Eglises d'Asie

L’Eglise catholique dénonce la précarisation du marché de l’emploi

Publié le 18/03/2010




Le 11 février dernier, à l’issue de l’une des deux réunions annuelles du Comité épiscopal ‘Justice et Paix’, Mgr Boniface Choi Ki-san, évêque d’Incheon et président du Comité, a demandé au gouvernement de veiller à protéger les travailleurs en situation précaire, qui, sur le marché du travail, ne sont pas protégés par un contrat à durée indéterminée. Selon lui, la croissance économique et la productivité ne doivent pas être recherchées aux dépens des plus faibles de la société.

Dans une économie qui tend vers toujours plus de flexibilité (1), les employés à statut précaire sont de plus en plus nombreux. Près de 90 % d’entre eux travaillent dans des PME et ce sont le plus souvent les membres les plus « faibles » de la société qui fournissent leurs rangs, c’est-à-dire les femmes, les personnes âgées, les handicapés, les immigrés ou bien encore les travailleurs manuels. Selon Mgr Choi, ils représentent un tiers de l’emploi salarié dans le pays et leur nombre ne cesse de croître (2).

 

Pour le P. Hugo Park Jung-woo, secrétaire du Comité épiscopal, c’est précisément parce que le travail précaire augmente que l’épiscopat a souhaité prendre position dans le débat public. Il a ajouté que le contexte politique actuel avait également motivé sa démarche, le gouvernement qui s’installe ces jours-ci à la tête du pays ne montrant aucun signe en faveur des plus faibles de la société sud-coréenne.

Elu le 19 décembre 2007 sur un programme d’inspiration néolibérale et un slogan visant à relancer la croissance économique (« 747 », pour 7 % de croissance annuelle, 40 000 dollars de revenu par habitant, et accession de l’économie de la Corée du Sud au 7ème rang mondial), Lee Myung-bak (GNP – Grand parti national, droite), nouveau président sud-coréen, a prêté serment le 25 février dernier. Il succède à Roh Moo-hyun, mettant ainsi un terme à dix ans de pouvoir dominé par le centre-gauche.

Pour éclairer les débats du Comité épiscopal, un professeur de droit de l’Université nationale Kyungpook, Achilleus Moon Moo-gi, a été appelé à exposer les récentes évolutions du droit du travail en Corée. Une « loi de protection des travailleurs à statut précaire » est en effet entrée en vigueur le 1er juillet 2007. Elle stipule qu’un employé qui a travaillé deux années consécutives avec un contrat à durée déterminée (CDD) chez un même employeur doit automatiquement voir son contrat de travail requalifié en contrat à durée indéterminée (CDI). Le professeur Moon a expliqué que les employeurs avaient protesté contre cette loi, au motif qu’elle augmentait les coûts liés à la main-d’œuvre, et que, paradoxalement, les syndicats avaient fait de même. En effet, l’application de la loi a donné lieu à des licenciements massifs, les employeurs choisissant de se défaire de leurs employés en CDD, avant que ceux-ci ne parviennent à deux années d’emploi consécutives.

Dans son appel du 11 février, Mgr Choi Ki-san a demandé aux employeurs de voir en la personne de leurs employés en CDD des « compagnons » et de faire leur possible pour leur garantir un salaire décent et des conditions d’emploi stables. Aux pouvoir publics, il a lancé l’appel suivant : « Nous demandons instamment au gouvernement et à l’Assemblée nationale de réviser un appareil législatif qui ne satisfait ni les employés ni les employeurs. » Enfin, à l’adresse des diocèses, des paroisses et des institutions catholiques, il a demandé que l’Eglise balaie devant sa porte en veillant à ce que les personnes employées en CDD voient leur contrat transformé en CDI.