où il vit, les chrétiens pratiquent leur religion sans difficulté « car leurs églises ont été construites avec les permis nécessaires ».
Interrogé sur les fermetures de lieux de culte par les hommes du FPI ou appartenant à d’autres organisations extrémistes, Al-Habib Muhammad Rizieq Syihab n’a pas nié qu’il avait assisté à certaines de ces actions. Le sujet étant devenu, ces dernières années, une affaire délicate en Indonésie, il n’a pas voulu répondre à la question de l’incongruité à voir un groupe privé, tel le FPI, se charger de l’application de la loi. Il s’est contenté de dire qu’il était « du devoir des chrétiens de vérifier qu’ils pratiquaient leur culte dans des lieux pourvus des autorisations adéquates ».
Aucun prêtre catholique n’a pris part à la rencontre et seuls quelques pasteurs protestants étaient présents. Selon son organisateur, le Rév. Shepard Supit, de l’Indonesian Bethel Church, une telle rencontre a pour objet de renforcer l’harmonie et la compréhension mutuelle. Il n’a pas caché que de nombreux pasteurs lui avaient déconseillé d’organiser pareille rencontre. « Mais je tiens à dialoguer avec [le FPI] car nous devons améliorer notre attitude envers les autres croyants afin de désarmer les suspicions », a-t-il expliqué. Il a ainsi appelé les chrétiens à ne pas se laisser aller à des provocations et il a cité à cet effet avoir récemment vu un portrait de Jésus formé de lettres arabes.
Reprenant la parole pour commenter ce terme de « suspicions », le leader du FPI a déclaré que, pour lui et les autres musulmans, il n’y avait autrefois pas de problème à envoyer leurs enfants étudier dans des écoles chrétiennes, « mais, aujourd’hui, les musulmans soupçonnent les écoles chrétiennes de forcer leurs élèves à participer au culte chrétien ».
Theophilus Bela, un catholique membre du Comité indonésien sur la paix et la religion, a, à son tour, expliqué que l’Eglise catholique se donnait pour ligne de conduite le service de tous, au sein de la société. A titre d’exemple, il a cité l’aide humanitaire apportée par certains services de l’Eglise qui « aident à l’organisation de circoncisions en masse pour les jeunes garçons de familles démunies ». En Indonésie, les jeunes musulmans sont circoncis lorsqu’ils arrivent à la puberté.
La rencontre s’est conclue sur la décision d’organiser de tels échanges tous les mois.