Eglises d'Asie

Bihar : un évêque catholique déplore une « culture de cupidité » parmi les victimes des inondations

Publié le 18/03/2010




Dans l’Etat du Bihar, particulièrement affecté par les inondations dramatiques de ces dernières semaines, Mgr Victor Henry Tharuk, évêque de Bettiah, a condamné et déploré une « culture de cupidité » parmi les victimes. Dans plusieurs localités, les manifestants qui protestaient contre les retards de l’aide gouvernementale ont eu recours à la violence. Pour le prélat, ceux qui n’avaient pas besoin de secours en voulaient davantage et c’est « ce qui a déclenché des situations de violence », s’est-il désolé.
Cette année, les inondations ont touché une grande partie de la région nord de l’Etat, contraignant des milliers de personnes à fuir. Selon Manoj Srivastava, commissaire des catastrophes naturelles de l’Etat, le gouvernement a fourni 50 kg de blé, 50 kg de riz et 200 roupies (3,6 euros environ) à chaque famille sinistrée, ce que ces dernières ont démenti. Différentes manifestations ont alors été organisées ; certaines ont dégénéré en violences, notamment à Bettiah, Begusarai, Madhubani, Sahrasa, Samastipur et Sugauli, où elles ont été réprimées à coups de bâton par la police.

 

Le 11 août dernier, dans le district de Champaran-Ouest, certains manifestants ont détenu des volontaires chrétiens, dont un responsable de la Caritas India, Kanichukumnair Raphael, afin de leur soutirer des vivres. Interrogé par l’agence Ucanews le lendemain des faits, ce dernier a précisé que plus d’une centaine de personnes dont des femmes, les avaient encerclés et menacés « de terribles conséquences sils ne leur donnaient pas du riz et des légumes secs ». L’équipe s’apprêtait à quitter le village après avoir distribué riz et haricots à 400 familles inscrites sur les listes dressées par les responsables de l’association catholique, lorsque des manifestants d’un autre village les ont pris à partie, jusqu’à ce que des responsables locaux interviennent pour délivrer l’équipe.

 

Kanichukumnair Raphael a toutefois confié avoir remarqué « des désordres et du favoritisme » dans les listes dressées par l’équipe locale. « Il est possible que certains protestataires méritaient dêtre davantage secourus que dautres pourtant notés sur les listes. Mais nous sommes obligés, daprès les règlements de Caritas, de suivre ces listes préétablies », ajoutant qu’il se demandait si des bénévoles chargés de constituer les listes avaient pu favoriser des proches et des gens de leurs communautés. « Ils ont ainsi pu laisser de côté un certain nombre de victimes réellement dans le besoin. Cest vraiment regrettable. Jai demandé aux autorités de lEglise locale de faire cesser de telles injustices », a-t-il expliqué. Le P. Sumit Menezes, membre de la commission organisatrice des secours, a reconnu que certains disfonctionnements avaient pu avoir lieu. Pour assurer l’équité, a-t-il dit, la commission devra dorénavant choisir des volontaires venus d’ailleurs, quand il s’agira de vérifier les listes.

 

Mgr Thakur, interrogé sur la nécessité d’aider les victimes des inondations, a fait remarquer que personne n’était mort de faim ces dernières années. « Les gens meurent daccidents de bateau, de morsures de serpent ou de maladie, mais pas de faim », a-t-il déclaré aux journalistes, se disant également étonné que les ONG étrangères préfèrent apporter des secours d’urgence plutôt que de favoriser des programmes de développement à long terme auprès de ces populations. Il souhaite d’ailleurs que ces organismes aident les communautés de base sinistrées par l’intermédiaire de programmes de formation et de prévention afin que « les habitants des régions inondables sachent deux-mêmes y faire face ». « Il nous faut des gens debout et non des mendiants. Cest là le cœur même de la charité chrétienne », a-t-il conclu.

 

En Asie du Sud, depuis le début du mois de juin, on compte au moins 2 200 personnes décédées et 30 millions de sinistrés, soit le double du bilan de l’année 2006, selon l’UNICEF.