Eglises d'Asie

Les chrétiens de Hanoi continuent de prier pour la récupération de l’ancienne Délégation apostolique, alors que la réponse du gouvernement reste incertaine

Publié le 18/03/2010




Aucune réponse officielle n’a été donnée aux requêtes de la communauté catholique de Hanoi concernant terrains et bâtiments de l’ancienne Délégation apostolique, aujourd’hui encore accaparés par l’Etat (1). Certains gestes du gouvernement laissant penser que cette réponse pourrait être positive ont été suivis de déclarations présupposant le contraire. Aussi bien, dans le cadre de la campagne menée par la communauté paroissiale de la cathédrale pour récupérer cette propriété de l’Eglise, comme l’avait affirmé l’archevêque de Hanoi dans une interview à la BBC, « les fidèles continuent de prier… ». Les manifestations, sous forme de veillées de prière, se poursuivent.

La dernière a eu lieu le 10 janvier. En fin de matinée, une procession-surprise a emprunté les artères de la capitale. Aux environs de midi, à l’issue d’une messe célébrée à la cathédrale, à l’occasion de l’anniversaire du cardinal Tung, aujourd’hui retraité, une procession improvisée, précédée d’une croix, s’est engagée dans les rues, en direction des bâtiments de la Délégation apostolique. Elle était composée d’environ un millier de personnes. En l’absence d’agents de la Sécurité, non prévenus de l’événement, ce déplacement a créé, pendant un moment, un certain désordre dans la circulation, particulièrement dense à cette heure-là. Tout est rentré dans l’ordre dix minutes plus tard et l’assemblée a prié pendant une demi-heure devant la statue de la pietà (2).

 

Après la vigoureuse lettre pastorale de l’archevêque de Hanoi (3) appelant les fidèles à la prière pour la récupération d’une propriété d’Eglise, le transport d’une statue de la pietà devant l’ancienne Délégation apostolique et les diverses manifestations religieuses qui ont suivi, une démarche inattendue du gouvernement vietnamien avait surpris les catholiques de la capitale, laissant augurer une issue positive du conflit. Dans la matinée du 30 décembre, alors que les fidèles étaient encore sur les lieux, le Premier ministre Nguyên Tân Dung est venu rendre une visite inopinée à l’archevêque, Mgr Ngô Quang Kiêt, pour s’entretenir quelques instants avec lui. Puis, en sa compagnie, il s’est rendu sur les lieux où de nombreux fidèles étaient rassemblés. Pour le moment, cette visite, dont les médias officiels n’ont fait aucune mention et sur laquelle l’archevêque n’a rien révélé, est restée sans lendemain. On ne sait encore s’il s’agit là d’une intervention destinée à désamorcer la tension régnante, ou du début d’une solution positive.

 

Une expression – « il n’est pas question de rendre » –, employée par le directeur du Bureau des Affaires religieuses, Nguyên Thê Doàn, dans une interview recueillie le 31 décembre 2007 par la BBC (émissions en langue vietnamienne) (4), a beaucoup irrité la communauté des catholiques. Il est vrai que ces termes sont contenus dans une déclaration très peu claire, que l’on pourrait ainsi traduire en français : « En réalité, il n’est pas question de rendre quelque chose qui m’appartiendrait ou qui vous appartiendrait. Le fait, de la part des religions, d’utiliser ce mot ‘rendre’ ne crée pas la sympathie entre les deux parties. Il n’est question ni de rendre, ni d’exiger. » Le responsable a ensuite expliqué que, selon la loi vietnamienne sur les terres, seul existait le droit d’utilisation des terres et non pas le droit de propriété.

 

Il est très probable que le gouvernement vietnamien hésite à accomplir un geste de restitution qui risque d’entraîner des centaines d’autres revendications du même genre, réclamant la restitution des propriétés confisquées dans les années qui ont suivi le changement de régime de 1975. Il existe déjà un certain nombre de points brûlants, à Hô Chi Minh-Ville notamment où le cardinal Pham Minh Mân demande la restitution d’une propriété sise à côté du petit séminaire, à Huê où la Conférence épiscopale a officiellement réclamé des terres accaparées sur le centre marial de La Vang, à Dalat où les évêques voudraient récupérer l’ancien séminaire pontifical. Chaque diocèse garde en réserve plusieurs requêtes de ce type. Mais les demandes de restitution devraient être au moins aussi nombreuses dans les autres religions, en particulier chez les bouddhistes.