Eglises d'Asie

POUR APPROFONDIR – Interview de Mgr Joseph Ngô Quang Kiêt à propos des manifestations de prière de Hanoi

Publié le 18/03/2010




Vietcatholic News : Ces jours derniers, l’Etat a-t-il pris des initiatives donnant aux affaires en cours une orientation plus positive ?

 

Mgr Joseph Ngô Quang Kiêt : Il n’y a rien eu de plus que quelques rencontres, quelques propos entendus, les promesses d’examen et de règlement du Premier ministre. Mais la municipalité a de nouveau délivré un permis de construire pour le terrain de la paroisse de Thai Hà. Je ne comprends pas ce qu’ils veulent faire. Rien ne garantit encore que les aspirations des laïcs seront satisfaites. Il nous faut donc continuer de beaucoup prier.

 

Ne peut-on pas craindre que, lorsque les fidèles prient ainsi, surveillés par les agents de la Sécurité, de la garde civile, et de la police, équipés d’armes, des incidents n’éclatent ?

 

Nous n’avons rien à craindre si nous gardons une attitude juste. J’ai attiré l’attention des fidèles sur le fait que, lorsqu’ils priaient, ils devaient garder la maîtrise d’eux-mêmes et qu’ils ne devaient pas se laisser aller à la violence, à la provocation ou encore à la bagarre. En tant que témoin du Christ, ils doivent faire preuve d’un esprit de concorde. Je suis persuadé que si les fidèles ont assez de caractère pour rester maîtres d’eux-mêmes, garder la modération et se consacrer à la seule prière, aucune altercation ne devrait avoir lieu. Ainsi, par exemple, à la paroisse de Thai Hà, des provocateurs ont jeté de l’eau sale sur les symboles religieux afin de pousser à bout les fidèles. Les fidèles ont su rester maîtres d’eux-mêmes.

 

A supposer que l’Etat fasse une promesse ou émette un décret mettant un terme aux travaux de construction et d’aménagement, ou encore qu’il n’utilise plus le terrain de la Délégation apostolique, que se passerait-il ?

 

Notre réclamation propose que nous soit restitué le droit d’utilisation du terrain et les biens de l’Eglise. Lorsque nous aurons atteint cet objectif, notre prière à ce sujet cessera. Notre proposition ne porte pas sur l’arrêt des travaux de construction et d’aménagement mais sur la restitution des biens de l’Eglise en ces divers endroits. Notre demande que cessent les travaux, précédemment et actuellement, a pour but d’empêcher que la situation ne devienne encore plus complexe. L’Eglise ne veut pas porter la responsabilité des nouvelles constructions édifiées sur un terrain dont elle a été spoliée.

 

En ce cas, il y a des chances que les prières actuelles durent encore longtemps…

 

La prière ne cesse jamais dans la vie d’un croyant. Elle est la respiration de la vie d’un fidèle. Lorsqu’il rencontre des difficultés, le fidèle se tourne vers son Dieu pour le prier. En ce qui concerne la prière pour la restitution des biens d’Eglise, ce n’est que lorsque cet objectif sera atteint que ce type de prière arrêtera. Cela dépend de l’Etat : écoutera-t-il ou non la voix et les aspirations légitimes des fidèles ? Quand nous rendra-t-il justice ?

 

Ainsi, les fidèles risquent de rencontrer dans leur vie certaines difficultés. Par exemple, les autorités ne vont-elles pas harceler ceux qui participent à la prière ?

 

Nos fidèles sont extrêmement courageux. Mais, en dehors de la prière, quelles mauvaises actions auraient-ils commis pour avoir peur ? S’ils devaient avoir des ennuis à cause de leur prière, alors il faudrait qu’ils fassent cela avec toute l’Eglise catholique et non plus seulement avec un petit nombre de personnes. Il est nécessaire d’appliquer correctement les dispositions de la Constitution et de la législation en vigueur…

 

Si la Sécurité et la police n’en tiennent pas compte, répriment et jettent en prison les fidèles qui prient, que va-t-il se passer ? Avez-vous pensé à cette possibilité ?

 

Je ne pense pas que l’Etat se comporte ainsi avec des laïcs priant dans la paix et sans violence, alors que l’Etat ne cesse d’exalter l’édification d’un Etat de droit. Comme je viens de vous le dire, la prière c’est la vie, la respiration des chrétiens qui ainsi s’unissent à Dieu. Personne n’a le droit d’interdire aux fidèles de prier… Mais si quelqu’un doit être mis en prison pour avoir prié, c’est moi qui devrais être emprisonné et non les fidèles, car c’est moi qui les ai appelés à prier.

 

Et vous, Monseigneur, quelles sont vos prières ?

 

La prière, c’est ma vie. Je ne cesse de prier pour l’Eglise, pour les fidèles, pour la prospérité et la paix du pays, pour que notre nation progresse au rythme du monde. Je prie pour que les dirigeants de notre pays soient assez éclairés et sages pour conduire le pays et qu’ils garantissent la démocratie, la liberté et le bonheur pour notre peuple.

 

Les grands médias internationaux s’intéressent aux affaires actuelles. Un certain nombre d’entre eux voudrait vous interviewer. Pourquoi refusez-vous ?

 

Il ne s’agit pas d’un refus, mais je voudrais consacrer le peu de temps dont je dispose à attendre les interventions de l’Etat. Je souhaite que les autorités prennent des initiatives montrant leur bonne volonté, conformes à la justice. Je ne veux pas rendre ces affaires encore plus compliquées.