Eglises d'Asie

Orissa : le cardinal Toppo demande au Premier ministre de prendre des mesures adéquates pour protéger les chrétiens victimes d’attaques pendant les fêtes de Noël

Publié le 18/03/2010




« L’Etat doit pouvoir assurer la sécurité des chrétiens et protéger leur vie et leurs biens. Nous sommes très inquiets pour la communauté chrétienne de Kandhamal, qui n’est toujours pas en sécurité », a déclaré, le 2 janvier dernier, le cardinal Toppo (1), président de la Conférence épiscopale d’Inde (CBCI, Catholic Bishops’ Conference of India), après avoir rencontré, à l’archevêché de Cuttack-Bhubaneswar, des victimes des attaques antichrétiennes perpétrées pendant les fêtes de Noël dans le district de Kandhamal, en Orissa (2). Le prélat a également rencontré le Premier ministre indien, Manmohan Singh, pour attirer l’attention sur le « tragique » de cette série d’attaques « injustifiées ».

Le cardinal avait prévu de visiter les victimes sur les lieux des attaques. Or, selon des sources ecclésiales, les autorités n’ont pas autorisé le cardinal ni différentes associations chrétiennes à se rendre à Kandhamal pour venir en aide aux sinistrés, arguant de problèmes de sécurité.

 

Pendant ces cinq jours de violences qui ont débuté le 24 décembre dernier, cinq personnes ont été tuées, 50 églises et 400 maisons de chrétiens ont été incendiées. D’après une religieuse de ce district majoritairement peuplé d’aborigènes, les catholiques, baptistes et pentecôtistes de la région avaient décidé, cette année, de célébrer ensemble la fête de la Nativité. Les autorités locales avaient promis d’assurer une protection policière pendant les différentes célébrations organisées sous une grande tente, endroit où les premières attaques ont éclaté.

 

Différents responsables chrétiens de l’Orissa se plaignent que leurs fidèles soient continuellement harcelés ou attaqués par des militants nationalistes, membres du BJP, le parti nationaliste hindou au pouvoir dans l’Etat. Cette dernière vague de violences a provoqué d’importantes manifestations de protestations dans différents Etats de l’Inde. Beaucoup estiment que ce sont des extrémistes hindous qui ont prémédité ces attaques afin de chasser les chrétiens de la région de Khandamal. De leur côté, les nationalistes hindous accusent les chrétiens d’entretenir des liens avec les maoïstes afin de semer la confusion dans la région et de convertir les hindous par la force (3). A ce titre, ils revendiquent l’instauration d’une loi interdisant le « prosélytisme offensif ».

 

Selon certains analystes, ces dernières attaques ressemblent étrangement à celles perpétrées contre des aborigènes chrétiens, au Gujarat, lors des fêtes de Noël en 1998 (4). Des violences ont également éclatées ces derniers mois, dans différents Etats, comme au Chhattisgarh (5), au Madhya Pradesh (6), et au Rajasthan (7). Pour Jose Kavi, journaliste, ce type de violences survient principalement dans les régions peuplées majoritairement d’aborigènes, où les missionnaires chrétiens et les groupes nationalistes hindous – soucieux pour leur part de créer « une Inde hindoue » – sont actifs.

 

Les groupes nationalistes hindous considèrent, en effet, qu’ils ne peuvent diriger politiquement l’Inde que dans la mesure où les aborigènes (plus de 8 % de la population) et les dalits (16,5 %) – catégories sociales rejetées par la société indienne – se rallient à leur parti. Les chrétiens engagés auprès des populations les plus pauvres sont, de fait, considérés comme un obstacle à la réalisation de leur plan et la pression exercée sur les minorités religieuses s’intensifie depuis plusieurs années, créant un climat social tendu où les minorités sont de plus en plus marginalisées.