Eglises d'Asie

Hung Hoa : les autorités empêchent la célébration de Noël dans une église de Son La et arrêtent un prêtre pendant quelques heures

Publié le 18/03/2010




Comme chaque année à l’occasion de Noël, surtout dans les régions montagneuses du nord-ouest du Vietnam, des initiatives intempestives des autorités locales sont venues troubler, ou même empêcher les célébrations des fêtes de la Nativité. Ce fut le cas, le jour de Noël, pour une paroisse de Son La, dans le diocèse de Hung Hoa, frontalier du Laos et de la Chine. Le curé, le P. Joseph Nguyên Trung Thoai, alors qu’il se rendait dans la paroisse de Co Noi, pour y célébrer la messe dans la matinée de Noël, a été arrêté par la Sécurité locale et conduit dans les locaux du Comité populaire municipal. Il a ensuite été libéré en début d’après-midi grâce à l’intervention de quelque 500 de ses paroissiens.

Un témoin direct a rapporté le déroulement des faits à l’agence Vietcatholic News (1). Le prêtre avait déjà célébré une première Eucharistie à huit heures du matin et avait pris la route en direction de Co Noi pour une seconde célébration. Il était attendu à un carrefour par des agents de la circulation épaulés par des agents de la Sécurité publique. Sous prétexte de vérification de papiers, il fut conduit dans les locaux du Comité populaire de la commune, qui, pour la circonstance, étaient protégés par de nombreux policiers. Ne voyant pas venir le célébrant à l’heure prévue pour l’Eucharistie, les paroissiens de Co Noi ne tardèrent pas à alerter les catholiques de toute la région qui accoururent en grand nombre, à pied et par toutes sortes de moyens de transport, et se rassemblèrent devant les portes du Comité populaire. A l’intérieur des locaux du comité, le P. Thoai se voyait intimer l’ordre de rentrer chez lui et de ne plus exercer son ministère sur le territoire du district concerné et dans l’agglomération de Son La. Le prêtre s’y refusa, affirmant qu’en tant que citoyen du Vietnam et selon la Constitution du pays, il avait le droit de se déplacer sur le territoire de Son La et d’y exercer son ministère. Aucun des cadres de la police ne parvint à le convaincre à s’en retourner chez lui.

 

A l’extérieur, trois rangées de policiers et de militaires armés de fusils mitrailleurs, appartenant à des unités différentes, entouraient le siège du Comité. Face à eux, dans une foule d’environ 500 personnes, la tension montait et l’on entendait des cris, des pleurs, des interpellations directement adressées à la police. Devant le refus des protestataires d’obéir aux injonctions de la police leur demandant de se disperser, les responsables de la Sécurité demandèrent au prêtre de leur dire qu’il n’était pas arrêté mais invité à un repas, ce à quoi celui-ci se refusa… En fin de compte, le responsable du district qui avait mené jusque-là l’interrogatoire du prêtre, l’a confié à deux policiers qui le ramenèrent chez lui… à temps pour célébrer une messe prévue dans l’après-midi.

 

Ce n’est pas la première fois que de tels incidents se produisent dans la région. Au mois de juin 2006, un rassemblement de fidèles similaire avait eu lieu à Môc Châu, près de là, après qu’on eut annoncé l’arrestation du P. Thoai.

 

Menée par des missionnaires français, l’évangélisation des régions montagneuses de Son La et de Lai Châu a débuté aux environs de 1939. La population catholique déclarée est aujourd’hui d’environ 3 000 personnes, sans tenir compte de ceux qui ne se déclarent pas comme tel, en raison des persécutions locales. Deux mille catholiques sont d’ethnie vietnamienne. Un millier appartient à la minorité Hmong. Avant la parution de l’Ordonnance sur les croyances et la religion de 2004, les catholiques vietnamiens de la région pratiquaient leur foi d’une manière très discrète, en raison des sévères interdictions de l’époque. Aux grandes fêtes, ils revenaient dans leurs paroisses d’origine pour recevoir les sacrements. A la fin de l’année 2005, les catholiques de Son La déposèrent une demande d’enregistrement de leur communauté, comme l’imposait la nouvelle ordonnance. Cependant, depuis cette époque, les autorités locales refusent d’accepter les prêtres envoyés par l’évêché de Hung Hoa, sous prétexte qu’« il n’y a pas de besoins religieux dans la région ». Cette interdiction des activités religieuses catholiques semble surtout viser les minorités ethniques de la région. Les catholiques vietnamiens en subissent le contrecoup.