Eglises d'Asie

Dans certains pays d’Asie, les gouvernements tendent à restreindre la liberté de l’Eglise catholique dans le domaine de l’enseignement

Publié le 18/03/2010




Plusieurs participants à une rencontre organisée en Thaïlande par le Bureau pour l’éducation et la formation chrétienne de la Fédération des Conférences épiscopales d’Asie (FABC) ont souligné que, dans un certain nombre de pays d’Asie, la liberté d’action de l’Eglise était de plus en plus restreinte dans le domaine de l’éducation.

Pour Steven Selvaraju, directeur des projets au Bureau catéchétique national de Malaisie, les écoles catholiques de son pays sont ordinairement réputées pour l’excellence de la formation académique qui y est dispensée – et une partie non négligeable des élites de la Malaisie contemporaine y est ou y a déjà été formée. Mais, depuis les années 1970, la réislamisation de ce pays majoritairement musulman rend les choses plus difficiles. « Les autorités ont peu à peu pris le contrôle des établissements fondés par les missionnaires, a-t-il expliqué. L’enseignement de toute autre religion que l’islam n’est pas autorisé dans les écoles et, dans certaines écoles catholiques dirigées par des recteurs musulmans, les croix et autres symboles chrétiens ont été enlevés. »

Dans un pays qui présente un subtil équilibre entre les communautés ethniques et les religions, « il est devenu quasiment impossible de proposer une formation à la foi (chrétienne) dans le cadre de nos écoles et y célébrer l’Eucharistie est presque impensable », a-t-il ajouté. La formation catéchétique migre donc des écoles vers les paroisses, mais, de ce fait, le lien entre formation humaine, formation chrétienne et Eucharistie n’est plus évident en milieu scolaire. Enfin, sur un plan pratique, les autorités n’ont pas hésité à prendre juridiquement le contrôle de certaines écoles catholiques, sans dédommager l’Eglise, lorsque, par exemple, des baux emphytéotiques sont arrivés à expiration et n’ont pas été prorogés.

Steven Selvaraju intervenait devant une trentaine d’évêques et de responsables laïcs actifs dans le domaine de l’éducation en Asie. Du 25 au 30 mai dernier, réunis sur le campus de l’Université de l’Assomption à Suvarnabhumi, au sud-est de Bangkok, ils réfléchissaient aux implications dans le domaine de l’éducation de l’exhortation apostolique de Benoît XVI de mars 2007 sur « le sacrement de l’amour » (‘Sacramentum Caritatis’), texte où est souligné la centralité de l’Eucharistie comme source et sommet de la vie et de la mission de l’Eglise. La rencontre avait aussi pour objet de préparer la neuvième assemblée plénière de la FABC, qui se tiendra début 2009 en Inde sur le thème : « Vivre l’Eucharistie en Asie ».

Deux délégués venus de Birmanie ont, quant à eux, indiqué que les militaires au pouvoir n’étaient toujours pas revenus sur les nationalisations menées dans les années 1960, après la prise du pouvoir du général Ne Win, en 1962. Aujourd’hui, mis à part quelques écoles d’infirmières tenues par des congrégations religieuses féminines, le gouvernement interdit à l’Eglise catholique et aux Eglises chrétiennes de manière générale, d’investir le champ éducatif. Les conséquences de cette politique sur la jeunesse, y compris la jeunesse catholique, sont sensibles, ont-ils souligné. « Les jeunes n’ont pas de temps pour ce qui relève du spirituel », a déclaré l’un des deux délégués. « C’est l’égoïsme qui prévaut. Sans perspective pour une éducation supérieure de qualité ou un emploi bien rémunéré, les jeunes ne pensent qu’à quitter le pays », a ajouté le second délégué.

Une note plus positive est venue du Vietnam, avec le témoignage de Mgr Paul Bui Van Doc, évêque du diocèse de My Tho et président de la Commission épiscopale vietnamienne pour la doctrine de la foi. Dans ce pays dirigé par un Parti communiste, l’éducation est bien entendu un domaine réservé de l’Etat, mais il est encourageant pour l’Eglise de voir que s’ouvrent des jardins d’enfants tenus par des religieuses dans de nombreuses localités ; peu à peu, on peut espérer que les autorités laisseront l’Eglise réinvestir le champ éducatif, y compris pour les établissements d’enseignement supérieur.