Eglises d'Asie

Mindanao : l’évêque de la préfecture apostolique d’Isabela appelle à une trêve des combats pendant le ramadan

Publié le 18/03/2010




« Nous ne souhaitons pas de combat pendant la période sacrée du ramadan pour nos frères musulmans. » A l’extrême sud-ouest de Mindanao, sur l’île de Basilan, Mgr Martin Jumoad, évêque de la préfecture apostolique d’Isabela, a, dans sa dernière lettre pastorale, appelé à une trêve des combats, pendant le mois du ramadan qui a débuté le 13 septembre dernier, dans cette région ensanglantée par les conflits. Le 2 septembre, son message a été lu dans les huit paroisses du territoire. Sur cette petite île, 27 % de la population est catholique, le reste des habitants étant de religion musulmane.

Mgr Martin Jumoad a également demandé aux deux parties au conflit, le MILF (Front Moro islamique de libération) et l’armée philippine, de « mettre en pratique l’accord de paix dès aujourd’hui », en « mettant leur fierté de côté », car la justice ne peut prévaloir sans la paix. « Permettez-nous de pouvoir encore respirer l’air de la paix et de la liberté, ici, à Basilan », a-t-il imploré.

Interviewé par l’agence Ucanews, le préfet apostolique d’Isabela a expliqué avoir rédigé cette lettre pastorale à la demande du clergé et des religieux qui souhaitaient « aider à soulager la population de son anxiété ». Réunis pour une journée de réflexion le 29 août dernier, 20 prêtres, dont 13 prêtres diocésains, ainsi que 28 religieuses et un frère travaillant dans la préfecture, ont échangé sur les dernières offensives militaires (1) et sur leurs conséquences pour les civils : 15 000 personnes ont été déplacées, certaines d’entre elles contraintes de se réfugier dans les écoles, privant ainsi les enfants de leurs lieux d’enseignement et exacerbant par la même occasion « les tensions ».

Pour Mgr Jumoad, le fait que les militaires ne respectent pas la période du ramadan a « provoqué beaucoup de haine, de ressentiment et de peur parmi les habitants, quelle que soit leur religion ». Des rumeurs circulent notamment sur d’éventuels incendies d’églises, de nouvelles prises d’otages (2) et sur des assassinats de catholiques.

Mais la guerre n’est pas seulement désastreuse pour les familles des soldats ou les civils, elle l’est également pour l’économie locale et nationale, du fait de son coût – un milliard de pesos par mois (15,5 millions d’euros). Selon Social Watch Philippines-Mindanao, ces offensives militaires ne font que retarder l’éradication de la pauvreté, dans l’une des régions les plus pauvres des Philippines. D’après Mgr Jumoad, avant les élections législatives de mai dernier, des politiciens « gourmands » et « aveuglés par leur intérêts égoïstes » ont fait livrer des armes à feu par centaines, afin de constituer leurs « propres armées », augmentant ainsi les menaces contre la vie des habitants. Dans sa lettre, le préfet apostolique a également demandé aux médias d’« être responsables » et de ne pas faire preuve de « sensationnalisme » qui contribue à semer encore davantage de peurs.