Eglises d'Asie

Les évêques catholiques recommandent aux Philippins d’accepter le verdict condamnant l’ancien président Estrada à la réclusion à perpétuité pour détournement de fonds publics

Publié le 18/03/2010




« Coupable au-delà de doutes acceptables. » Tel est le verdict prononcé le 12 septembre dernier par le tribunal anti-corruption qui a condamné l’ancien président Joseph Estrada à la réclusion à perpétuité pour le détournement de plus de 57 millions d’euros de fonds publics. Dans un communiqué délivré le même jour, Mgr Angel Lagdameo, archevêque de Jaro et président de la Conférence épiscopale des Philippines, a invité les Philippins à « respecter » le verdict comme « un jugement humain rendu par un tribunal humain habilité à examiner ce cas ».

Fort de sa notoriété d’acteur du cinéma philippin, Joseph Estrada a été élu président de la République en 1998. Souvent très populaire dans les milieux les plus pauvres du fait de ses origines modestes et ses différents rôles de « gentil », « Erap » (1) a continué de jouir, malgré les scandales financiers qui ont éclaté en 2000, d’une large popularité chez les plus démunis (2).

Pour Mgr Lagdameo, ce verdict est un appel à la « repentance » et au « changement », non seulement pour Estrada mais également pour « de nombreuses hautes personnalités du gouvernement et de la politique », car, selon lui, la décision du tribunal anti-corruption est bénéfique au pays qui souffre « de toutes sortes de pots-de-vin, de détournement de fonds et de pillages ». « Nous prions pour qu’Estrada dispose de la force spirituelle nécessaire, car la divine miséricorde peut encore quelque chose pour lui », a-t-il ajouté.

Renversé en 2001 par une révolte populaire soutenue par l’armée – baptisée People Power II en référence aux manifestations qui aboutirent à la chute du dictateur Ferdinand Marcos –, Joseph Estrada, qui pendant tout le procès a clamé son innocence, s’est effondré en entendant le verdict du 12 septembre dernier. Dénonçant « une farce » et criant « au complot », il a déclaré que « ce tribunal spécial a été conçu pour me condamner […]. Comme nous nous y attendions, c’est ce qu’il a fait ». Agé de 70 ans, il est assigné à résidence jusqu’à nouvel ordre. Le tribunal anti-corruption de Manille a également exigé la restitution à l’Etat des quelque 87 millions de dollars d’avoirs, gelés dans des banques. Maître Rufus Rodriguez, avocat du président déchu, a annoncé qu’il fera appel de la décision.

Pour des journalistes philippins, ce verdict est « historique » car c’est la première fois qu’un président philippin est condamné dans une affaire de corruption. Ferdinand Marcos avait, pour sa part, fui à Hawaï et réussi à éviter tout procès.