Eglises d'Asie – Philippines
A Mindanao, l’Eglise catholique réaffirme le rôle important des communautés chrétiennes de base et leur promet un plus grand soutien
Publié le 18/03/2010
Aux Philippines – et notamment à Mindanao – comme dans un certain nombre d’autres pays d’Asie du Sud-Est, les Communautés chrétiennes de base (BEC, Basic Ecclesial Communities) sont au cœur de la vie et de l’action de l’Eglise catholique. Réunies au sein d’une BEC, des familles catholiques d’une même paroisse ou d’un même quartier se réunissent régulièrement pour un partage d’Evangile, pour prier, ou organiser des actions caritatives. Selon la vision d’une « Eglise participative » définie en 1991 lors du second concile plénier de l’Eglise des Philippines, les BEC s’efforcent de refléter la communauté des débuts, celle de Jérusalem.
Avec pour thème la « Restauration des valeurs morales à travers les BEC », ce treizième rendez-vous de la MSPC s’était donné pour objectif de dresser un bilan sur ces communautés et de répondre aux problèmes qu’elles ont rencontrés ces derniers temps. Les 208 évêques, prêtres, religieux et responsables laïques ont souligné « l’importance des BEC comme lieux et foyers stratégiques pour une évangélisation intégrale », promettant de soutenir cette structure de base, « catalyseur du renouveau moral dans l’Eglise et la société ». A propos des valeurs morales ayant cours dans la société actuelle, une sociologue de l’université jésuite de Cagayan de Oro City a présenté une synthèse des réponses données par les BEC à un questionnaire. Il ressort que les catholiques à Mindanao fixent leurs critères moraux à partir de l’Evangile. Une action est ainsi qualifiée de « bonne » lorsque ceux qui la mènent « suivent la volonté de Dieu ». Le mal est présent dès lors qu’« on agit égoïstement ». Parmi les figures du mal, des membres des BEC placent les prêtres qui agissent de manière « dictatoriales », ceux qui pèchent par « la faiblesse de leur témoignage et de leur honnêteté », ceux qui ne sont pas « impliqués » dans les BEC ou qui « sont occupés par leurs propres vices ». A la source du mal, les membres des BEC désignent « l’absence d’attention pour les pauvres », un traitement préférentiel pour « les riches », « le silence » et « la passivité » face à l’injustice, ou bien encore de ne pas agir en chrétien ou « de ne pas s’impliquer dans l’Eglise ». En conclusion, la sociologue a mis en avant le fait que pour les membres des BEC, les dilemmes moraux peuvent être résolus à condition de « revenir à Dieu par les BEC » et de « suivre les dix commandements ».
Au premier jour de la conférence, Mgr Wilfredo Manlapaz, évêque de Tagum, qui a rappelé que les premières BEC de son diocèse ont été mises en place en 1968, a dressé un tableau « des lumières et des ombres », des points forts et des faiblesses de ces structures d’Eglise.
Evoquant les « ombres » et les problèmes à résoudre, Mgr Manlapaz a cité un rapport reprochant à certaines BEC de se montrer « plus catholiques que le pape » dans leur façon d’être, allant jusqu’à refuser le baptême ou le mariage aux personnes ne s’investissant pas suffisamment dans les activités paroissiales. « Nous devons tempérer l’application des règles et des principes des BEC, notamment dans leur tendance à s’autogérer », a-t-il recommandé.
Du côté des « lumières », l’évêque de Tagum a souligné que si les vocations sacerdotales étaient si nombreuses depuis vingt ans, c’était sans doute grâce aux BEC. Dans son diocèse, de 1984 à aujourd’hui, le nombre de prêtres est ainsi passé de 30 à 108. D’une poignée de BEC en 1976, on est passé à plus de 2 000 aujourd’hui et, dans les lieux éloignés des centres paroissiaux, les laïcs, dans le cadre des BEC, organisent des assemblées dominicales en l’absence de prêtre et distribuent la Communion. Un autre résultat notable a été la mise en place d’actions militantes contre l’exploitation abusive des forêts, des ressources minières ou bien encore contre la consommation de drogues, la pratique de l’avortement ou la contraception. Un représentant d’une BEC située dans la province de Zamboanga del Norte a expliqué que ce travail au plus près du terrain avait permis de développer un esprit de « coopération », non seulement entre les catholiques mais aussi avec les autres croyants, notamment les musulmans. A Mindanao, quatre millions de musulmans vivent aux côtés d’environ 14 millions de chrétiens et d’animistes.
Signe du soutien de l’épiscopat philippin pour les BEC, Mgr Orlando Quevedo, archevêque de Cotabato, a été nommé président du Bureau national des BEC, rattaché à la Conférence des évêques, avec pour mission « d’animer et soutenir les BEC, de coordonner leurs activités au plan national et de renforcer les liens entre les BEC et les commissions de la Conférence épiscopale ».