Eglises d'Asie

Deux évêques catholiques de Mindanao ont présenté leurs griefs devant le Parlement britannique au sujet de l’exploitation minière des firmes multinationales aux Philippines

Publié le 18/03/2010




Invités par le P. Franck Nally à intervenir devant une commission d’enquête du Parlement britanni-que (1), deux évêques catholiques philippins de la région de Zamboanga del Norte, sur l’île méridiona-le de Mindanao, ont, le 17 septembre dernier, présenté leurs griefs sur les conséquences de l’activité minière des firmes multinationales installées aux Philippines, notamment des sociétés britanniques.

Mgr Dinualdo Guttierez, évêque de Marbel et président de la Commission épiscopale pour l’action sociale de la Catholic Bishops’ Conference of the Philippines (CBCP), ainsi que Mgr Juan de Dios Pueblos, évêque de Butuan, ont appelé les membres de la Commission d’enquête présidée par Clare Short (2) à faire « cesser » les investissements « destructeurs » de l’industrie minière. La présence des deux évêques au Parlement britannique visait à vérifier des plaintes selon lesquelles les sociétés minières se dérobent à leurs obligations en matière de respect de l’environnement et de droits des populations autochtones.

Selon les données officielles du Philippine Mines and Geosciences Bureau (MGB), 23 sites d’exploita-tion minière sont actifs dans le pays, la majorité des sites appartenant à des firmes étrangères. Donnant des exemples concrets, Mgr Guttierez a évoqué le rassemblement, en mai dernier, de plus de 8 000 personnes devant le siège local de Xstrata, une firme anglo-suisse d’exploitation minière, installée à Tampakan, dans la province de Cotabato. Les habitants de la région entendaient protester contre les conséquences dévastatrices de l’exploitation minière qu’ils subissent de manière quotidienne.

Depuis 2004, TVI, une firme canadienne, extrait de l’or et de l’argent sur le mont Canatuan, dans la province de Zamboanga del Norte. Selon les statistiques du MGB, en 2006, TVI a extrait un peu plus de 1,5 tonne d’or, pour un montant estimé à 1,4 milliard de pesos (22 millions d’euros). La situation des communautés de cette région fait partie des cas ayant subi des « dégradations écologiques », évoquées par les deux évêques à Londres.

Les pêcheurs de la région se plaignent notamment que, depuis le début des opérations minières, ils attrapent beaucoup moins de poissons du fait de la pollution de la rivière dans laquelle sont déversés des déchets miniers. De plus, la population, particulièrement les enfants, a développé différents symptômes, tels des douleurs, des allergies épidermiques ou des maladies dermatologiques. Paradoxalement, le site internet de la firme TVI déclare construire des centres de tri pour déchets, organiser des contrôles de qualité des eaux, utiliser des méthodes de contrôle de l’érosion et œuvrer pour la reforestation dans les lieux où elle opère.

En 2004, différents groupes chrétiens en lien avec la population locale ont créé l’association Save Siocon Paradise Movement, après avoir constaté les dégâts résultant de l’extraction minière. Pour le président de cette association, la nature est « sacrée » car la vie des populations locales en dépend.

En janvier 2006, la CBCP avait déjà souligné que le problème numéro un qui se posait dans certaines régions, en particulier à Mindanao, était celui de l’industrie minière. Les évêques philippins avaient alors demandé l’aide de la communauté internationale pour faire prévaloir les droits des peuples autochtones (3). Trente-deux évêques avaient signé une déclaration évoquant leurs préoccupations quant aux conséquences écologiques et sociales désastreuses de cette industrie, demandant également l’abrogation du Mining Act de 1995 (4), qui autorise les firmes étrangères à exploiter les sol et sous-sol philippins.