Eglises d'Asie

Deux chrétiens vietnamiens cités comme « témoins de l’espérance » par le pape Benoît XVI dans l’encyclique Spe Salvi

Publié le 18/03/2010




Dans la récente encyclique du pape Benoît XVI, Spe Salvi, parue le 30 novembre dernier, l’espérance, qui en est le thème central, est mise en valeur sur deux registres différents qui s’entremêlent. D’une part à travers une réflexion aussi bien théologique que philosophique, quelquefois ardue, l’espérance est associée aux fondements mêmes de la foi. D’autre part, dans la partie où le pape traite de ce qu’il appelle des « lieux d’apprentissage et d’exercice de l’espérance », des passages plus accessibles contenant des exemples tirés de l’histoire du christianisme montrent aux lecteurs comment cette vertu cardinale a imprégné et animé la vie de certains témoins. Dès la parution de l’encyclique, beaucoup de membres de l’Eglise du Vietnam ont été émus et se sont réjouis en constatant que le pape avait choisi de citer parmi ces témoins de l’espérance deux chrétiens vietnamiens, le cardinal François-Xavier Nguyên Van Thuân, décédé en 2002, dont le procès de béatification vient d’être introduit (1) et saint Paul Lê Bao Tinh, martyrisé en 1857 dans la province de Nam Dinh et canonisé en 1988 par le pape Jean-Paul II avec 116 autres martyrs.

C’est à propos de la prière, comme école de l’espérance, que Benoît XVI évoque la figure de « l’inoubliable cardinal Nguyên Van Thuân ». Pour montrer comment la prière permet de vivre l’espérance dans les situations les plus désespérées et dans l’isolement le plus complet, le pape rappelle les épreuves du cardinal, ses treize années d’internement, et souligne le rôle joué par la prière pour transformer la signification d’une vie. « Durant treize années de prison, dans une situation de désespoir apparemment total, l’écoute de Dieu, le fait de pouvoir lui parler, deviennent pour lui une force croissante d’espérance qui, après sa libération, lui a permis de devenir pour les hommes, dans le monde entier, un témoin de l’espérance – de la grande espérance qui ne passe pas, même dans les nuits de la solitude » (2). Le pape évoque alors un petit livre de prières, composées en prison par le cardinal et apprises par cœur : Prières d’espérance. L’ouvrage fut traduit en français et publié en juin 1998. Cet écrit avait été précédé par un autre, rédigé durant les premiers jours de sa détention : Sur le chemin de l’espérance. Un peu plus loin, l’encyclique cite un passage sur la prière du dernier livre du cardinal, Témoins de l’espérance, qui reprend le texte des conférences prononcées par Mgr Thuân devant Jean-Paul II et des membres de la Curie lors d’exercices spirituels au Vatican. Quelques semaines avant la parution de l’encyclique, Benoît XVI avait déjà évoqué la vie dramatique et la personnalité du cardinal, en annonçant, le 17 septembre dernier, l’ouverture de son procès de béatification, cinq ans après sa mort.

Le second catholique vietnamien évoqué par Benoît XVI a vécu 200 ans plus tôt, à l’époque des martyrs. Il s’agit de saint Paul Lê Bao Tinh, prêtre martyrisé en 1857. Le pape cite de lui une lettre (3), écrite en latin, de sa prison. Le texte se trouve dans les lectures du bréviaire. Le futur martyr y décrit l’ambiance abjecte à tous les points de vue qui règne dans sa prison. « Moi, Paul, lié de chaînes pour le Christ, je veux vous raconter les tribulations dans lesquelles je suis… Cette prison est vraiment une vive figure de l’enfer éternel. Aux liens, aux cangues et aux entraves, viennent s’ajouter des colères, des vengeances, des malédictions… Au milieu de ces tempêtes, je jette une ancre qui va jusqu’au trône de Dieu ; c’est l’espérance qui vit toujours en mon cœur » (3). Dans son commentaire, le pape rapproche cet enfer d’un camp de concentration et souligne la force de l’espérance capable de transformer en profondeur ce qui en surface apparaît comme une émanation du mal.

Paul Lê Bao Tinh est né en 1793, dans le village de Trinh Hà, actuel diocèse de Thanh Hoa. La lettre citée par le pape est datée du 20 avril 1843 et est adressée au séminaire de Kê Vinh. Elle a été écrite lors d’un premier séjour de six ans en prison (1841-1847), où il s’était montré inflexible malgré les tortures et les condamnations à mort. Ordonné prêtre à sa sortie de prison, il sera de nouveau arrêté en 1857 et sera martyrisé le 6 avril 1857, à Bây Mâu, dans la province de Nam Dinh.