Eglises d'Asie

Tamil Nadu : une étude qualitative menée dans une université publique montre que les conversions au christianisme relèvent d’expériences spirituelles personnelles

Publié le 18/03/2010




« Les conversions au christianisme relèvent d’expériences spirituelles personnelles et non de pressions extérieures ou de conversions forcées. » Telles sont les conclusions d’une étude qualitative menée par Lyadurai Joshua (1), chercheur protestant, dans le cadre de ses études doctorales au Département des études chrétiennes de l’université publique de Madras (Chennai).

Publiée le 16 février dernier, cette étude a été réalisée auprès de 137 personnes – 87 hommes et 50 femmes –, contemporaines ou ayant vécues ces deux derniers siècles (2). Ses conclusions viennent contredire les accusations propagées par les mouvements nationalistes hindous selon lesquelles les missionnaires chrétiens convertissent au christianisme les hindous les plus pauvres en leur offrant des subsides financiers, des emplois ou des services éducatifs et de santé.

 

Selon cette étude, la conversion au christianisme se définit comme « la décision d’accepter Jésus-Christ comme Dieu fait homme et de le suivre fidèlement ». Si ces conversions personnelles amènent parfois à changer de religion, le passage au christianisme n’est pas systématique, puisque certaines personnes choisissent de garder leur religion d’origine, tout en suivant le Christ, souligne encore l’étude.

 

Le panel des 137 personnes concerne des convertis de différentes régions de l’Inde, parmi lesquels 117 hindous, dix musulmans, trois sikhs, quatre personnes se disant athées et trois animistes. Dans la plupart des cas, la conversion a eu lieu à la suite d’une crise personnelle. Même si les problèmes n’ont pas toujours été résolus après la conversion, les convertis affirment que, depuis celle-ci, « ils sont en paix et vivent dans la confiance car ils ont l’intime conviction que Jésus est avec eux ». Ils perçoivent le Christ comme « un ami aimant » qui les conduit à changer leurs valeurs. L’étude menée pendant trois ans signale également que la plupart des conversions ont lieu pendant la période de l’adolescence, bien que certaines personnes se convertissent aussi à l’âge adulte.

 

Néanmoins, les convertis souffrent bien souvent d’ostracisme et, pour certains, leur conversion au christianisme leur a coûté la vie, tel Willayat Ali, musulman converti au christianisme assassiné en 1857, après avoir annoncé qu’il était devenu chrétien, malgré les menaces de mort qu’il avait reçues. Dans de nombreux cas, loin de recevoir des subsides, les convertis sont rejetés par leur famille et leurs amis. Grâce à l’aide de sa mère qui l’a aidée à prendre la fuite, une adolescente d’origine musulmane a ainsi échappé à la mort dont son père la menaçait.

 

L’étude révèle également que, plus l’appartenance sociale est élevée, plus l’ostracisme est aigu, notamment pour les personnes issues de la haute caste des brahmanes (3). « Quand un individu se convertit, sa famille s’y oppose ; lorsqu’une famille se convertit, c’est la société qui s’y oppose », commente Lyadurai Joshua, ajoutant que les conversions engendrent de la souffrance surtout lorsque « les personnes expriment ouvertement leur conversion », ces dernières trouvant alors un soutien important dans la prière et la parole de Dieu. D’autres préfèrent ne pas annoncer leur conversion, telle la femme d’un riche homme d’affaire du Tamil Nadu, qui, pendant plus de 30 ans, a caché sa bible dans un plat à riz.

 

« Certains convertis issus de groupes sociaux défavorisés, tels les dalits ou les aborigènes, acceptent le christianisme comme une nouvelle identité », ajoute le chercheur protestant, insistant sur le fait que le fruit de la conversion est « le bien-être des personnes » et que de telles conversions ne peuvent en aucun cas être considérées comme des conversions forcées, car aucune Eglise chrétienne en Inde n’accepte un changement de religion sans une conversion du cœur.